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Hoffmann : Le prêche du vendredi s’adresse davantage au cœur qu’à la raison
Le penseur allemand : “J’aime faire ma prière tout seul afin de mieux contrôler mon rythme, et j’ai découvert qu’elle contribue à soigner les symptômes dus aux tensions contemporaines”
Dr Murad Hoffmann poursuit le récit détaillé de sa saga religieuse vers l’islam, soulignant qu’il préfère prier seul afin de “mieux contrôler le rythme de ma prière, lequel se caractérise généralement dans la mosquée par l’accélération, car il faut tenir compte, lors de la prière dans la mosquée, de l’état de santé des malades et ceux qui sont pressés.” Il admet cependant les bienfaits de la prière du groupe et son attachement à celle-ci.
“Mais loin des mosquées qui possèdent un imam déterminé, une prière de groupe doit élire celui qui en assure la présidence (imamat). L’hôte est d’ordinaire appelé à accomplir cette fonction mais, en tout état de cause, je préfère quant à moi déléguer cette fonction à l’un de mes convives (tel l’ambassadeur d’Arabie Saoudite, ou le président du Parti marocain de l’Istiqlal, maître Mohamed Boucetta, lorsque nous nous rencontrons à la table de l’Iftar (rupture du jeûne) au mois de Ramadan, dans ma résidence de Rabat).
“Or, d’étranges circonstances ont voulu que je m’érige moi-même en imam. En effet, à mon arrivée à San Francisco ce 10 octobre 1985 pour participer à la célébration annuelle du groupement du Nord Atlantique, je me mis en devoir de chercher, dans le guide téléphonique et le répertoire des églises, l’adresse d’une mosquée. J’étais certain que dans cette capitale des doctrines américaines je ne tarderais pas à découvrir un groupe islamique. J’étais donc agréablement surpris de lire “Centre islamique, 850 Devisadero Street, culte quotidien à midi, le dimanche à 13 heures”, tout comme les églises qui ne fixent pas les heures de prières selon la position du soleil, conformément à la tradition musulmane. A mon arrivée à cette adresse, j’ai trouvé un groupe de trois personnes de couleur noire. En attendant l’heure de l’appel à la prière, un cheikh à la barbe grisonnante, portant de larges lunettes inclinées vers le bas, se mit à lire le Coran, en langue arabe, en suivant le texte du doigt. Un autre membre rejoignit le groupe. Il s’agit de Yussuf Simon, un chiite noir étudiant en sciences politiques. Il demeura silencieux devant mon étonnement, habitué qu’il est certainement au contraste d’être un noir parmi les blancs, un musulman entre les chrétiens et un chiite parmi les sunnites.
“Ma surprise s’accentua lorsque le muezzin annonça la prière (iqamat as-Salât) avant de faire l’appel, et étant donné que Bilal, premier muezzin de l’islam à Médine fut noir, j’étais très embarrassé qu’il faille corriger son successeur à San Francisco, mais je ne pouvais pas garder le silence sur pareille contradiction. Je me mis alors en devoir de dire avec un maximum de délicatesse que lors de mon séjour à la Mecque, on commençait par l’appel à la prière avant de procéder à ‘iqâmat as-Salât (Présidence à la prière).
Leur réaction ne m’a point surpris, me paraissant plutôt toute naturelle lorsqu’ils m’invitèrent à présider l’imamat, étant “le plus savant” parmi les musulmans présents. Le fait d’être un Allemand blanc ou d’être pour la première fois parmi eux n’avait aucune sorte d’importance. C’est ainsi que je me suis trouvé, de façon inattendue, face à la qibla(1) espérant, tout au moins, qu’elle fût dans la bonne direction. J’ai disposé le tout petit groupe en ligne droite et levé mes bras pour l’Allahu Akbar (Dieu est le plus Grand). Ceci pour dire que le savoir jouit d’un pouvoir avec lequel il faut compter. Un autre événement, survenu en décembre 1982, qui confirme d’ailleurs ce postulat concerne un garçon arabe de quinze ans qui a assuré l’imamat, à l’hôtel Sheraton de Médine, lors de la prière d’un groupe de vieillards pakistanais analphabètes.”
Parlant de la prière de vendredi, qui se compose généralement de deux prêches courts puis de deux prosternations, Hoffmann rappelle qu’il est indispensable d’aller à la mosquée. Le prédicateur clôt d’habitude son prêche en levant les mains vers le ciel pour adresser les prières à Dieu Tout Puissant.
“Je peux dire en me fondant sur ma longue expérience, assure Hoffmann, que ces prêches n’aboutissent pas à ce qu’ils sont destinés à accomplir pour la bonne raison qu’ils s’adressent davantage au cœur qu’à la raison. Ils ne font que répéter, plutôt qu’approfondir, ce que tous les croyants savent déjà. Le ton des prédicateurs en fournit la preuve : certains prêchent en criant, comme s’il s’agit de galvaniser des troupes allant au combat. Mais il faut reconnaître, d’autre part, qu’il n’est pas possible dans le monde arabe d’adopter de méthodes modernes de prédication. Pourquoi faut-il étayer les bases et les principes de la religion par des preuves et des affirmations rationnelles et compliquées, alors qu’il serait plus utile d’orienter pédagogiquement la foi qui règne dans le monde islamique ? (Il existe cependant quelques exceptions positives. En effet, à l’instar de certains Chrétiens à Munich qui se donnent la peine de parcourir des chemins plus lointains rien que pour écouter un prêcheur spécifique, il m’était arrivé pendant mon séjour à Rabat d’aller à la banlieue de Rabat pour écouter l’érudit imam de la Mosquée Lalla (Madame) Soukayna, dans le quartier de Riyad, prononcer le prêche du vendredi).
“Lorsque j’étais en fonction, je devais, conformément au protocole, accomplir les prières des fêtes du Fitr(2) et du Adha(3) en me tenant derrière des chefs d’Etat tels le président algérien Chadli Ben Jdid ou le feu souverain Hassan II, roi du Maroc. Cela se passait devant les caméras de télévision. A chacun de ces événements, je ressentais l’esprit démocratique que la prière islamique confère à de semblables circonstances. Car il y a une grande différence entre un roi agenouillé par terre montrant ses chaussettes et le président français entrant dans la cathédrale de Reims et se dirigeant vers le siège qui lui est réservé.
“La mémorisation des textes arabes qui se récitent pendant la prière, entrecoupés par des versets, tantôt courts, tantôt longs, du Coran revêt, pour certains, quelques difficultés autrement plus compliquées que les gestes rituels associés à la prière. Le fait de ne pouvoir mémoriser correctement ces textes m’a fait ressembler à un assistant de moine auquel le Latin fait défaut(5). Aussi avais-je décidé, à l’instar de tous les musulmans, d’apprendre la langue arabe suffisamment pour comprendre les règles grammaticales et les textes (connaissances qui m’ont beaucoup servi lorsque j’ai été nommé ambassadeur en Algérie). Il va sans dire que la première chose que j’ai apprise était sourate Al-Fatiha, la première du Coran. Cette sourate est la composante essentielle de chaque prosternation, puisqu’elle se lit au minimum dix-sept fois par jour. Après Al-Fatiha, j’ai appris la sourate 112, intitulé Al-Ikhlass (Le Dévouement) qui équivaut – de par son fond et selon le Prophète (PSL) – au tiers de l’ensemble du Coran, en dépit de la minceur de ses quatre versets “Dis : “Il est Allah, Unique. Allah, le Seul à être imploré pour ce que nous désirons. Il n’a jamais engendré, n’a pas été engendré non plus. Et nul n’est égal à Lui”.”
“Celle-ci est suivie par deux sourates d’adjuration, à savoir, Sourates Al-Falaq (l’Aube naissante, 113) et An-Nâs (Les Hommes, 114). D’autres sourates courtes sont également récitées, notamment Al-Fîl (L’Eléphant, 105), Quraïch, (106), al-Kafiroun (Les Mécréants, 109), an-Nasr (La Victoire, 110), de même que les versets 1 à 5 de la première sourate révélée, al-‘Alaq (L’Adhérence, 96) et qui dit : “Lis, au nom de ton Seigneur qui a créé, qui a créé l’homme d’une adhérence. Lis ! Ton Seigneur est le Très Noble, qui a enseigné par la plume [le calame], a enseigné à l’homme ce qu’il ne savait pas. “Ce n’est qu’après avoir acquis suffisamment de connaissances en langue arabe que je me suis appliqué à mémoriser des versets ou des segments plus longs tels le verset Al-Kursi (le Trône) (dans la sourate La Vache, 255), le verset 35 de An-Nour (La Lumière), ainsi que les segments relatifs aux noms qualificatifs du Seigneur dans la sourate Al-Hachr (L’Exode, 22-24).
“Quiconque analyse les textes de la prière débouche sur la conclusion que l’essentiel de la prière est d’invoquer Dieu. Ceci s’accorde avec les enseignements du Coran qui stipulent que le plus noble devoir de l’être humain est de parvenir, grâce à son intelligence, à connaître Dieu et à Lui rendre Grâce. Ce devoir exprime la quintessence du comportement des musulmans. Si vous vous enquerrez de l’état de quelqu’un, il ne vous répondra pas par “bien” ou “mal”, il vous répondra : “Grâce Lui soit rendue”.
“Après la prière, l’individu se met avec passion à exalter le nom de Dieu, utilisant soit un chapelet composé de 33 ou de 99 grains, soit avec les doigts, répétant “Que le Seigneur soit exalté” ou “Louanges à Dieu” ou “Grâce Lui soit rendue” ou “Dieu est le plus Grand” (Subhan Allah wa bi-Hamdih, Subhan Allah, Al-Hamdu Lillah et Allahu Akbar). Nous pouvons constater que, contrairement au christianisme, les modes de rendre grâce et de prière sont variés en Islam.
“Si rendre grâce revêt un caractère essentiel, la négliger équivaut à une diminution de la foi, car le Seigneur dit : “Je suis tout proche : Je réponds à l’appel de celui qui Me prie” Al-Baqara (La Vache, 186).
“Par ailleurs, il n’y a pas d’archétype à l’acte de grâce, pas plus qu’il n’est délimité par le lieu ou le temps. Il n’est pas nécessaire non plus qu’il soit en arabe, car il s’agit, dans le meilleur des circonstances, d’un rappel de l’existence de Dieu, et c’est ce rappel constant qui caractérise le soufisme islamique. Anna Maria Schimmel a réuni, dans ce contexte, un grand nombre de ces sublimes rappels et actes de grâce islamiques.
“C’est au soufisme islamique que revient le mérite de la cohésion et la conservation des rappels et des paroles de grâce, tant par le fond que par la forme, à commencer par le soufi andalou Ibn al-Arbî, aux 12° et 13° siècles, jusqu’à Frithgof Shoen à l’époque contemporaine. Sans se désengager des formes imposées, les vrais soufis musulmans se sont évertués à les rationaliser. Shoen précise que “Le musulman – en particulier celui qui applique la sunna (5) dans ses plus menus détails – vit dans un réseau de symboles…” Ainsi, celui qui porte ces préceptes dans son âme, refuse de donner un cachet routinier à sa prière. Que la prière soit accomplie dans une mosquée chiite de Hambourg, une mosquée construite de briques et de branches de palmier dans l’oasis de Figuig à l’Est du Maroc, ou encore la Mosquée des Omeyyades à Damas, avec ses merveilleuses mosaïques, la prière demeure la même. Elle a été apprise avec un même enseignant (ce qui est indubitable). Et avec cette uniformité dans la forme qui procure le calme et la quiétude nécessaires à une concentration sans faille…
“La prière en islam comporte, outre son caractère spirituel, une dimension matérielle tangible ainsi qu’une dimension politique potentielle. L’individu requiert beaucoup de temps pour apprendre à s’asseoir, sur un sol dur, détendu sur ses pieds et sans souffrir de contractions musculaires, sachant que cette position sera facilitée davantage si l’on portait des chaussettes. Mais s’asseoir par terre, des heures durant, sans bouger comme le font nos frères en Orient n’est plus en notre pouvoir, surtout lorsqu’on atteint un certain âge.
“Il est certain, par ailleurs, que la prière en islam est utile dans le traitement des tensions psychiques contemporaines, que l’on peut facilement identifier et en connaître les causes. Sur le plan quantitatif et musculaire, l’individu contemporain ne travaille pas plus que dans le passé. C’est l’inverse qui est vrai. Mais ce qui est nouveau, c’est la vélocité avec laquelle s’accomplissent les événements et les affaires, qui recourent au télex, au fax, au courrier électronique, à l’Internet et à la poste rapide, éléments qui épuisent l’individu. Les gens sont constamment sur le qui-vive, craignant de perdre le contrôle sur les choses ou de laisser échapper les occasions ; ils redoutent l’échec, s’adonnent davantage à la boisson et à la cigarette, absorbent les sédatifs et les drogues… ce qui ne fait qu’empirer les choses. Pour certains hauts fonctionnaires, les coûts des soins médicaux liés à la thrombose des artères ont atteint un tel niveau qu’ils ont été pratiquement contraints de prendre des congés obligatoires. Dans ce contexte, les programmes de formation des directeurs des affaires du personnel abordent la bio alimentation, la méditation transcendantale et la nécessité de découvrir par soi-même les cérémonies japonaises du thé, comme moyen de surmonter le stress et l’anxiété.
“Là où je veux en venir, c’est que la prière islamique permet de réaliser tout cela, et plus encore. Non seulement elle aide le croyant à maintenir la continuité de la réflexion et de la relaxation, mais à se détacher intérieurement de la fascination de l’argent, des honneurs et du prestige. Mais alors que l’Américain se trouve confronté à deux alternatives, soit combattre soit fuir par le biais du suicide, le musulman choisit une troisième alternative, celle de se fondre avec les choses, c’est-à-dire de se remettre à Dieu. Ainsi, grâce à la prière islamique, le vrai musulman ne peut éprouver le stress et encore moins devenir une source de stress et de préoccupation pour les autres.
“Je sais exactement de quoi je parle. Il m’a été donné, en effet, de constater tous les facteurs qui provoquent la pression, le stress et l’anxiété dans les fonctions que j’ai occupées, d’abord en tant que directeur de la Division de l’OTAN et de la Défense, au ministère allemand des Affaires étrangères entre 1979 et 1983, puis de Directeur des Renseignements pour les menaces d’agression à l’OTAN, à Bruxelles, entre 1983 et 1987.
“Depuis 1980, je ne portais plus dans mes bagages lors de mes voyages de travail qu’un tapis de prière et une boussole (fabriquée à Taiwan) pour déterminer la position de la Qibla, bien qu’il soit évident qu’une serviette propre aurait fait l’affaire, puisque Dieu, qui n’est ni occidental ni oriental, nous dit : “Où que vous vous tourniez, la face d’Allah est là” (Al-Baqara, 115). J’organisais mes journées progressivement en fonction des heures de prière plutôt que de l’horloge, cause de soucis et de tensions. En effet, lorsque l’individu fixe rendez-vous avec les musulmans, il ne dit pas “à trois heures et quart”, mais une heure indéterminée comme, par exemple, “après la prière de midi” ou “après la prière du maghreb”.
“L’on peut dire, en définitive, que dans la prière j’ai trouvé la quiétude et l’indépendance intérieure qui libère le musulman des différentes tensions, car elle a le pouvoir d’arracher l’être humain d’un monde où le temps se mesure en monnaie, et où la monnaie est la seule chose qui compte.
“Lorsqu’en 1992 les médias ont mené une campagne calomnieuse et de dénigrement contre moi en raison de ma foi, certains de mes compatriotes n’ont pas compris mon indifférence (croyant probablement qu’il s’agit d’une sorte d’orgueil ou de fierté). Ils auraient pu trouver une explication à mon attitude dans le cinquième verset de sourate Al-Fatiha (Prologue) : “C’est Toi que nous adorons, et c’est Toi dont nous implorons secours”.
“Entre-temps la prière est devenue pour moi un facteur essentiel dans l’organisation de ma vie, d’autant que je ne pouvais plus vivre dans un pays où la voix sublime du muezzin appelant à la prière ne peut s’entendre, comme à Fès ou à Istanbul.
“J’ai souvent constaté que la prière qui évite les questions cruciales peut devenir, en raison même de leur nature, un facteur politique. Avant que l’action du Front islamique algérien ne sorte de la clandestinité en 1988, ses partisans évitaient les mosquées relevant du gouvernement (comme le fait bon nombre de Turcs travaillant en Allemagne à l’égard des institutions relevant du ministère turc des Religions). Ainsi leur islamisme parallèle se reflète dans la prière, également parallèle. A Blida, par exemple, nous avons accompli la prière dans une maison toute proche d’une mosquée, plutôt que de prier dans cette dernière. Un autre phénomène concerne les groupes de jeunes qui viennent peu avant ou après la prière du midi pour prier dans un coin comme des groupes autonomes, derrière un imam particulier. J’ai fait cette remarque en septembre 1994 à Istanbul dans la mosquée Senane Pacha, dans le quartier Barbarossa.
“Les résultats politiques étaient impressionnants lorsque le gouvernement algérien du Front de Libération national a voulu démontrer, dans l’une des mosquées proches du port d’Alger, le jour de Aïd al-Adha, en 1988, le niveau de piété et de dévotion qu’il a atteint. Le peuple entier a crié sa colère (ou son mépris) lorsqu’il a constaté, sur les écrans de la télévision, que les membres dirigeants du parti unique socialiste ignorent manifestement comment faire la prière. A peine quelques mois après, le Front de Libération national subissait une défaite cuisante, dans un soulèvement populaire, alors que le Front islamique du Salut acquerrait son statut de parti légitime.
Notes:
1- (NDT) Point vers lequel les musulmans se tournent pour prier (direction de la Mecque).
2- (NDT) Fête religieuse clôturant le mois du Ramadan.
3- (NDT) Fête religieuse commémorant le sacrifice d’Abraham.
4- (NDT) Dans les églises catholiques, le latin est toujours en usage au cours de la messe.
5- (NDT) La tradition rapportant les paroles, actes et préceptes du Prophète Mohamed (PSL).