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Les principes de l’éducation dans l’enfance musulmane
Avant-Propos
Louange à Allah, Seigneur des Mondes ; et que la paix et le salut soient sur le Maître des envoyés Mohammad (s) ainsi que sur sa sainte famille.
Allah le Très-Haut dit : « Lis ! Ton Seigneur est le très Noble, qui a enseigné par la plume, a enseigné à l’homme ce qu’il ne savait pas. » (Coran, 96 : 3-5)
L’Imam Ali ibn Abî Tâlib rapporte du Prophète (saw) : « Le cœur du jeune enfant est semblable à une terre vierge, tout ce qu’on y dépose y pénètre facilement. »
La question de l’éducation est sans conteste l’une des questions les plus importantes au point de vue des connaissances théorique de même qu’au niveau pratique.
L’homme naît semblable à une page blanche, neutre, capable de prendre toutes les formes qu’on lui donnera, à se développer et à acquérir des comportements, conduites multiples et des expériences diverses.
L’étape de l’enfance est à cet égard déterminante dans la formation de la personnalité de l’être humain et elle constitue la trame sur laquelle se tissera la vie future de toute personne.
C’est sur la base de cette constatation que l’Islam attache une grande importance à l’éducation de l’enfant et notamment à la construction d’une personnalité saine et équilibrée, dénuée de tout travers et de tout complexe ; et qu’il vise à mettre l’homme à l’abri de toutes maladies psychologiques et de toutes mauvaises habitudes.
Sur la base de ces principes et de ces valeurs islamiques, construire la personnalité de l’enfant en Islam revient en réalité à construire la société dans son entier ; c’est en d’autres termes un travail de préparation à la construction d’une vie, de lois, d’un Etat et même d’une civilisation qui soient fondés sur une assise saine pour la réalisation d’un seul but : le bonheur humain.
Sachant donc que la réalisation de cet objectif dépend de l’éducation, il est de notre devoir de consacrer la plus grande partie de nos efforts et de notre temps à éduquer nos enfants et à les préparer à devenir des êtres humains équilibrés, aptes à vivre dans le cadre de lois basées sur la justice et le bien de toutes la collectivité.
Chapitre premier : Définition de l’éducation
Du point de vue linguistique arabe, les lexicographes et les rédacteurs de dictionnaires ont défini l’éducation comme suit : A la base du mot éducation (tarbiyya) se trouve le mot (rabb) qui signifie : créer une chose étape par étape jusqu’à se réalisation complète. On dira par exemple : rabbahu, rabbâhu, rabbayhu… soit : « Il a éduqué l’enfant : il en est le tuteur et le responsable : c’est lui qui doit le nourrir, l’aider à grandir et lui donner une bonne éducation. »
Si donc, l’éducation se définit ainsi, en Islam, l’éducation sera l’opération consistant à construire l’être humain et à l’orienter en vue de former sa personnalité selon les méthodes et les buts que l’Islam a posé pour la vie de l’humain.
L’éducation est donc en fin de compte le fait de construire et de former une personnalité, opération qui vise à amener cette personnalité à la perfection et à lui faire acquérir ses traits de caractères distinctifs.
Chapitre deux : Importance de l’éducation en Islam
Il a été scientifiquement établi qu’à la naissance, l’humain est semblable à une page blanche, vierge, dénuée de toute orientation ou constitution particulière ; il est simplement porteur de potentialités telles que la capacité d’apprendre, de s’informer et de former sa personnalité suivant une ligne de conduite déterminée.
C’est pourquoi le Coran enseigne à l’humain cette vérité (à savoir qu’il est une page blanche) et lui rappelle les bienfaits de la science, de l’enseignement et de la guidance (hidayya) :
« Allah vous a fait sortir du ventre de votre mère, dénués de tout savoir. Il vous a conféré l’ouïe, la vue et le cœur (l’intelligence) afin que vous soyez reconnaissants. » (Coran)
L’Imam Ali a traduit cette vérité pratique en ces termes : « Le cœur du jeune enfant est semblable à une terre vierge qui fait fructifier tout ce qu’on y sème. »
Le savant Allamé al Hilli a décrit les étapes du processus de connaissance chez l’enfant comme suit : « Allah le Très-Haut a créé l’âme humaine par sa nature innée, dénuée de tout savoir quelqu’il soit – par nécessité – de même qu’Il la créé apte à recevoir tout savoir également par nécessité ; cela est particulièrement remarquable chez l’enfant.
Allah le Très-Haut a ensuite créé pour l’humain des moyens qui lui permettent d’appréhender le monde environnant, qui sont les facultés des sens : l’ouïe, l’odorat, la vue, le toucher et le goût. Ainsi, l’enfant est capable dès la naissance d’entrer en contact avec le monde environnant par l’intermédiaire du toucher, de l’odorat, de l’ouïe et du goût ; puis dans un deuxième temps, il devient capable de reconnaître à la vue ses parents et autrui.
Peu à peu ses capacités s’accroissent et il parvient, par ses facultés sensorielles – qui lui permettent d’appréhender le particulier – de passer à une appréhension plus globale de la réalité ; il commence ainsi à utiliser des concepts comme ceux de différence et de ressemblance ; il parvient à comprendre par la raison des éléments nécessaires et plus généraux en s’aidant de ses perceptions sensorielles ; ensuite, au fur et à mesure que sa faculté de raisonner s’affine, il parvient à maîtriser la faculté de la parole et peut comprendre au moyen des connaissances indispensables, les sciences acquises.
Il ressort donc de tout ce que nous avons dit que les sciences acquises ne sont en réalité qu’une branche des connaissances nécessaires et globales et que ces dernières ne sont que les dérivés des perceptions sensorielles. »
Cette explication du sens du verset cité nous permet de délimiter la théorie de la connaissance en Islam et de comprendre le processus de formation de la connaissance chez l’humain depuis ses débuts en le rattachant aux normes coraniques.
C’est à partir de cette compréhension et sur ces bases scientifiques (qui permettent à l’humain de recevoir le savoir et de constituer sa propre personnalité) que se construit la théorie de l’éducation en Islam. Cela nous permet également de saisir toute l’importance de la responsabilité qui échoit aux parents et le rôle qu’ils ont à jouer vis-à-vis de leurs enfants en vue de les préparer à devenir des adultes et de leur prodiguer une éducation tant affective, qu’intellectuelle.
L’éducation, dans un premier temps (de 0 à 7 ans) consiste à donner à l’enfant des habitudes et à lui apprendre à acquérir des comportements quotidiens ; c’est par le biais de ses sens que l’enfant va recevoir de ses parents cet apprentissage et c’est également par eux qu’il va acquérir une morale, se constituer des habitudes et apprendre comment se comporter dans ses rapports avec autrui.
C’est dire toute l’importance que revêt durant cette période le comportement des parents, l’atmosphère familiale et l’environnement culturel et social dans lequel baigne l’enfant.
Tous ces facteurs influent grandement sur la personnalité de l’enfant et sur ses orientations futures.
L’éducation, dans un deuxième temps, sera ce qu’on appelle couramment « l’enseignement ».
L’enfant, à cette étape (entre 6 et 18 ans), va apprendre à développer ses facultés intellectuelles et à utiliser son raisonnement ; pour se faire, on va le mettre en contact avec différents types de connaissances et lui enseigner des matières multiples qui lui permettront de penser correctement et de se constituer un capital culturel de base.
Cela contribuera également à former l’identité culturelle de sa personnalité.
C’est pour cette raison que le saint hadith suivant énonce : « Tout enfant naît doté d’une nature innée ; ce sont ses parents qui le font dévier de cette nature en en faisant un chrétien ou un juif. »
L’Islam attache une grande importance à l’éducation ; c’est elle en effet, qui va contribuer à former des personnalités saines, dénuées de complexes et de comportements inadéquats. C’est elle qui sera responsable du bonheur ou du malheur de l’humain dans cette vie et dans l’autre. C’est elle enfin qui va jouer un rôle déterminant dans la société : sur son avancement culturel, ses progrès scientifiques et sa prospérité économique.
C’est pourquoi l’Islam a tant insisté sur l’importance à attacher à l’enfant. Ses parents doivent s’en occuper au mieux, surtout durant les premières années de sa vie.
L’éducation, comme nous y avons fait allusion précédemment, a une grande influence au sein de la société : sur la garantie de l’ordre public, sur l’environnement naturel, sur la production économique, sur la stabilité politique, sur le progrès scientifique et le niveau de civisme.
Ainsi, à titre d’exemple, l’enfant qui a été habitué à la paresse et à l’indolence ne pourra devenir un homme productif capable d’organiser et de gérer son temps, d’accroître son rendement et d’utiliser au mieux ses capacités ; un tel enfant ne pourra jamais espérer acquérir de hautes qualifications dans les domaines scientifiques et expérimental.
Il est pratiquement impossible à l’enfant ayant grandi dans l’indocilité et le vagabondage, suite aux mauvais traitements de ses parents ou à l’influence négative de l’école ou des autres instances gouvernementales, de devenir un être humain engagé, respectueux des lois et de la stabilité politique et sociale de sa ville ou de son pays.
L’enfant qui aura vécu dans un milieu dépravé ou bien qui aura reçu une éducation avilissante gardera toute sa vie les traces de cette éducation au sein de ses comportements et deviendra peut-être même un individu criminel, torturé dans cette vie et malheureux dans l’autre.
Les statistiques établies par les chercheurs ont démontré l’influence incontestable de l’éducation sur l’individu et la société, et elles corroborent tout à fait les observations faites par l’Islam et sont en parfait accord avec ses conclusions scientifiques.
Nous en citons quelques-unes :
1) La grande majorité des études entreprises tant en Occident que dans le monde arabe affirment que c’est au cours des premières années de la vie que la personnalité de l’enfant se forme et que s’épanouissent ses dispositions individuelles.
Ainsi, l’enfant, suite à des contacts avec le milieu dans lequel il vit, acquiert des réactions et des réflexes face aux diverses influences extérieures qui l’entourent ; si bien que la moitié de ses réactions vont dès cette période s’installer et se stabiliser jusqu’à la fin de sa vie.
Il est bien évident que les valeurs comportementales positives ou négatives qui imprègnent le milieu familial jouent un rôle actif et déterminant dans la manière dont l’enfant va entretenir ses rapports avec autrui.
2) Les études menées dans le domaine de l’éducation établissent que l’image de soi que se constitue l’enfant depuis sa plus tendre enfance influe le regard qu’il portera sur lui-même durant toute sa vie. Ainsi, s’il se constitue une image négative vis-à-vis de ses capacités et sa place au sein de la famille – par exemple s’il ressent qu’il n’a aucun rôle défini à jouer dans le cadre familial ou qu’il n’attire pas l’attention de personne ou bien encore que son existence ou son inexistence est équivalente pour les autres – il va se forger une image négative de lui-même au sein de la société. Il va donc en conséquence affirmer son existence en utilisant des moyens compensatoires, comme la violence, la hargne ou en ayant des comportements inadéquats.
Par contre, si au sein de la famille, il reçoit une attention vigilante, de l’affection et si on le considère et le respecte comme une personne à part entière, et enfin si on l’encourage, il va se constituer une image positive de lui-même. Et par la même occasion, ses potentialités et ses qualités vont s’épanouir. Il va alors ressentir en lui-même une énergie qui va rayonner sur toute sa personnalité et qui va lui permettre de jouer un rôle actif au sein de la famille, puis à l’école, et plus tard dans sa vie professionnelle et sociale.
3) Le rapport établi par Calman a fourni des conclusions sur ces recherches en matière d’éducation, confirmées par les recherches du conseil central consultatif pour l’éducation en Angleterre. Elles sont les suivantes :
– 50% de l’intelligence des adolescents âgés de 17 ans se forme entre la période de formation du fœtus et l’âge de 4 ans ;
– 50% des acquisitions scientifiques chez les jeunes de 18 ans s’effectuent dès l’âge de 9 ans.
– On peut dès l’âge de 2 ans pronostiquer 33% des capacités mentales, comportementales et affectives de l’enfant ; ce pourcentage atteint 50% à l’âge de 5 ans.
4) Une autre étude complémentaire de celle-ci ajoute que la manière de parler avec les enfants au sein de la famille influe dans une grande mesure sur leur compréhension des notions de récompense et de châtiment et les différentes valeurs comportementales ; elle influe également sur les concepts qu’ils utilisent sur leur morale et sur la façon dont ils voient leur propre rôle.
C’est pour toutes ces raisons que l’Islam a entouré l’enfant d’une grande vigilance et que dès les premiers jours suivants sa naissance, il est recommandé par exemple de prononcer la profession de foi dans les oreilles du nouveau-né, de l’habituer à glorifier Allah, à accomplir la prière pour se rappeler Ses bienfaits et à Le remercier.
Tout ceci afin que sa personnalité se forme et se constitue religieusement, qu’il parvienne à une certaine stabilité du point de vue comportemental et que se constituent les bases intellectuelles de sa raison et de son âme.
On rapporte de l’Imam Sadiq (s) cette parole du Prophète (s) : « Que celui d’entre vous qui a un nouveau-né fasse l’appel à la prière dans son oreille droite et l’Iqama dans son oreille gauche ; cela constituera pour lui une protection contre Satan le réprouvé. »
Avoir un enfant bon et pieux jouissant d’une personnalité équilibrée et ayant des comportements convenables est considéré par l’Islam comme l’un des acquis les plus importants de l’humain dans cette vie, comme il est rapporté du Prophète (S) :
« Un des éléments du bonheur de l’humain est d’avoir un enfant bon et pieux. »
« L’héritage que le croyant laisse pour Allah après sa mort est un enfant bon et pieux qui implore le pardon de Dieu pour lui. »
L’Islam s’est préoccupé des jeunes générations et a encouragé à aimer les enfants.
La preuve de l’étendue de la responsabilité des parents en matière d’éducation et l’importance qu’attache l’Islam à cette dernière est exprimée dans cette parole d’Allah le Très-Haut : « Ô vous qui croyez ! Préservez vos personnes et vos familles d’un feu dont le combustible sera fait d’humains et de pierres. » (Coran, 66, 6).
Dans ce verset de portée générale, on peut trouver entre autres, l’affirmation de la responsabilité des parents envers leurs enfants, de même qu’y est établie leur responsabilité envers eux-mêmes. Ce sont les parents qui sont responsables de l’éducation de l’enfant, qui doivent lui inculquer la doctrine de l’unicité, les valeurs morales, l’attitude à avoir envers Allah – qu’Il soit glorifié – afin de le protéger de l’égarement, du malheur et de la déviation.