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La gnose théorique, expression de la vision gnostique du monde
La gnose théorique élabore et expose la vision du monde particulière qui est celle des gnostiques par opposition aux autres Weltanschauungs (1) (conception du monde d’un point de vue métaphysique). En d’autres termes, la gnose théorique expose les visions des grands maîtres spirituels qui fixent par écrit ou par enseignement oral le savoir qu’ils ont acquis ou que leurs maîtres leur ont transmis et qui à la longue finissent par définir les principes fondateurs de la gnose universelle. Cet enseignement est ensuite mis à la portée des autres qui en prendront connaissance par l’étude. La vision du monde de la gnose n’est en réalité qu’une explicitation de la vision du monde de la religion, c’est-à-dire des enseignements révélés aux prophètes par Dieu. Par exemple, toute l’œuvre d’Ibn ‘Arabî (2) est un immense commentaire du Coran. Il en va de même du Mathnawî (3) de Mowlânâ Jalâl ad-Dîn Rûmî, dont on a aussi dit que c’était le commentaire du Coran en langue persane.
Pour les grands gnostiques de l’islam, le Coran est la preuve que l’on peut parvenir aux plus hauts sommets de la perfection par la religion. Parmi ces grands hommes, on peut citer Ibn ‘Arabî, l’auteur des Fusûs al-Hikam (4) et des Futûhât al- Makkiyya (5) , ou encore Ibn Sînâ qui a apporté des preuves de cela dans son célèbre Kitâb al-Ishârât wal-tanbîhât (6) , traduit en français par Livre des directives et des remarques, en particulier dans les chapitres 8 et 9 consacrés à l’examen de la prophétie. Il y a fait preuve de subtilité et d’une capacité exceptionnelle pour parler de la question gnostique. On peut aussi mentionner tous les maîtres issus de l’école d’Ibn ‘Arabî, comme Afzaluddîn Turka Isfahînî (7) , auteur du Qawâ’îd al-Tawhîd (8) , son petit-fils Sâ’in al-Dîn Ibn Turka (9) , auteur d’un commentaire du précédent, intitulé Tamhîd al-Qawâ’id (10) , ainsi que Shams al-Dîn Fanarî (11) , savant de l’époque Ottomane, auteur du Misbâh al-Uns (12) , et enfin Haydar Amolî (13) et Mollâ Sadrâ Shîrâzî. Tous ces auteurs sont encore lus et enseignés dans beaucoup d’universités du monde, y compris en Occident.
La gnose pratique est le domaine où se vérifie la gnose théorique
C’est la gnose pratique qui alimente et entretient la gnose théorique. Et celle-ci explicite aussi les questions de celle-là. Un point qui mérite attention à ce sujet est le fait que la gnose islamique se fonde sur la Révélation coranique. On ne perd jamais de vue que la racine, la source première de la gnose en islam est le Coran et les traditions de l’Envoyé de Dieu et de sa Famille. Par exemple, l’idée de l’unité de l’être (wahdat al-wujûd) signifie que le principe un et authentique, est l’origine de l’ensemble des créatures et des déterminations et embrasse tous les actes. Cette idée se fonde sur le verset : « Il est le Premier, Il est le Dernier, l’Apparent, la Caché » (Sourate Al-Hadîd (Le fer) ; 57 : 3). Et aussi sur le verset : « Ne sont-ils pas dans le doute quant à la rencontre de leur Seigneur ? Est-ce que Son regard n’embrasse pas toute chose ? » (Sourate Fussilat (Les versets détaillés) ; 41 : 54), puis le verset : « Et Il est avec vous où que vous soyez » (Sourate Al-Hadîd (Le fer) ; 57 :4) et aussi : « Et Nous sommes plus près de lui que sa veine jugulaire » (Sourate Qâf ; 50 :16).
Dans la tradition et notamment dans le Nahj al-Balâgha (La voie de l’éloquence) rassemblant les paroles de l’Imâm ‘Ali (as), on peut aussi citer :
« Il pénètre les choses sans s’y mélanger, et Il en sort, sans s’en éloigner »
« Je n’ai jamais vu de chose sans que j’y vois Dieu, avant elle, après elle, avec elle et en elle. »
La représentation de la descente (création ou procession de l’être) et de la remontée (retour à Dieu), par deux arcs est appuyée par les versets : « Nous sommes à Dieu et sûrement c’est vers Lui que nous retournons ». (Sourate Al-Baqara (La vache) ; 2 : 156) et : « et que tout aboutit, en vérité, vers ton Seigneur » (Sourate Al-Najm (L’étoile) ; 53 : 42) ; ou : « C’est vers ton Seigneur qu’est le Retour final » (Sourate Al-‘Alaq (L’adhérence) ; 96 : 8)
Il n’est donc pas nécessaire de s’appuyer sur des sources extérieures à l’islam, comme les cultures, les écoles ou mêmes les autres religions, comme la philosophie de Plotin, la gnose bouddhiste ou la gnose chrétienne… pour trouver les sources de la gnose islamique.
Cela n’empêche pas que lorsque l’on expose la doctrine islamique, on puisse faire appel à des termes spécifiques empruntés puisque le but est de faire connaitre aux autres la conception musulmane. Les grands doctrinaires des autres cultures ont forgé un vocabulaire que chacun peut reprendre à son compte quand c’est pour des raisons de commodité d’expression.
Cela n’implique donc pas toujours nécessairement une « influence ». Comparaison n’est pas raison. La spiritualité musulmane a sa propre force dont témoigne le niveau sublime qu’elle atteint et qui lui est reconnu par les grands savants.
Chaque fois que les hommes ont considéré l’être avec philosophie, ils ont tenu les mêmes propos, et sont parvenus à des conclusions semblables parfois similaires. Sans parler de ce que beaucoup de similarités ne sont que des traces de l’enseignement des prophètes qui ont prêché parmi ces différentes nations.
Aspects communs entre la gnose islamique et le bouddhisme zen
Certains de ces aspects consistent en ces points :
- L’Eveil
L’éveil dans la spiritualité islamique est le moment décisif de la résolution et de l’attention de se réveiller du sommeil de l’indifférence. C’est le moment où le voyageur vers Dieu prend la route. Cette étape ressemble à l’illumination soudaine (satori) dans le bouddhisme zen. Comme nous l’avions expliqué dans la première partie, l’aspirant (sâlik), dans la position assise en tailleur, s’adonne à l’introspection (zazen) en méditant sur un kōan (une question particulière) qui lui a été assigné par son maître et poursuit l’illumination soudaine (satori).
2)- L’introspection
Pour la spiritualité musulmane, l’introspection signifie que le voyageur doit surveiller ses comportements et ses états avec une vigilance spéciale afin de poursuivre sa route et ne pas se laisser séduire par des promesses illusoires.
L’introspection spirituelle n’a pas le même sens et ne porte pas sur le même thème. Elle dépend des étapes à traverser et du degré atteint par l’aspirant. Par exemple, à ses débuts, il devra apprendre à abandonner « ce qui ne le regarde pas » et se débarrasser définitivement de ce défaut. Il devra maîtriser ses comportements et se conformer totalement aux ordres de Dieu, en paroles et en actes, pour obtenir l’agrément divin. La vigilance portera parfois sur l’étape, parfois sur lui-même et parfois sur un sujet supérieur comme les Noms et attributs divins.
Dans le zen, il existe une sorte d’introspection particulière que l’on peut considérer comme spécifique au zen. Le zazen signifie la pratique de l’introspection dans la position assise en tailleur. Dans cette position, l’aspirant s’efforce de parvenir à porter un regard sur son soi intérieur et à apprendre à voyager dans l’espace intérieur de sa personnalité.
La différence principale entre ces introspections consiste dans la limite illicite et leur continuité. Dans le bouddhisme zen, le zazen (position) est une forme particulière qui n’a pas de continuité, limitée dans le temps. Dans l’islam, l’introspection prend un sens dans sa relation avec la notion de « présence » ou de « perception de la présence » et par conséquent, elle est continue. Celui qui voyage vers Dieu est constamment dans l’introspection.
Il est vrai qu’il existe une étape dans laquelle l’aspirant « abandonne » l’introspection parce que la spiritualité islamique se définit aussi comme l’abandon des habitudes. Il s’agit seulement de ne pas agir par habitude. L’aspirant doit aussi se rappeler que c’est Dieu qui agit à travers lui : par conséquent, il devra confier à Dieu sa propre introspection.
Dans ce cas, les deux spiritualités trouvent une autre convergence.
3)- Le besoin d’un maître
La pensée spiritualiste de l’islam considère comme nécessaire et indispensable pour l’aspirant d’avoir un maître accompli et compétent, afin de mener son voyage sans risque. Le maître connaît les capacités et l’aptitude du murîd (14) pour la voie spirituelle avant de décider de le prendre en charge pour le guider.
Dans le zen, aussi, les disciples sont dans des couvents sous la surveillance d’un maître spécial qui leur fait appliquer le zazen et l’introspection.
Il les oriente au moyen de courts aphorismes ou récits allusifs servant de matière à penser et aussi en leur confiant des exercices de kōan (question particulière), tout cela dans le but de les faire parvenir à l’illumination (satori).
Comme nous l’avons évoqué dans la première partie, une grande partie de la littérature du zen est constituée par les échanges courts en maîtres et disciples. Ces mondos ont pour objectif de susciter une sorte de conscience et de perception soudaine par l’activité mentale du questionneur, ou de mesurer le degré de la perspicacité de ce dernier. Pour ce motif, si ces questions sont traitées, leur effet se dissipera. La personne devra sans tarder comprendre l’allusion. L’intérêt spécifique de ces mondos est de servir de modèles.
Le sujet du kōan
Le sujet du kōan est l’introspection. Il se compose des éléments suivants :
- Certains mondos anciens qui sont connus.
- Des séquences de soutra bouddhistes.
- Des extraits précis des échanges avec les maîtres.
- De brefs récits exprimant des aspects différents des maîtres.
Le kōan paraît en premier lieu comme dénué de sens et irrationnel. Mais les maîtres du zen sont convaincus que chaque kōan présente une structure à double dimension : d’un côté, il présente une signification philosophique simple, connaissable par la raison. Et d’un autre côté, il est quelque chose d’irrationnel qui vise à donner au disciple un choc psychique.
A titre d’exemples, voici deux kōan:
- Un jour, Chao chu tomba au sol sur la neige. Il poussa un cri : Au secours ! Aidez-moi à me relever ! Aidez-moi à me relever ! Un moine vint et s’allongea à ses côtés. Chao chu se leva et partit.
- L’eau s’infiltrait du toit de la maison dans la chambre. Le maître chargea deux moines d’apporter des ustensiles pour recueillir l’eau. L’un apporta un seau et l’autre un panier. Il blâma beaucoup le premier et encouragea le second.
Zazen (l’introspection en position assise) est la voie à pratiquer pour résoudre un kōan. La pratique du zen est d’abord une pratique du zazen. Les disciples consacrent des heures entières du jour à cet exercice et accordent beaucoup à la manière de s’asseoir et de respirer.
Notes:
1-Terme des philosophes allemands désignant la vision globale du monde.
2-Ibn ‘Arabî, Muhyî al-Dîn, surnommé le Sheikh al-Akbar, le plus grand maître. Né à Murcie, en Andalousie almohade en 1165 et mort à Damas ayyoubide, en 1240. Célèbre mystique considéré comme le plus grand maître de la spiritualité musulmane. Il est l’auteur de centaines d’ouvrages. Les plus célèbres sont le monumental Futâhât al-Makkiyya (Les révélations de La Mecque) et le Fusûs al-Hikam (les chatons de la sagesse). Son œuvre nourrit la pensée musulmane depuis plus de 7 siècles. Elle est de plus en plus étudiée en Occident, exerçant une influence puissante sur les esprits.
3-Œuvre en distiques de Jalâl ad-Dîn Rûmi basée sur des récits d’initiation mystique. Elle contient près de 30 000 vers.
4-Ouvrage d’Ibn ‘Arabî, sans doute le plus lu et le plus commenté (plus de 300 commentaires écrits). Il y expose une typologie de la prophétie fondée sur la dialectique des Noms divins.
5-Célèbre ouvrage d’Ibn ‘Arabî, qui est son opus magnum, exposant en détail son enseignement. Les Futuhât contiennent 560 chapitres et fournissent les clefs du Fusûs al-Hikam.
6-Livre des Directives et Remarques, livre d’Avicenne, traduit en français par A-M. Goichon. Avicenne y expose entre autre, sa philosophie prophétique. En un seul volume, cet ouvrage est moins long que le Kitâb al-Shifâ, traité philosophique principal d’Avicenne.
7-Un des membres d’une grande famille originaire du Khojand en Transoxiane qui a eu le surnom de Turka (mort au début du XIVe siècle). Il aurait traduit en persan le Kitâb al-Milal wal-Nihal (le livre des religions et des sectes) de Shahrestâni.
8-Ouvrage composé par Abou Hamed Turka Isfahânî, (mort vers 698 de l’Hégire / 1300), transfuge de l’avicennisme qui a rejoint la doctrine de l’unité de l’être, wahdat al-wujûd. Probablement disciple de Qûnawî, disciple direct d’Ibn ‘Arabî.
9-Arrière petit-neveu de Turka Isfahânî. Commentateur du Qawâ’îd al-Tawhîd, de son arrière oncle.
10-Tamhîd al-Qawâ’id, titre du commentaire écrit par Sâ’in al-Dîn Esfahânî sur l’ouvrage de son grande oncle Abû Hâmed Turka Isfahânî, intitulé Qawâ’id al-Tawhîd.
11-L’un des derniers grands commentateurs akbariens de la Turquie Ottomane. Il vécut et mourut à Bursa, ancienne capitale avant la prise de Constantinople. Son ouvrage le plus connu est le Misbâh al-Uns, commentaire du Miftâh al-Wujûd de Qûnawî. Mort en 1435.
12-Commentaire du Miftâh al-wujûd, traité de Qûnawî par Shams al-Dîn Fanarî, ouvrage enseigné encore dans les universités religieuses en Iran.
13-Bahâ al-Dîn bin Ali bin Seyyed al-‘Ubaydî al-Husaynî al-Amolî, (né en 720/1220 – mort après 794/1393) doit sa célébrité dans le monde occidental à Henry Corbin qui, à raison, a vu en lui un des grands penseurs iraniens de la période post-mongole. Il est l’auteur d’un commentaire chiite du Fusûs al-Hikam, intitulé Nass al-Nusûs, édité et publié en partie par H. Corbin. Il est aussi l’auteur du Jâmeh’ al-Asrâr wa Manba’ al-Anwâr. Il a considéré que le soufisme était le vrai chiisme. Il n’a pas été très lu dans l’Iran chiite et c’est H. Corbin qui a fait connaître ses œuvres dont les manuscrits sont rares en Iran.
14-(en persan : morid مرید) signifie: celui qui aspire. Dans le vocabulaire soufi musulman, ce mot désigne le disciple en quête de la Vérité.