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Comment fixer une fin à cette Voie
Alors qu’à son commencement elle compte plus de cent mille étapes ?
(Divân Hâfez, 94 : 7 -9) (1)
Naturellement, la majorité des maîtres considèrent que la voie commence avec l’éveil et s’achève par l’union, même si on rappelle que « les chemins menant à Dieu sont au nombre des créatures », une parole attribuée au Prophète (s) (voir ‘Ilm al-yaqîn, volume 1, page 14). Dans son livre Awsâf al-ashrâf, Khâjeh Nasîr al-Dîn Tûsî met la foi, al-îmân, au début de la voie et l’unification, tawhîd, à la fin du voyage mystique. Avant lui, Khâjeh Abdollâh Ansârî(2) avait estimé à cent le nombre des étapes. Ce sont les suivantes :
- Eveil (yaqza),
- Repentance (towba),
- Examen de conscience (mohâsiba),
- Contrition (inâba),
- Méditation (tafakkor),
- Rappel répété (tazakkor),
- Se prémunir (i’tisâm),
- Fuite vers Dieu (farâr),
- Exercice (riyâzat),
- Audition spirituelle (samâ’),
- Tristesse (hozn),
- Peur (khowf),
- Compassion, pitié (ishfâq),
- Sujétion (khoshû‘),
- Humilité (ikhbât),
- Ascèse (zohd),
- Scrupule (wara‘),
- Dévouement (tabattol),
- Espérance (rajâ’),
- Désir (raghbat),
- Observance (ri‘âyat),
- Introspection (morâqibat),
- Immunité (hormat),
- Pureté (ikhlâs),
- Raffinement (tahdhîb),
- Droiture (istiqâmat),
- Confiance en Dieu (tawakkul),
- Remise confiante en Dieu (tafwîz),
- Confiance (thiqa),
- Soumission (taslîm),
- Patience (sabr),
- Satisfaction (ridâ’),
- Remerciement (shokr),
- Pudeur (hayâ’),
- Sincérité (sidq),
- Altruisme, (ithâr),
- Caractère (kholq),
- Modestie (tawâdo‘),
- Chevalerie spirituelle (fotowwat),
- Joie (inbisât),
- Intention (qasd),
- Résolution (‘azm),
- Volonté (irâdat),
- Courtoisie (adab),
- Certitude (yaqîn),
- Familiarité (uns),
- Rappel (zhekr),
- Pauvreté (faqr),
- Richesse (ghinâ’),
- Station du désiré (maqâm al-morâd),
- Bienfaisance (ihsân),
- Science (‘ilm),
- Sagesse (hikmat),
- Perspicacité (basîrat),
- Discernement (firâsat),
- Glorification (ta‘zîm),
- Inspiration (ilhâm),
- Paix de l’esprit (sakîna),
- Tranquillité (toma’nîna),
- Ambition spirituelle (himmat),
- Amour (mahabbat),
- Jalousie (ghayrat),
- Nostalgie (showq),
- Inquiétude (qeleq),
- Soif (‘atash),
- Extase (wajd),
- Etonnement (dahshat),
- Amour éperdu (hayamân),
- Eclair (barq),
- Goût (dhowq),
- Regard (lahz),
- Instant (waqt),
- Pureté (safâ’),
- Joie (sorûr),
- Secret (sirr),
- Respiration (nafs),
- Exil (ghorbat),
- Noyade (gharq),
- Invisibilité (gheyba),
- Disponibilité (tamakkon),
- Dévoilement (mokâshifa),
- Contemplation (moshâhida),
- Examen (mu‘âyina),
- Vie (hayât),
- Contraction (qabz),
- Expansion (bast),
- Ivresse (sokr),
- Réveil (sahw),
- Jonction, (ittisâl),
- Séparation (infisâl),
- Connaissance (ma‘rifat),
- Extinction (fanâ’),
- Subsistance (baqâ),
- Réalisation (tahqîq),
- Confusion (talbîs),
- Existence (wujûd),
- Dépouillement (tajrîd),
- Esseulement (tafrîd),
- Synthèse (jam‘),
- Union (towhîd).
Nasîr al-Dîn Tûsî commente successivement les points de la foi (îmân), la fermeté (thobât), l’intention (niyât), la sincérité (sedq), la contrition (inâbat) et le caractère (kholq), et il considère ces six qualités comme des préliminaires et des fondements de la voie mystique et non pas la voie elle-même.
Les différentes méthodes des maîtres de la Voie mystique
On dit que chacun des maîtres de la voie, ulémas et docteurs de la foi, qui se sont engagés dans la voie et se sont laissé guider par les enseignements du Coran et de la Sunna (à l’exclusion de certains soufis partisans d’écoles syncrétistes et non-islamiques), chacun de ceux-là possède une méthode propre qu’il prône après l’avoir suivie lui-même. Cela veut dire que chacun d’entre eux a emprunté un chemin passant par des étapes et des « demeures » spirituelles.
Ainsi dans Resâleh-ye Seyr o sulûk, ouvrage du grand gnostique, juriste et érudit irakien qui fut surnommé Bahr al-‘Ulûm(3) , l’océan de savoirs, il est fait mention de quatre « demeures » nécessaires pour franchir la voie qui mène à Dieu, et parvenir à Sa proximité. Ces quatre demeures sont :
- La soumission à Dieu (islâm)
- La foi (îmân)
- La migration (hijrat)
- Le combat dans la Voie de Dieu (jihâd)
Pour chacun des mondes que constituent ces quatre piliers, il distingue trois étapes, ce qui fait un total de douze étapes, après la traversée desquelles « l’itinérant vers Dieu » entre dans le monde de la pureté (kholûs). Ces douze étapes sont les suivantes :
La première demeure : l’islam mineur (islâm-e asghar), qui signifie la prononciation des deux témoignages(4) , et la confirmation en sincérité de chacun des deux dans l’apparence par la conformation aux obligations religieuses.
La deuxième demeure : la foi mineure, (îmân-e asghar) qui est l’expression de la confirmation de la foi par la sincérité du cœur, et la conviction profonde de la vérité de tous les enseignements de l’islam.
La troisième demeure : l’islam majeur (islâm-e akbar) qui consiste en la soumission face à l’ensemble des vérités de l’islam, de ses commandements et de ses interdits.
La quatrième demeure : la foi majeure (îmân-e akbar), qui est incarnée par l’esprit et le sens de l’islam majeur qui évolue de l’étape de l’obéissance à celle de la nostalgie, de la satisfaction, et du désir.
La cinquième demeure : l’émigration mineure (hijrat-e asghar), qui consiste à émigrer d’une terre infidèle à une terre d’islam, comme l’hégire des musulmans de La Mecque à Médine aux premiers temps de l’islam.
La sixième demeure : la grande émigration (hijrat-e akbar), c’est le fait de s’écarter et de prendre ses distances à l’égard des gens qui désobéissent, qui commettent les péchés, ou de cesser de fréquenter les personnes viles, injustes et impures.
La septième demeure : le djihâd majeur (jihâd-e akbar), qui consiste dans la lutte contre l’armée satanique, et sa répression en prenant aide et appui dans l’armée du Miséricordieux, qui est l’armée de l’Intelligence (‘aql).
La huitième demeure : la demeure de la victoire, du triomphe contre la soldatesque de Satan, et la libération de son hégémonie, entraînant la sortie du monde de l’ignorance et de la nature.
La neuvième demeure : celle de l’islam grandiose, qui consiste dans la domination et l’écrasement de l’armée des passions, des fausses espérances ou des ambitions illusoires. Car après la victoire et le triomphe, les agents éveilleurs externes l’emportent sur les agents déviants internes. C’est là que le cœur devient le centre des lumières divines et des effusions seigneuriales.
La dixième demeure : celle de la foi grandiose, est lieu de la contemplation de son propre néant et de sa propre extinction devant Dieu. C’est l’étape de l’entrée dans le monde de « Entre donc parmi Mes servants et entre dans Mon paradis… » (5) (Sourate Al-Fajr (L’aube) ; 89 : 27 – 30). C’est à ce moment que se manifeste la réalité de la servitude et de la dépendance envers Dieu.
La onzième demeure : l’émigration grandiose, qui consiste à émigrer de son être propre, à le jeter dans l’oubli, à voyager vers le monde de l’Être absolu, et à s’orienter pleinement vers l’Essence Pure de Dieu qui est mentionnée dans « et entre dans Mon paradis ! »
La douzième demeure : Le combat dans la Voie de la Vérité grandiose, qui intervient après avoir émigré de son propre être dont on a découvert l’inanité, et qui consiste à demander l’intercession de l’Essence Pure de Dieu afin que tous les effets et traces de l’égotisme, de l’amour de soi, soient effacés et évacués hors du cœur, anéantis, afin de pouvoir enfin pénétrer dans le royaume de l’unité absolue.
Après avoir parcouru ces mondes de 12 étapes, il pénètre dans le monde de la sincérité et de la loyauté, et devient l’illustration du verset : « Mais ils sont vivants auprès de leur Seigneur, nourris et pourvus… » (Sourate Âl-‘Imrân (La famille de ‘Imrân) ; 3 : 169 -170) (6)
Comment effectuer le voyage mystique selon cette méthode
Dans l’Epître sur le voyage spirituel (Resâleh-ye seyr o solûk) de Bahr al-‘Ulûm, après avoir mentionné les mondes et les étapes évoquées dans la troisième partie de cet article, l’auteur s’attache à montrer comment effectuer la traversée de cette voie périlleuse et glorieuse à la fois, et énonce vingt-cinq commandements pour parvenir à ces objectifs :
Le voyageur vers Dieu qui s’engage dans la voie de la proximité du Seigneur pour en atteindre les différents mondes, après avoir été initié aux principes de la religion par des maîtres qualifiés et être devenu parfaitement familier des statuts d’application (forû’) de la loi religieuse islamique, fait son baluchon pour le voyage et s’engage sur la voie en direction de son objectif, en se conformant aux vingt-cinq recommandations ci-dessous :
Première règle : Abandon des règles de courtoisie, de savoir-vivre et des habitudes qui sont susceptibles d’empêcher l’homme de suivre la Voie et de le noyer dans les impuretés.
Deuxième règle : Une résolution ferme de suivre la Voie, ne redoutant rien, ne laissant aucune hésitation s’insinuer dans son cœur avec le soutien de la grâce divine.
Troisième règle : Bonté et tolérance indulgente. Cela consiste à ne pas s’imposer trop de charges pour éviter le dégoût et le découragement, et perdre du temps dans sa progression sur la Voie.
Quatrième règle : Celle de la loyauté. Elle consiste à demeurer fidèle à la parole donnée quand on s’est repenti.
Cinquième règle : Fermeté et constance. Dans ce sens qu’il respecte les engagements qu’il a pris et ce en les accomplissant sous la forme d’une habitude durable, afin qu’il n’y ait pas besoin de rebrousser chemin.
Sixième règle : La vigilance. Elle consiste à surveiller ses actes et ses paroles dans toutes les conditions pour éviter de commettre des erreurs irréparables.
Septième règle : Examen de conscience (mohâsebeh), conformément à ce qui est dit dans le hadith : « N’est pas des nôtres, celui qui ne demande pas de compte à sa conscience chaque jour », afin de se blâmer et de se corriger.
Huitième règle : S’en prendre à soi-même, s’incriminer. Cela consiste à s’en vouloir chaque fois que l’on commet une faute, à reconnaître sa culpabilité et se punir en s’imposant une règle de vie plus difficile.
Neuvième règle : La hâte compétitive. Conformément à l’ordre coranique : « Hâtez-vous vers un pardon de votre Seigneur… » (Sourate Âl-‘Imrân (La famille de ‘Imrân) ; 3 : 133). Il faut se hâter sur la voie de Dieu avant que Satan ne puisse faire ses suggestions.
Dixième règle : La volonté. Cela consiste à purifier son cœur de sorte qu’aucun voile n’y subsiste, et devenir tout amour envers le Prophète (s) et ses héritiers infaillibles (as).
Onzième règle : La courtoisie, cela veut dire qu’à l’égard de la Présence sacrée de Dieu et de Son Noble Envoyé (as), ainsi que des Imams infaillibles de sa Famille (as), il devra toujours respecter la clause de courtoisie, s’abstenir de prononcer la moindre parole de protestation pour honorer ces êtres de grandeur et éviter de formuler sa requête éventuelle à l’impératif.
Douzième règle : L’intention qui consiste dans une résolution sincère dans cette voie, et de vouer tous les mouvements et actes à Dieu, exalté soit-Il.
Treizième règle : Le silence. Garder sa langue de paroles excessives et s’en tenir au strict minimum de mots nécessaires.
Quatorzième règle : La faim et la frugalité. Ce sont des conditions indispensables pour parcourir cette Voie, mais pas au point de risquer la faiblesse et l’incapacité.
Quinzième règle : La réclusion, vivre dans la retraite et en solitaire. Elle consiste à se tenir à l’écart des gens de la désobéissance, de ceux qui cherchent la vie mondaine, et ceux dont les intelligences sont trop faibles. C’est aussi être loin du tintamarre et du tohu-bohu de la vie, en se concentrant sur les prières et les actes de dévotion.
Seizième règle : La veille, en particulier vers la dernière partie de la nuit. Conformément à ce qui était recommandé par les versets coraniques et les traditions prophétiques, de façon récurrente.
Dix-septième règle : Etat permanent de pureté ; ce qui veut dire renouveler les ablutions rituelles chaque fois que nécessaire de manière à garder constamment l’état de pureté, car cela confère une luminosité particulière au for intérieur de l’homme.
Dix-huitième règle : La supplication adressée à la majesté divine, au Seigneur de la gloire, afin de faire montre de soumission devant le Seigneur.
Dix-neuvième règle : S’abstenir de suivre et se méfier à l’égard des désirs de l’âme concupiscente (même de ceux qui sont permis par la Loi) autant que faire se peut.
Vingtième règle : Garder le secret. Cela fait partie des conditions les plus importantes sur lesquelles les maîtres de cette discipline ont beaucoup insisté. Cela consiste à garder secrets les engagements et enseignements reçus dans la Voie, à ne jamais les divulguer au non-initié, et ne jamais faire montre de la moindre ostentation à ce sujet. Et s’il parvient à obtenir un dévoilement de l’un des mondes invisibles, il devra le garder confidentiel et ne pas le divulguer, afin de ne pas tomber dans la prétention, la fatuité et le narcissisme.
Vingt et unième règle : Avoir un éducateur et un maître, en plus du maître général, duquel il recevra les orientations pour organiser ses occupations relatives à la Voie spirituelle et du Maître particulier qui est incarné par l’Envoyé de Dieu (s) et les Imams (as) infaillibles de sa Famille.
Le voyageur mystique doit garder à l’esprit que cette étape est très subtile et très sensible. Tant qu’il n’aura pas enquêté sur la personne et qu’il ne prendra pas connaissance de sa compétence « technique » et religieuse, il ne devra faire confiance à personne pour recevoir d’elle les orientations. Car il arrive que des Satans revêtus du vêtement du maître, et des loups déguisés en bergers entrent en scène, et détournent l’aspirant de la Voie droite. Même l’accomplissement d’actes miraculeux et d’autres prodiges extraordinaires, l’accès à des secrets relatifs au futur et autres, ne sauraient procurer l’assurance que celui qui les accomplit possède un rang spirituel plus avancé dans la Voie de Dieu. Parce que ce sont des charismes qui interviennent dans l’étape du dévoilement spirituel, et de là à parvenir à la jonction et à la perfection, il y a encore bien du chemin.
Vingt-deuxième règle : Le werd, c’est-à-dire la répétition à voix basse ou dans le cœur de formules recommandées par le maître, que l’on appelle le zekr ou dhikr, mot arabe qui veut dire remémoration de Dieu. Le but en est de se rappeler les qualités divines, pour s’en familiariser. Cette répétition a pour effet à court ou moyen terme de motiver davantage l’aspirant qui voit la Voie s’élargir et s’aplanir devant lui. Par la suite, cela l’aidera à traverser les cols difficilement franchissables qui se dressent sur la Voie qui mène à Dieu.
Vingt-troisième règle : Rejet des pensées négatives, qui consiste à maîtriser par le cœur l’activité mentale désordonnée et effrénée et à la régir, en obtenant une concentration de l’esprit de façon à ce qu’aucune image ou idée ne traverse l’esprit sans sa permission et sa décision. En d’autres termes, il ne doit pas laisser son esprit se laisser envahir par des idées dispersées. C’est là une tâche qui n’est pas facile à remplir.
Vingt-quatrième règle : La méditation, ce qui veut dire que l’aspirant doit s’efforcer d’acquérir une connaissance et une conscience par une pensée profonde et une méditation valide. Toute sa méditation doit concerner les noms et qualités de Dieu, ainsi que Ses épiphanies et Ses actes.
Vingt-cinquième règle : Le zekr ou dhikr selon la prononciation turco-iranienne ; mot de la langue arabe signifiant rappeler, se souvenir. Il consiste dans l’orientation du cœur vers l’Essence du Seigneur, et se distingue du werd qui se prononce par la langue. En d’autres termes, le but en est que toute son attention soit portée sur la beauté du Seigneur, et qu’elle se détourne de tout ce qui n’est pas Lui.
Dans l’épître intitulée Leqâ’Allah (7) , La rencontre avec Dieu, œuvre du grand savant Mostafawî(8) , il est présenté un autre exposé de ce cheminement vers Dieu. Cette épître est longue, bien documentée et s’appuie largement sur les versets coraniques et les traditions. L’auteur y évoque d’abord les versets faisant allusion à la rencontre avec Dieu, et après avoir expliqué que cette rencontre s’opère en mode spirituel, il poursuit son commentaire en disant que pour arriver au terme du voyage, il faut que l’homme brise toutes les limites du monde matériel ainsi que celles du temps, de l’espace et même les limites essentielles qui définissent tous les étants, pour se plonger jusqu’à la « noyade » ou « l’immersion » et l’annihilation, dans le monde du Lâhût (le monde divin), pour obtenir enfin la rencontre avec Dieu, et être interpelé par :
« Ô toi, âme apaisée, retourne vers ton Seigneur, satisfaite et agréée ; entre donc parmi Mes serviteurs, et entre dans Mon Paradis ». (Sourate Al-Fajr (L’aube) ; 89 : 27-30)
L’auteur énumère alors cinq étapes qui à ses yeux résument le voyage menant à cette demeure finale sans pareille.
Première étape : Parachèvement et consolidation des racines de la foi et attention particulière aux fondements de la religion.
Deuxième étape : Repentance, conversion, retour aux bonnes œuvres, renoncement aux péchés et renouvellement de l’engagement à se conformer aux obligations légales.
Troisième étape : Se rendre prêt pour purifier l’âme de ses vices et défauts et l’embellir par les caractères vertueux.
Quatrième étape : Eliminer l’égoïsme et réaliser l’annihilation de soi au regard de la grandeur de Dieu.
Dans cette étape où l’attachement à la vie matérielle est dépassé et où les liens qui nous relient aux biens terrestres, à nos enfants et aux plaisirs matériels et imaginaires de ce monde, se dénouent et sont remplacés par des liens spirituels, il ne subsiste plus qu’une seule chose : l’attachement à son moi, l’amour de soi, attachement enraciné et solide qui devient presque invisible et indécelable à force d’évidence. Mais il reste une chose, et c’est celle qui fut le but même de l’itinérant sur la Voie, à savoir la rencontre avec son Seigneur. En fait, tout ce qu’il a accompli jusqu’ici a été accompli pour lui-même. Autrement dit, il souhaitait conquérir les stations élevées et faire partie des intimes de la Cour divine, sensible à la considération que lui procurent ses perfections spirituelles. Ainsi, jusqu’ici, il a été question de lui-même, et non de son but initial. Preuve en est qu’à chaque fois qu’il est parvenu à une telle station, il a été envahi par la joie et l’allégresse, mais si ces stations survenaient à un autre que lui, il n’aurait pas exprimé la même joie, pour le moins. C’est là qu’il aurait dû dépasser son moi et son intérêt pour sa personne. Ce qui devrait attirer son attention et ce qu’il devrait souhaiter ardemment, c’est l’épiphanie, la manifestation de Dieu, et non ce qui est conditionné par son moi. Pour plus de clarté, le « moi » doit s’effacer, et ce voile qui est le plus grand obstacle et le plus grand barrage sur la Voie de Dieu, avant de toucher au but qui est la jonction dans la rencontre avec Dieu, ce « moi », disons-nous, doit être écarté du chemin. Pour éliminer cet obstacle, il existe quelques moyens :
– 1. Orienter son cœur vers Dieu et affirmer l’unité de l’Essence, des attributs et des actes divins, et par cette voie comprendre qu’à part Lui, tout n’est que vanité, rien.
-2. La méditation et la démonstration pour combattre l’égotisme ainsi que le culte du moi et lever le voile de l’âme, dans ce sens qu’il puisse voir que Dieu est un être illimité, dans l’infini antérieur (azal) et dans l’infini postérieur (abad), et un Vivant absolu. Et en même temps se découvrir comme un être limité à tout point de vue, infiniment faible, indigent et dont l’être dépend du début à la fin de la volonté de Dieu. Il ne peut subsister sans Dieu fut-ce le temps d’un clin d’œil.
-3. Se traiter par les contraires, cela consiste à chaque fois que cela se présente, au lieu de son « moi », se concentrer sur Dieu et les amis de Dieu (saints), et se mettre ainsi dans la Présence constante de Dieu.
Cinquième étape : Dans cette étape, le voyageur est devenu un être humain de forme angélique et il pénètre le monde de la Contrainte divine (Jabarût).
Le sens de l’entrée dans le monde du Jabarût est qu’après avoir obtenu la pureté parfaite, l’innocence et l’effacement dans la lumière divine, le voyageur mystique acquiert une puissance et une autorité, et il s’engage alors d’un pied ferme et en toute compétence pour accomplir sa mission divine d’orienter les créatures, d’ordonner le bien et défendre le mal.
Autrement dit, il s’est débarrassé dans une très grande mesure des soucis de son égo, et possède pleinement la science inhérente à tous les domaines, fonctions, statuts légaux et les convenances de la Loi et de la Voie spirituelle. Il est désormais capable de diagnostiquer le mal et de prescrire le remède, exactement comme le ferait un médecin surdoué ayant la pleine maîtrise de son art. Il reçoit aussi le don de citer pour chaque cas précis, des versets coraniques et des traditions du Prophète (s) et des Imams (as) avec un à-propos remarquable.
Conclusion et classement des voies spirituelles
Les principes communs qui se dégagent de l’enseignement des maitres de la Voie spirituelle, (de ceux qui se conforment à la Loi, à ce qu’ordonnent l’islam et les Gens de la Maison (Ahl al-Beyt) (9) et non pas certains syncrétistes de tendance soufie) sont les suivants :
- Le but originel et principal, la rencontre avec de Dieu et la contemplation de l’Essence Pure du Seigneur par l’œil du cœur, une présence dépouillée et sacrée devant Sa majesté.
- Pour atteindre ce but, le premier pas consiste dans l’acte de repentance à l’égard de tous les péchés, à se laver de tous les vices moraux, et à se parer des vertus morales.
- Dans cette voie, il faut sans cesse garder à l’esprit le respect des quatre règles de l’engagement (moshâreteh), de l’introspection (morâqebeh), de l’examen de conscience (mohâsebeh) et de la punition (mo’âqebeh). Cela veut dire que chaque matin le pèlerin sur la voie mystique fera l’engagement de ne pas s’approcher du péché ni de tout ce qui contrarierait l’agrément de Dieu. Toute la journée, il contrôlera les mouvements de son âme rétive. Et le soir, au moment de se coucher, il demandera compte à son âme et s’il y trouve la moindre entorse, il se punira en se privant de certains plaisirs et régals.
- La lutte contre les passions de l’âme qui sont le plus grand obstacle dans la Voie est le devoir le plus impérieux qui soit.
- Prêter attention aux zekrs et aux awrâds (10) qui ont été transmis par la Loi sacrée, tel le zekr de : « lâ hawla wa lâ quwwata illâ billâh » (il n’est de mouvement ni de force qu’en Dieu), et le zekr: «lâ ilâha illâ anta sobhânaka innî kuntu min al-zâlimîn » (« Il n’est de dieu que Toi, Gloire à Ta transcendance. J’étais parmi les iniques (11) ») le zekr « Allâh », le zekr « Yâ Ḥayyu » (Ô Vivant !), « Yâ Qayyûm » (Ô Subsistant !), et d’autres semblables, qui sont à même d’apporter l’énergie et la force pour cheminer sûrement sur la Voie.
- Orientation du cœur sur la réalité de l’unité de l’Essence divine active, de Ses attributs, de Ses actes, ainsi que l’immersion dans l’océan des qualités et de la beauté de Dieu. Tout cela constitue un autre viatique inestimable sur cette Voie grandiose et pleine de promesses.
- La destruction de la plus grande idole qui consiste en l’amour de soi, le narcissisme, ou l’égotisme, est la condition sine qua non pour être admis dans la Proximité divine.
- Certains considèrent comme indispensable de tirer profit de la présence d’un maître éducateur sous le regard duquel on progresse et qui, tel un médecin, sera là pour le soigner chaque fois que nécessaire.
D’autres n’insistent pas sur la nécessité d’un maître, sans le désapprouver. Même si malheureusement le recours à un maître conduit parfois certaines personnes à tomber dans le piège de dangereux Satans qui se présentent comme des anges, qui les font plonger dans la perte de leur piété passée, et leur font perdre leur foi, leur vie dans ce monde et dans l’autre.
D’autres considèrent que la fonction de guider les hommes et de leur enseigner comment progresser sur la voie revient aux saints et aux prophètes. A leurs yeux, « … ordonner le convenable et proscrire le blâmable (12) … » (amr be ma’rûf wa nahy az monkar) est la dernière étape. D’autres ont tout simplement ignoré les étapes et laissé le « voyageur » à lui-même.
Notes:
1-Khatîb Rahbar, Khalîl, Divân Ghazaliyât Hâfez, Éditions Safî Alî Shâh, 15e édition, Téhéran, 1374.
2- Ansârî Herawî, 1006-1089, grand maître mystique, connu pour son Manâzil al-Sâ’irîn, et aussi ses Monâjât où il s’adresse à Dieu, chef d’œuvre de littérature persane.
3- Bahr al-‘Ulûm ibn Murtada al-Tabâtabâ’î al-Burûjerdî al-Najafî, né à Najaf en 1155 de l’Hégire (1742) et mort en 1212 (1797). Ces différentes demeures sont également évoquées dans Resâleh-ye Lobb-e Lobâb dar Seyr o Solûk-e ûli al-albâb du regretté ‘Allâmah Sayyid Mohammad Hossein Tabâtabâ’î.
4- Profession de foi musulmane : 1) je témoigne qu’il n’est de dieu qu’Allah ; 2) que Mohammad est Son Envoyé.
5- (fa-dkhulî fî ‘ibâdî wa-dkhulî jannatî)
6- (bal ahyâ’un ‘inda Rabbihim yurzaqûn)
7- (en persan : رساله لقاء الله، علامه حسن مصطفوی) Resâleh Leqâ’Allah, paru en février 2010 au Centre d’éditions des œuvres d’Allâmeh Mostafawî à Téhéran.
8- ‘Allâmeh Mîrzâ Hassan Mostafawî (1918 – 2005) Chercheur et commentateur contemporain du Coran. Auteur de gloses en marge d’ouvrages usuels de jurisprudence.
9- L’expression Ahl al-Bayt, Gens de la Maison, signifie techniquement la Famille constituée par le Prophète (s), ‘Alî (as), son épouse Fatima (as) et leur deux enfants Hassan (as) et Hossein (as). Elle s’élargit aux Imams descendant de l’Imam Hossein. Ensemble, ils constituent les 14 Purs.
10- (pluriel de Werd)
11- Coran, sourate Al-Anbiyâ (Les prophètes) ; 21: 87.
12- Coran, sourate Âl ‘Imrân (La famille de ‘Imrân) ; 2: 110. Le verset apparaît dans une dizaine de cas dans le Coran.