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Les Sources de la Législation islamique (la Shari’ah) dans les deux Ecoles
L’Attitude des deux Ecoles à l’égard du Droit islamique (al-Fiqh) et de l’Ijtihâd*
* (l’effort fourni par le jurisconsulte pour déduire le décret divin, la loi)
1- L’évolution sémantique du terme Al-Ijtihâd dans l’Ecole des califes.
Les deux termes Ijtihâd et Mujtahid sont apparus après l’époque des Compagnons et des Tâbi’îne qui parlaient plutôt d’interprétation quand cela voulait dire une violation de leur part de la loi religieuse en vigueur. Ainsi par exemple, lorsque Khâlid b. al- Walîd eut tué Mâlik b. Nuwayrah, le gouverneur du Prophète (SAW), il se présenta devant le calife Abû Bakr et dit en guise d’excuse: «Ô successeur du Messager d’Allah! J’ai interprété; j’ai eu (un peu) raison, (un peu) tort ». De même, quand ‘Umar eut dit à Abû Bakr: «Khâlid a commis le zinâ (la fornication); lapide-le », le calife lui dit: «je ne peux le lapider car comme il a interprété, il s’est trompé!».
Citons aussi le récit d’Az-Zuhrî à partir de ‘Urwah citant ‘Aïsha: la prière fut décrétée (d’abord) deux Rak’at; celle du voyageur est restée ainsi tandis que celle du résident fut complétée (par deux autres rak’at). Az-Zuhrî demanda à ‘Urwah: «Mais pourquoi donc ‘Aïsha en état de voyage parachève-t-elle la prière?». «Elle a interprété comme l’a fait ‘Uthmân».(1)
A son tour, Ibn Hazm dit (dans Al-Fiçal): «’Ammâr (r. d.) fut tué par Abîl-Ghâdiyah. Sachant que ‘Ammâr avait prêté serment d’allégeance au Prophète (SAW) qu’il avait donc assisté à l’allégeance de la satisfaction divine, qu’Allah connaissait le contenu de son cur, qu’IL a fait descendre sur lui la Sakînah (la quiétude), ‘Ammâr est tombé martyr (témoin d’Allah). En revanche, Abîl-Ghâdiyah, le Compagnon qui l’a tué a fait preuve d’interprétation. Mais, malgré son Ijtihâd, il s’est trompé. Sa récompense (et non-châtiment) est de recevoir une seule rétribution (au lieu de deux rétributions s’il ne s’était pas trompé). Mais le cas d’Abîl-Ghâdiyah est différent de celui des meurtriers de ‘Uthmân (r. d.) car il n’y avait pas lieu pour ceux-ci d’opérer de l’Ijtihâd dans ce meurtre». (2)
En parlant du même compagnon: Abîl-Ghâdiyah, Ibn Hajar dit: «il convient de croire que les Compagnons qui ont participé à toutes ces guerres, faisaient usage d’interprétation. Or le musulman Mujtahid qui se trompe a droit à une rétribution, à plus forte raison s’il fait partie des Compagnons». (3)
Ibn Hazm (Al-Muhallâ) et Ibn At-Turkmânî (Al- Jawharun-Naqî) disent ceci: «Nulle divergence au sein de la Communauté, que ‘Abdur-Rahmân b. Muljam n’a tué ‘Ali qu’après avoir fait preuve d’interprétation et considère que son acte était juste, comme le dit en poésie ‘Umrân b. Hittân:
Oh! Le coup du pieux!
Dont il ne vise que l’agrément d’Allah.
Quant je me souviens de lui
Je le considère comme ayant auprès d’Allah
Le plateau de la balance le plus rempli. (4)
Le Sheikh ‘Abdullatif écrivit aussi en marge du livre Aç-Çawâ’iq: «Tous les Compagnons à l’époque de ‘Ali étaient ou bien de son côté ou bien contre lui ou neutres pour cause d’interprétation. (L’erreur) ne les sort point du statut de l’équité». (5)
En parlant de Yazîd b. Mu’âwiyah, Ibn Kathîr dit: «Ils ont expliqué ses agissements comme consécutifs à son interprétation qui déboucha sur l’erreur… Ils ont dit aussi: il était imam (calife) vicieux mais non passible de démission… Il n’est pas permis de se soulever contre lui. Quant à l’information selon laquelle Yazîd afficha une grande joie quand il a entendu parler de ce qu’avait fait son armée des habitants de Médine le Jour d’Al-Harrah, cela s’explique par le fait qu’il se voyait l’imam (le calife) légitime à l’obéissance duquel ils ont manqué. Comme ils ont pris un autre prince que lui, il avait le droit de les combattre jusqu’à leur retour à l’obéissance et leur intégration à l’ensemble de la Communauté». (6)
Ainsi les deux compagnons Khâlid b. al-Walîd et Abû Bakr, dans le premier récit, qualifièrent l’assassinat de Mâlik b. Nuwayrah et le mariage avec sa femme, d’interprétation.
Etait aussi une interprétation l’acte par lequel Aïsha parachevait la prière du voyageur en contradiction avec le hadîth qu’elle avait elle-même rapporté.
Pour Ibn Hazm, Abûl-Ghâdiyah, l’assassin de ‘Ammâr b. Yâsir a fait preuve d’interprétation et eut donc droit à une seule rétribution (parce qu’il s’est trompé).
On a dit la même chose du meurtrier de ‘Ali (a. s.) …
Ainsi la mise en application des opinions personnelles fut d’abord comprise comme un acte d’Ijtihâd. Ensuite, les savants dans l’Ecole des califes, emboîtèrent le pas aux Compagnons et aux califes dans ce domaine et se permirent d’ouvrir la porte de l’Ijtihâd c’est à dire en fait la valorisation de l’opinion personnelle. Mais ils ont découvert pour cela des règles dont l’ensemble fut appelé science des fondements de la jurisprudence. Le recours à ces règles et l’acte par lequel ils en déduisaient les décrets religieux ou lois furent aussi appelés: Ijtihâd; celui qui s’y exerce fut appelé Mujtahîd.
Pour la terminologie islamique proprement dite la science religieuse s’appelle Al-fiqh et celui qui l’exerce s’appelle Al-faqîh. Pour en savoir plus, il convient d’étudier ces trois volets de la question.
– L’appellation
– Les premiers Mujtahîd du premier siècle de l’hégire et les différents lieux de leur Ijtihâd.
– Al-Ijtihâd au deuxième siècle de l’hégire et après cette période – la déduction des lois par le recours aux acts des Compagnons.
2- Al-Ijtihâd – cette appellation
At-Ta’wîl: terminologie linguistique et terminologie Shar’î
Tah’lab (mort en 291 h.) dit: At-Ta’wîl = la signification et l’explication se valent. (7)
Al-Jawharî (mort en 396 h.) dit: At-Ta’wîl = l’explication de la fin vers laquelle tend une chose donnée. (8)
Ar-Râghib Awl = At-Ta’wîl, du substantif Awl, le retour à l’origine.
Al-Mu’il = le lieu du retour
At-Ta’wîl = le fait de ramener la chose à sa fin voulue:
«Nul autre qu’Allah ne connaît son interprétation (Ta’wilahu) du Livre. Et ceux qui sont enracinés dans la science …». (V. 7/III)
«Qu’attendent-ils? Sinon son At-Ta’wîl (son interprétation, son accomplissement) Le jour ou viendra son At-Ta’wîl, …» (V. 53/VII)
Le mot Ta’wîl est employé ainsi tant dans le Livre que dans la sunnah dans le sens de l’interprétation du rêve:
«Fais-nous connaître son Ta’wîl (sa signification, son interprétation)». (V. 36/XII)
De même, le Messager (SAW), suite au songe au sujet de la bataille de ‘Uhud: «J’ai interprété (ta’awwaltu) le bouclier comme étant Médine». (9)
Dans l’emploi du Ta’wîl par les Compagnons et les Tâbi’îne, on trouve un sens nouveau, (sens figuré). At-Ta’wîl veut dire dans l’Ecole des califes: le changement qu’on opère sur les décrets (Al-Ahkâm). Ibn al-Athîr dit alors: «At-ta’wîl, substantif de awala plus la préposition à “ilâ ” veut dire devenir quelque chose; le ta’wîl signifie donc le transfert du sens apparent du terme, de sa signification première, originelle vers un autre sens basé sur un argument. N’eût été cet argument, le sens premier du terme n’aurait pu être délaissé» (10)
Ainsi ils (les partisans de cette Ecole) ont changé la signification du terme et cela s’est propagé dans les livres du hadîth. Dans le livre Al-Adab du Sahîh, Al- Bukhârî dit par exemple: « “celui qui” accuse son frère de mécréance, sans ta’wîl, “ceux qui considèrent que cela ne relève pas de la mécréance s’il l’a dit muta’awwilan, interprétant, ignorant». (11)
Dans Fath al-Bârî, sous la rubrique “des interprétants”, le commentateur dit: «Celui qui accuse un Musulman de mécréance (lui impute – la qualité de mécréant), il faudra voir: si cela n’est pas fait sur base de ta’wîl, l’accusateur est blâmable, peut-être est-ce lui le mécréant. S’il l’a dit en arguant d’un ta’wîl, il faudra voir; si celui-ci n’est pas valable, l’accusateur est blâmable mais non mécréant (on lui expliquera alors le lieu de son erreur et on le réprimandera); si par contre, l’imputation de la mécréance s’est faite sur base d’un ta’wîl valable, son auteur n’est pas blâmable …
Les savants disent: tout muta’awwil (interprétant) est excusable, non-pécheur si son ta’wîl est sémantiquement passable. (12)
C’est ainsi que s’opère l’évolution du terme Ta’wîl qui équivaudrait par après au terme ijtihâd. Voyons à présent les Mujtahidîne de la première époque musulmane et l’objet (les lieux) de leur ijtihâd.
3- Les Mujtahidîne de l’Ecole des califes au premier siècle de l’Islam
1)- Le Sceau des prophètes et le maître des Messagers (SAW)
Ce sont les partisans de l’Ecole des califes qui croient que le Messager d’Allah (SAW) figure parmi les Mujtahidîne. Ceux de l’Ecole d’Ahlu-Bayt refuse cette appellation et n’impute point d’Ijtihâd au Prophète (SAW)
Nous ne commençons ici par le Prophète (SAW) que pour respecter le point de vue adverse.
Ibn Abîl-Hadîd, le Mu’tazilite dit par exemple, à l’occasion de l’attardement d’Abû Bakr et de ‘Umar à rejoindre l’escadron de ‘Ussâmah: «Le Messager d’Allah (SAW) envoyait ses expéditions militaires par Ijtihâd personnel et non suivant une révélation divine qu’il n’aurait pu transgresser». (13)
2)- Le premier calife Abû Bakr (r. d.)
A l’occasion de la réplique qu’il a faite à l’encontre d’At-Tûsî qui reprocha au calife Abû Bakr «d’avoir brûlé al-Fujâ’ah As-Sulamî, de ne pas avoir assimilé Al-Kalalah, en matière successorale, et d’avoir ignoré la part de l’héritage dévolue à la grande-mère», Al- Qawshajî dit: «Il l’a brûlé parce qu’il s’était trompé dans son Ijtihâd (effort d’interprétation) et combien de fois, des Mujtahidîne comme lui se trompent! Quant aux deux questions successorales, il n’est pas nouveau qu’un Mujtahid (un jurisconsulte capable d’interpréter) cherche à connaître les fondements des lois auprès de ceux qui les ont bien assimilés …». (14)
Pour ce qui est du reproche adressé à Abî Bakr qui n’appliqua pas la sanction appropriée à Khalid b. al- Walîd, le même Al-Qawshajî dit: «Il a épousé sa femme (celle de Mâlik b. Nuwayrah) en temps de guerre; c’est donc une question objet d’Ijtihâd. Quant à la critique adressée par ‘Umar à Abî Bakr, à ce sujet, elle ne signifie pas que ‘Umar s’est attaqué à la qualité de calife qu’avait Abû Bakr, car il arrive que certains savants critiquent d’autres». (15)
3)- Le Compagnon Mujtahid Khâlid b. al-Walîd
Ibn Kathîr dit: «Abû Bakr garda Khâlid à la tête de l’expédition bien que ce dernier se soit trompé dans son Ijtihâd relatif au meurtre de Mâlik b. Nuwayrah». (16)
4)- Le deuxième calife ‘Umar b. al-Khattâb
Ibn Abîl-Hadîd rapporte le cinquième reproche adressé à ‘Umar: «Il donnait du trésor public ce qu’il ne pouvait légalement donner. Ainsi il donnait à Aïsha et à Hafsa dix mille dirhams chaque année mais ne donna pas le quint (le cinquième) dévolu à Ahlul-Bayt …».
Comme réponse à cette critique, il dit: «Le trésor public est à répartir entre les ayants droits et il incombe au calife de faire preuve d’Ijtihâd en matière de distribution (peu ou prou). De même “le cinquième” est une question d’Ijtihâd … ‘Umar n’est donc pas sorti du domaine de l’Ijtihâd qui était la méthode des Compagnons». (17)
Le septième reproche adressé à ‘Umar:
«Il changeait de dispositions quant aux jugements qu’il émettait à tel point qu’en matière de l’héritage du grand-père, il a émis soixante-dix jugements voire cent. Il faisait preuve de favoritisme en matière de distribution des allocations annuelles alors qu’Allah – gloire à Lui – traite également l’ensemble des Musulmans. Il basait son verdict sur l’opinion personnelle et l’intuition».
En guise de réponse, on a dit: «Le désaccord et le changement de dispositions d’après les présomptions et la conjecture sont permis dans le domaine de l’Ijtihâd».
Al-Qawshajî dit: «Effectivement, il (‘Umar) a donné aux épouses du Prophète, statué en matière successorale, priva Fatima et Ahlul-Bayt de leur cinquième donna cent jugements différents, partagea l’argent partialement alors que cela n’était pas ainsi à l’époque du Prophète». «Mais, ajouta-t-il, tout cela car un mujtahid peut toujours s’opposer à un autre en matière d’Ijtihâd». (18)
Il veut dire que l’opposition de ‘Umar b. al-Khattâb (r. d.) au Messager d’Allah (SAW) dans toutes ces questions relève de l’opposition d’un Mujtahid (‘Umar) à un autre Mujtahid (le Messager d’Allah SAW) et cela n’est point blâmable!!!
5)- Le troisième calife ‘Uthmân
On reprochait à ‘Uthmân de ne pas avoir appliqué la loi du talion à ‘Ubaydillah b. ‘Umar (qui avait tué un homme soupçonné d’avoir participé au meurtre de son père) Al-Qawshajî y répondit ainsi:
«Il a fait preuve d’Ijtihâd et cru qu’il ne devait pas la lui appliquer parce que le meurtre s’est passé avant son investiture proprement dite (comme calife)». (19)
De la même question, Ibn Taymiyyah dit: «C’est une affaire sujette à l’Ijtihâd». (20)
On reprochait aussi à ‘Uthmân d’avoir ramené Al- Hakam (un Umayyade) de son exil auquel il fut condamné par Le Messager (SAW). La réponse à cette critique fut formulée ainsi: «Même si le Messager n’a pas permis le retour d’Al-Hakam à Médine, ‘Uthmân pouvait, s’il faisait preuve d’Ijtihâd, le faire puisque les circonstances changent». (21)
Ibn Taymiyyah dit à propos des relations très tendues entre ‘Uthmân et Ibn Mas’ûd: «Si chacun d’eux était mujtahid en ce qu’il disait, Allah le rétribuera pour ses bonnes actions et lui pardonnera les mauvaises».
Même en appliquant une sanction, l’imam mujtahid peut être digne de rétribution (en cas d’erreur); citons l’exemple du témoignage d’Abî Bakrah à l’encontre d’Al-Mughîrah. Le premier (témoin) est un homme de bien et pieux. Par son témoignage, il cherchait l’agrément d’Allah et voulait en être rétribué. (22)
La peine infligée par ‘Uthmân à Ibn Mas’ûd et à ‘Ammâr pouvait aussi relever de ce genre d’Ijtihâd et voir ainsi son erreur pardonnée, (23) à fortiori, les erreurs des adversaires en dispute (sont pardonnées). (24)
Pour ce qui est du troisième appel à la prière, ajouté par ‘Uthmân les jours de vendredi, Ibn Taymiyyah dit que c’était aussi une question d’Ijtihâd. (25)
A son tour, Ibn Hajar al-Haythamî dit: «Ibn Mas’ûd reprochait beaucoup de choses à ‘Uthmân. L’intérêt exigeait donc qu’il fût démi de ses fonctions. (26) Ensuite, on ne s’oppose pas ainsi aux auteurs de l’Ijtihâd mais ces maudits opposants n’ont ni compréhension ni raison (cervelle)». (27)
«L’Ijtihâd de ‘Uthmân, ajoute Ibn Hajar, impliquait qu’il arrêta le versement des allocations annuelles d’Ibn Mas’ûd. Chacun d’eux était Mujtahid donc on ne peut arguer des actes de l’un pour s’opposer à l’autre». (28)
Ibn Hajar dit de même au sujet de la prière du voyageur, ‘Uthmân l’ayant effectuée à Minan comme s’il était résident. (29)
6)- Al-Mujtahidah, la mère des croyants ‘Aïsha (r. d.)
A propos de la critique signalée par Al-‘Allâmah Abû Mançûr Ibn al-Mutahhar al-Hullîy (mort en 726 h.) à l’encontre de ‘Aïsha qui, en se soulevant contre l’Imam ‘Ali (a. s.), a violé l’ordre prescrit par le Coran («Restez dans vos demeures; ne vous montrez pas dans vos atours comme le faisaient les femmes au temps de l’ancienne ignorance». (V. 33/XXXIII), Ibn Taymiyyah(30) dit: «Elle ne s’est pas montrée dans ses atours comme le faisaient les femmes de la première Jâhiliyyah. Quant à l’ordre de garder la demeure, cela n’est pas contredit par une sortie motivée par la sauvegarde d’un intérêt … ‘Aïsha dont le voyage était dans l’intérêt général, a fait preuve d’interprétation. Or, tout mujtahid faisant une erreur dans son Ijtihâd est pardonné. L’erreur de ‘Aïsha est donc à fortiori pardonnée. Et ce, de par le Livre et la sunnah». (31)
A son tour Al-Qurtubî dit à propos de ‘Aïsha: «Mujtahidah, droite, rétribuée pour avoir fait de l’interprétation et pour avoir agi car tout Mujtahid dans la déduction des lois est dans son droit». (32)
7)- Mu’âwiyah b. Abî Sufiân : Le juste Mujtahid qu’on ne saurait concurrencer et le docte qu’on ne saurait égaler. (33)
8)- Son Ministre Amru b. al-‘As
Ibn Hazm dit: «Certes Mu’âwiyah et ceux qui étaient avec lui se sont trompés, mais ils étaient Mujtahidîne donc rétribués d’une seule récompense». (34)
En parlant de Mu’âwiyah et de ‘Amru b. al-‘As, Ibn Hazm dit aussi: «Ils ont fait preuve d’Ijtihâd dans des questions relatives aux délits de sang comme les juges qui divergent sur la question de condamner ou non le sorcier à mort. Quelle différence y a-t-il donc entre l’Ijtihâd des juges et celui de Mu’âwiyah et de ‘Amru? Si ce n’est l’ignorance, l’aveuglement et l’amalgame non fondé sur une science». (35)
A propos de l’histoire de l’arbitrage (entre les deux camps musulmans opposés (‘Ali et Mu’âwiyah), sachant que ‘Amru b. al-‘As confirma Mu’âwiyah dans sa place contrairement à l’accord conclu auparavant avec Abû Mûsâ al-Ash’arî, Ibn Kathîr dit: ‘Amru l’a fait parce qu’il voyait un intérêt (général). Or l’Ijtihâd aboutit tantôt à l’erreur tantôt à la rectitude». (36)
9)- Al-Mujtahid Abûl-Ghâdiyah, le meurtrier de ‘Ammâr
Ibn Hazm dit encore dans Al-Fiçal: «’Ammâr (r. d.) fut tué par Abîl-Ghâdiyah (Yasâr b. Saban As-Sulamî). Sachant que ‘Ammâr avait prêté serment d’allégeance au Prophète (SAW) qu’il avait donc assisté à l’allégeance de la satisfaction divine, qu’Allah connaissait le contenu de son cur, qu’IL a fait descendre sur lui la Sakînah (la quiétude), ‘Ammâr est tombé martyr (témoin d’Allah). En revanche, Abîl-Ghâdiyah, le compagnon qui l’a tué, a fait preuve d’interprétation. Mais, malgré son Ijtihâd, il s’est trompé. Sa récompense (et non-châtiment) est de recevoir une seule rétribution (au lieu de deux rétributions s’il ne s’était pas trompé). Mais le cas d’Abîl-Ghâdiyah est différent de celui des meurtriers de ‘Uthmân (r. d.) car il n’y avait pas lieu pour ceux-ci d’opérer de l’Ijtihâd dans ce meurtre». (37)
C’est ainsi que parla de lui Ibn Hajar As ‘Asqalânî à l’occasion de sa biographie (dans Al-Içâbah) où il le considère parmi les Compagnons qui ont fait preuve d’Ijtihâd.
10)- Mujtahidîne dans l’ensemble
Al-‘Allâmah dit: «Les reproches adressés à la communauté (des compagnons) sont si nombreux qu’Ibn al-Kalbî put composer tout un livre se rapportant aux défauts, et mauvais agissements des Compagnons sans citer un seul défaut sur le compte d’Ahlul-Bayt».
Ibn Taymiyyah dit en guise de réplique: «Dans la plupart de ces questions, les Compagnons sont excusés parce que leurs actes n’étaient pas des péchés mais des occasions d’Ijtihâd dans lesquelles celui qui vise juste aura la rétribution double et celui qui se trompe n’aura qu’une seule récompense. L’ensemble des actes des califes pieux, étaient de cette sorte». (3/19-30 du Minhaj-As-Sunnah).
Ainsi donc, les partisans de l’Ecole des califes, depuis le deuxième siècle de l’hégire jusqu’à nos jours – le début du quinzième siècle – sont unanimes à croire que tous les Compagnons sont Mujtahidûn, qu’Allah les rétribuera pour leurs disputes et leurs meurtres. Ils n’en sont pas seulement innocents, ils seront rétribués pour leurs mauvais actes.
Si ce qu’ils prétendent est juste, quelle justice de la part d’un Seigneur juste Qui considère nos mauvais actes comme mauvais et passibles de punition et les leurs comme bons et passibles de récompense!!!
Ils sont unanimes à juger ainsi les actes des Compagnons jusqu’à l’époque de Mu’âwiyah. Certains des partisans de l’Ecole des califes disent que cela englobe aussi l’époque de Yazîd, comme l’affirma Ibn Khaldûn dans sa Muqaddimah(38)
(Bon Sang!) Si tous ces gens étaient Mujtahidûn par le seul fait qu’ils étaient Compagnons du Messager, pourquoi ne disent-ils pas la même chose des meurtriers de ‘Uthmân? Pourquoi ne les considèrent-ils pas comme Mujtahidûn?
Ibn Hazm s’est posé la question et y a répondu ainsi: «Non, ce n’est pas la même chose, l’Ijtihâd n’a pas lieu ici car ‘Uthmân n’a pas tué, n’a pas semé scandale, n’a pas forniqué, n’a pas renié l’Islam non plus pour qu’on interprète quoi que ce soit à son égard. Les meurtriers sont donc pervers, rebelles et sanguinaires l’ont tué exprès et sans interprétation aucune. Injustes, ils sont donc “hérétiques” et maudits». (39)
«Je me demande, dit l’auteur, comment le meurtrier de l’Imam ‘Ali est devenu mujtahid, habilité à faire de l’interprétation et à tuer ainsi l’Imam dans la mosquée, en pleine prière!».
11)- Le calife imam Yazîd b. Mu’âwiyah
Abûl Khayr Ash-Shafi’î dit à son compte: «C’est un imam mujtahid». (40)
Ibn Kathîr dit, après avoir rapporté à partir d’Ibn al- Jawzî l’autorisation de le maudire: «D’autres (qu’Ibn al-Jawzî) défendent qu’on puisse le maudire pour que cela n’aille pas jusqu’à son père ou jusqu’à l’un des Compagnons. Ses mauvais agissements sont considérés par ces auteurs comme ayant été le résultat d’une erreur dans l’interprétation. Oui, il était pervers mais cela ne permet pas de le démettre de l’autorité suprême ni de se soulever contre lui afin que cela ne soit pas l’occasion de troubles, de sédition et d’effusion de sang. Quant à la joie qu’avait manifestée Yazîd lors de la victoire remportée par son armée à la tête de laquelle se trouvait Muslim b. ‘Uqbah, contre les habitants de Médine à la bataille d’Al-Harrah, elle (la joie) était légitime parce qu’il était l’imam à qui ils (les Médinois) ont désobéi …» (41)
Notes:
- Muslim, Sahîh, chap. “La prière des voyageurs”; Al-Bukhârî, Sahîh, 1/134
- Ibn Hazm, Al-Fiçal, 4/161
- Ibn Hajar, Al-Içâbah, 4/151
- Ibn Hazm, Al-Muhallû, 10/484; Ibn At-Turkmânî (mort en 750 h.), Al-Jawhar An-Naqî en marge d’Al-Bayhaqî (Sunan), 8/58-59
- En Marge d’As-Çawâ’iq, p. 209
- Ibn Kathîr, Târîkh …, 8/223
- Ibn Mandhûr, Lisânul-‘Arab, terme “Awl”
- Al-Jawharî, As-çihâh, terme “Awl”.
- Ad-Dârimî, Sunan, 2/129 et “Livre des songes”, chap. 13; Mâlik, Al-Muwatta’, “Livre de l’habillement”, h/ 16
- Ibn al-Athîr, Nihâyatul-Lughah, terme “Awl”
- Al-Bukhârî, Sahîh dans Fath al-Bârî, 13/129-130
- Ibn Hajar, Fath al-Bârî, 15/133, mais on voit que cette règle n’est pas appliquée au profit des Kharijites qui qualifient l’ensemble des musulmans de mécréants. L’Ecole des califes les appelle hérétiques sauf Ibn Muljam, le meurtrier de l’Imam ‘Ali (a. s.), lui est interprétant excusable!
- Ibn Abîl-Hadîd, Sharh An-Nahj, 4/178
- Al-Khawajah At-Tûsî, Tajrîdo al-Kalam in Adharî’ah, 3/351
- Al-Qawshajî, Sharh At-Tajrîd, p. 407
- Ibn Kathîr, Târikh, 6/323
- Ibn Abîl-Hadîd, Sharh An-Nahj, 2/153, 3/180
- Al-Qawshajî, Sharh At-Tajrîd, p. 408
- Al-Qawshajî, idem, p. 409; Ibn Abîl-Hadîd, idem, 1/243
- Ibn Taymiyyah, Minhâj As-Sunnah, 3/203
- Ibn Abîl-Hadîd, idem, 1/233
- Que dire alors Al-Mughîrah objet du témoignage selon lequel il était assis entre les jambes d’un Jamîl? Lui dit aussi, est-il Mujtahid digne de récompense parce qu’il fait partie des Compagnons?
- Même si son Ijtihâd est opposé aux textes du Livre et de la sunnah?!
- Ibn Taymiyyah, Minhâj As-Sunnah, 3/193
- Ibid. 3/204
- L’intérêt de qui?!, d’Ibn Mus’ûd?!, des Musulmans !?, ou des Omayyades?!
- Ibn Hajar, As-Çawâ’iq …, p. 111
- Ibid. et p.112
- Ibid. et p.113
- Ibn Taymiyyah composa son livre Minhâj As-Sunnah en réponse à Al-‘Allamâh qui avait écrit son livre Minhâj al-Karâmah, éd. Egypte 1322 h.
- Ibn Taymiyyah, Minhâj …, 14/190
- Al-Qurtubî, Tafsîr, 14/182
- C’est ainsi que l’avait décrit Ibn Hajar al-Haythamî dans son Tathîrul-Lisân, p. 22
- Ibn Hazm, Al-Fiçal …, 4/161
- Ibn Hazm, Al-Fiçal …, 4/160
- Târîkh, Ibn Kathîr 7/128.
- Ibn Hzm, Al-Fiçal, 4/161
- Ibn Khaldûn, Al-Muqaddimah, p. 380
- Ibn Hazm, Al-Fiçal, 4/161.
- Ibn Kathîr, Târîkh, 13/9
- Ibn Kathîr, Târikh, 8/222-224