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Les Sources de la Législation islamique (la Shari’ah) dans les deux Ecoles
L’attitude des deux Ecoles à l’égard du Saint Coran
l-Qur’ân: C’est la parole d’Allah descendue successivement sur le Sceau des prophètes (SAW), par opposition à la poésie et à la prose arabes.
Les savants citent d’autres noms pour le Coran qui ne sont en fait que des qualificatifs du Coran: le Livre, la Lumière, le Rappel …etc.
Dans l’Ecole des califes, on trouve un autre nom du Coran: “Al-Muçhaf“. Mais c’est un terme qui n’est cité ni dans le Saint Coran ni dans le noble hadith prophétique.
A ce propos, Az-Zarkashî et d’autres savants rapportent ceci:
«Quand Abû Bakr eut compilé le Coran, il dit: «donnez-lui un nom!». Certains dirent: Evangile mais ce nom ne fut pas aimé. D’autres dirent: le livre (avec connotation biblique). On ne l’a pas aimé non plus. Ibn Mas’ûd dit alors: «J’ai vu en Abyssinie un livre appelé Al-Muçhaf, prenez-le donc pour nom». (1)
Cela relève donc de la terminologie musulmane et non islamique.
Conformément à ces données, il convient de préciser que lorsque dans l’Ecole des califes on parle de Muçhaf, il s’agit bien du Sait Coran; mais dans l’Ecole d’Ahlul-Bayt il n’en est rien. Muçhaf veut seulement dire livre d’où l’appellation usitée: “Muçhaf de Fatima”, Çahifah Sajjâdiyyah (livre contenant les invocations de l’Imam As-Sajjâd, célèbre et publié).
Les traditions nous enseignent que le “Muçhaf de Fatima” contient des informations relatives à ceux qui commanderont la Communauté islamique et ne comporte pas de versets coraniques.
Pourtant des écrivains (tendancieux) voulurent exploiter cette appellation (“Muçhaf de Fatima”) pour pousser à des troubles ourdies contre l’Ecole d’Ahlul-Bayt sous prétexte qu’ils ont un autre Coran. Ils ont oublié que le terme Muçhaf signifie ici livre tout court comme les savants de l’Ecole des califes avaient appelé le livre de grammaire de Sibawayh: le livre.
La compilation du Sait Coran par le Messager (SAW) et ses Compagnons revêtait pour eux une grande importance
Le Messager d’Allah (SAW) avait l’habitude de réciter dès leur révélation les versets du Sait Coran et d’en expliquer les termes et le sens à l’ensemble des Musulmans qui assistaient à la récitation et en particulier à l’Imam ‘Ali (a. s.) qui avait reçu l’ordre de noter ce qu’il se faisait dicter par le Prophète (SAW). Après l’émigration (l’hégire), il incita les Musulmans à l’apprentissage de l’écriture pour noter le Sait Coran et pouvoir l’apprendre; ce qu’ils ont fait sans tarder et dans une saine émulation. Ils utilisaient ce qu’ils avaient sous la main, parchemins et autres pour écrire les sourates du Coran et les versets dont la place parmi les sourates était indiquée par le Prophète (SAW) comme Allah le lui en enseigna. Après sa mort, des dizaines de Compagnons avaient appris tout le Coran; d’autres l’avaient écrit dans son intégralité mais cela ne fut pas fait sous forme de livre proprement dit. Toutefois dès la mort du Prophète (SAW), l’Imam ‘Ali (a. s.) se hâta de compiler le Coran dans un seul livre. D’autres – comme ‘Abdillah b. Mas’ûd – avaient aussi une copie du Coran compilé. Mais le calife Abû Bakr ne s’est pas procuré ces copies et donna l’ordre à un groupe de Compagnons de compiler le Coran dans un livre qu’il plaça chez la mère des Croyants Hafsah. A l’époque de ‘Uthmân, comme les conquêtes se multipliaient et les Musulmans se dispersaient dans les pays, le calife donna l’ordre de faire de la copie originelle gardée chez Hafsah plusieurs copies qu’il envoya dans les provinces musulmanes. Les gens en firent alors des copies et, de génération en génération jusqu’à nos jours, les Musulmans se passaient la même copie ni augmentée d’un mot ni amputé d’un autre, quelle que soit l’Ecole à laquelle ils appartiennent: Sunnite, Shi’ite, Ash’arite, Mu’tazilite, Hanafite, Shafi’ite, Kharijite, Wahhabite …
Ce que certains livres de hadîths présentent comme étant une diminution ou amputation du Sait Coran, est resté tel quel dans ces livres et ne s’est pas traduit en un acte de “correction” ou plutôt d’altération de l’une des copies (la vulgate) du Sait Coran.
A titre d’exemple, citons, à ce sujet ce qu’avaient rapporté les six recueils de hadîths, les plus authentiques (dans l’Ecole des califes), à savoir: Al- Bukhârî, Muslim, Abû Dâûd, At-Tirmidhî, Ibn Mâjah et Ad-Dârimî (ou An-Nasâ’î):
On rapporte que ‘Umar (r. d.) dit sur la chaire (al- Minbar): «Allah a certes envoyé Muhammad avec la vérité, en tant que Prophète à qui IL révéla le Livre. L’un des versets qu’il contenait fut celui de la lapidation. Nous l’avons lu, compris et retenu. Le Messager d’Allah (SAW) a appliqué la lapidation et nous l’avons appliquée après lui. Je crains que sous le coup du temps, les gens l’oublient et qu’on dise: «On ne trouve pas le verset de la lapidation dans le livre d’Allah. Ainsi, quiconque le dit s’égarera par le fait de délaisser une obligation révélée par Allah. Dans Son Livre, le décret de la lapidation est d’application à l’encontre de l’homme et de la femme quand ils sont muhçan (mariés)». (2)
Le verset prétendu est rapporté par Ibn Majah à partir de ‘Umar, ainsi que par Mâlik dans Al- Muwatta’: «Lapidez absolument les deux adultes – l’homme et la femme – quand ils ont eu recours à la fornication». Dans le Sahîh d’al-Bukhârî, à la suite du récit rapporté par ‘Umar, (susmentionné), on trouve: «… Nous lisons aussi, ajouta ‘Umar, dans le Livrer d’Allah: «Ne tournez pas le dos (par aversion) à vos pères car c’est de l’incrédulité (l’ingratitude?) de votre part si vous le faites».
Les traditionnistes rapportent aussi le récit de la mère des croyants Aïsha selon laquelle il y avait dans le Coran: «Dix tétées bien sues» (empêchent le mariage) qu’on lisait dans le Coran jusqu’à la mort du Prophète (SAW). (3)
Dans le recueil d’Ibn Mâjah, la même Aïsha rapporte que «le verset de la lapidation et celui de l’allaitement de l’adulte dix fois étaient écrits dans un feuillet sous mon lit». Après la mort du Messager (SAW) et à cause de la préoccupation qu’elle avait entraînée, un animal domestique entra et mangea le feuillet.
Dans le Sahîh de Muslim, on trouve aussi le récit d’Abû Mûssâ Al-Ash’arîy.
«Celui-ci invita les qurrâ’ (les récitateurs) d’Al-Baçrah. Trois cents hommes ayant étudié le Coran entrèrent alors chez lui. Nous avions lu, leur dit-il, une sourate que nous trouvions aussi longue et dure que Barâ’ah – (l’Immunité, IX). Je l’ai oubliée. Toutefois j’en ai retenu ceci: «Si l’être humain avait deux vallées pleines d’argent, il chercherait à en avoir une troisième. Seule la terre remplit la poitrine (l’intérieur) de l’être humain». «Nous récitions aussi, ajouta-t-il, une sourate que nous trouvions semblable à l’une des Musabbihât (les glorificatrices) et que j’ai oubliée aussi. Néanmoins, j’en ai retenu ceci: Ô vous qui croyez! Pourquoi dites-vous ce que vous ne faites point? Cela sera autour de vos cous un témoignage dont vous serez responsables le jour de la Résurrection». (4)
Malgré l’existence de ce genre de hadîths dans les recueils de l’Ecole des califes, les partisans de cette Ecole ne furent pas accusés par ceux de l’Ecole d’Ahlul-Bayt d’avoir opéré des soustractions dans le Sait Coran ou des ajouts inventés.
En revanche, quand on trouve dans certains livres des partisans de l’Ecole d’Ahlul-Bayt des récits semblables, certains auteurs partisans de l’Ecole des califes n’hésitent pas à soulever une tempête contre leurs frères de l’autre Ecole, les accusant d’avoir altéré ou falsifié le Coran alors que, si dans l’Ecole des califes on considère certains recueils de hadîths comme authentiques (Al-Bukhârî et Muslim) (5), les partisans de l’Ecole d’Ahlul-Bayt n’accordent la qualité d’authentique qu’au Livre d’Allah.
Qu’on sache que le Coran qu’on a entre les mains aujourd’hui est bien celui qu’Allah a révélé au Sceau des prophètes, en parfait état à la fin de sa vie sur terre. Les Compagnons, après sa mort, l’ont réuni, compilé, copié et distribué des copies aux Musulmans. Le début de ce Coran est «Au Nom d’Allah le Clément le Miséricordieux + Al-Hamdu lillah Rabbil ‘Alamîne» et la fin est: «Minal-Jinnati wannâs». Sur ce point, il n’y a aucun désaccord. En aucun jour depuis le début jusqu’à notre époque, un Musulman n’a saisi une copie du Coran ajoutée ou diminuée. La divergence repose seulement sur l’explication qu’on donne au Coran et sur l’interprétation de ses versets ”mutashâbihat” qui paraissent ambigus, parce que cette interprétation est puisée des hadîths (sujets de discorde).
L’Attitude des deux Ecoles à l’égard de la Sunnah du Messager (SAW)
As-Sunnah et la Bid’ah (la Tradition et l’Invocation)
Ce sont deux termes islamiques dont la connaissance de l’un dépend de la connaissance de l’autre.
1)- As-Sunnah
Il s’agit dans la terminologie linguistique de la méthode de la conduite qu’elle soit louable ou répréhensible. Dans la terminologie shar’î ou islamique, il s’agit de ce que le Prophète (SAW) a prescrit ou défendu ou préconisé, par la parole ou par l’acte, non modifié par le Livre saint. (6)
Cela englobe aussi la confirmation tacite d’un acte accompli par un musulman sans que le Prophète (SAW) ne le lui défende. Son silence est compris comme une approbation sous-entendue. On dit le Livre et la Sunnah c’est à dire le Coran et le hadîth.
2)- Al-Bid’ah
Dans la langue al-Bid’ah signifie la question qu’on tranche en premier lieu; dans la terminologie l’acte dont l’auteur ne suit pas le Législateur Shar’î, dans ce qu’il dit ou fait. (7)
Les deux Ecoles concordent sur l’obligation de suivre la sunnah du Messager (SAW) comme l’une des sources de la Shari’ah islamique. Mais étant donné que la sunnah du Messager (SAW) sous sa forme de Sirah ou de hadîth ou de confirmation tacite, nous parvient par le moyen de la narration des récits rapportés à partir du Prophète (SAW), les deux Ecoles divergent quant à:
La légitimité (la fiabilité) de certains intermédiaires dans la transmission des traditions prophétiques.
L’autorisation d’écrire le hadîth du Messager d’Allah (SAW) durant le premier siècle de l’hégire.
Nous procédons à l’étude de ces deux questions, séparément.
A- L’attitude des deux Ecoles à l’égard des narrateurs des traditions prophétiques
Les partisans de l’Ecole d’Ahlul-Bayt (a. s.) cherchent, après l’époque du Prophète (SAW) les repères de leur religion auprès des Douze Imams (a. s.) tandis que les partisans de l’Ecole des califes s’inspirent indistinctement de tout un chacun des Compagnons du Messager d’Allah (SAW). Pour eux tous ceux-ci sont justes et équitables. En revanche les partisans de l’Ecole d’Ahlul-Bayt (a. s.) ne se réfèrent nullement à des compagnons tels que Talhah et ‘Abdillah b. Zubayr qui combattirent l’Imam ‘Ali “Le Jour du Chameau” ou Mu’âwiyah et ‘Amru b. al-‘As qui le combattirent à Çaffine ou Dhul-Khuwayçirah et ‘Abdullah b. Wahb qui le combattirent “Le Jour d’An-Nahrawân”.
Ils ne s’inspirent pas non plus des autres ennemis de ‘Ali (a. s.) qu’ils soient comptés parmi les Compagnons, les Tâbi’îne, les Tâbi’it-Tâbi’îne ou parmi les autres catégories des narrateurs. (8)
Dans l’autre camp, on trouve que l’imam des traditionnistes – Al-Bukhârî – ne rapporte aucun hadîth dans son Sahîh à partir de Ja’far b. Muhammad As-Çâdiq, le sixième Imam d’Ahlul-Bayt dont les partisans avaient rapporté des milliers de hadîths.
Al-Bukhârî, Abû Dâûd et An-Nasâ’î rapportèrent ainsi, dans leurs recueils, des récits à partir des hommes tels que ‘Umrân b. Hittân le Kharijite qui composa une poésie d’éloge en mémoire de l’assassin de l’Imam ‘Ali: “‘Abdur-Rahmân b. Muljam“:
Oh! Le coup du pieux!
Dont il ne vise que l’agrément d’Allah.
Quand je me souviens de lui
Je le considère comme ayant auprès d’Allah
Le plateau de la balance le plus rempli.
Quant à An-Nasâ’î, il rapporta dans son recueil des récits à partir de ‘Umar b. Sa’d, le meurtrier d’Al- Hussayn. Les biographes et les critiques des rapporteurs disent à son sujet: «véridique mais les gens le détestent parce qu’il était le prince des soldats qui ont tué Al-Hussayn b. Ali (a. s.)». Les partisans de l’Ecole d’Ahlul-Bayt, quant à eux, les maudissent.
C’est pour ces raisons que les pensées des deux Ecoles divergèrent au sujet des narrateurs de confiance dont on peut rapporter les hadîths du Messager d’Allah (SAW).
B- La position de chacune des deux Ecoles quant à la diffusion des Traditions prophétiques durant le siècle 1 de l’hégire
Cette question eut un grand impact sur la formation ultérieure des deux Ecoles. Tandis que les califes empêchaient l’écriture des traditions prophétiques, l’Ecole d’Ahlu-Bayt (a. s.) allait dans le sens opposé et voulait relever le défi par la diffusion des hadîths. Le combat commença très tôt, ouvert et franc depuis l’heure où le Messager (SAW), agonisant, dit: «Apportez-moi de quoi vous écrire un message susceptible de vous préserver de l’égarement». Les hommes présents dirent: «Le Messager d’Allah délire». (9)
Dans un autre récit rapporté à partir d’Ibn ‘Abbâs, Al-Bukhârî désigna l’auteur du propos précédent: «Lorsque le Prophète (SAW) allait mourir, que des hommes parmi eux ‘Umar b. al-Khattâb étaient présents dans sa chambre, le Messager (SAW) demanda alors: «Approchez-vous, je veux vous écrire un message qui vous protégera de l’égarement après moi». ‘Umar dit: «Le Messager d’Allah est trop souffrant et vous avez le Coran. Le Livre d’Allah nous suffit». Les compagnons présents se divisèrent en querelles. Les uns disaient «qu’il vous écrive son message qui vous évitera l’égarement». D’autres se rangèrent à l’avis de ‘Umar. Lorsque leurs voix s’élevèrent du fait de leur divergence, le Prophète dit: «Allez-vous-en! Auprès de moi, il ne convient pas de se disputer».
‘Umar lui-même rapporta la manière dont ils se sont disputés, et dit:
«Nous étions chez le Prophète, le voile (le rideau) nous séparant des femmes, quand il demanda de lui faire un lavage avec sept outres et de lui apporter un feuillet et un encrier afin qu’il nous écrive l’écrit qui nous préserverait de l’égarement. Les femmes dirent(10): «Donnez au Messager d’Allah ce dont il a besoin!». ‘Umar leur dit: «Taisez-vous, vous êtes ses compagnes, quand il est malade, vous pressez vos yeux et quand il se rétablit vous lui serrez le cou». Le Messager d’Allah (SAW) dit alors:
«Elles sont meilleures que vous ». (11)
Dans une autre version, c’était Zaynab, l’épouse du Prophète (SAW) qui dit: «N’entendez-vous pas que le Prophète vous lègue son testament?». Mais ils crièrent et il leur dit alors: «Allez-vous-en!». Quand ils sont sortis, le Prophète (SAW) mourut à la même place. (12)
De ces hadîths, on comprend que ces gens s’activaient dans ce domaine (l’empêchement d’écrire le hadîth) du vivant même du Prophète (SAW) et bien avant qu’il tombât malade. ‘Abdullah b. ‘Amru b. al- ‘As raconte: «J’écrivais tout ce que j’entendais de la bouche du Messager d’Allah (SAW) mais Quraïsh me le défendit sous prétexte qu’il était un homme qui pourrait parler dans un état de colère ou d’agrément. Je m’en suis alors abstenu. Quand je l’ai rapporté au Messager d’Allah, il me dit en montrant sa bouche du doigt: «Ecris, car, par Allah, seule la vérité en sort». (13)
Les Quraïshites ont donc dévoilé dans leur conversation avec ‘Abdullah la raison pour laquelle ils l’empêchèrent d’écrire le hadîth du Messager. Il s’agit de la crainte qu’ils ressentaient de voir se propager les hadiths concernant des gens dont il était content ou d’autres à l’égard desquels il était fâché.
C’est la même raison qui fut derrière l’empêchement du Messager (SAW) d’écrire, aux dernières heures de sa vie, son testament. Ils provoquaient la dispute pour l’en empêcher. Après sa mort, ils continuaient après avoir pris le pouvoir, d’empêcher l’écriture des hadîths pour la même raison.
C- Un siècle de “censure” prohibitive de L’écriture de la sunnah
1)- A l’époque d’Abû Bakr
Adh-Dhahabî rapporte que le calife Abû Bakr réunit les gens après la mort de leur Prophète et leur dit: «Certes, vous rapportez à partir du Messager d’Allah (SAW) des hadîths à propos desquels vous vous opposez. Les gens, après vous, se divisèrent encore plus. Ne rapportez donc rien à partir du Messager d’Allah! Si on vous demande – quoi que ce soit – dites: Voici le Livre d’Allah entre nous! Accomplissez ce qu’il considère comme licite et abstenez-vous de l’illicite». (14)
2)- A l’époque de ‘Umar
Ibn Sa’d rapporte ceci dans ses Tabaqât: «Quand les hadîths se sont propagés à l’époque de ‘Umar b. al- Khattâb, il pria les gens de les lui apporter. Une fois les écrits entre ses mains, il donna l’ordre de les brûler» (15)
L’Ecole des califes prohiba donc l’écriture et la compilation de la sunnah prophétique jusqu’au bout du premier siècle de l’hégire. Mais cela ne lui suffisait pas. Elle prohiba aussi la narration du hadîth.
Quradzah b. Ka’b rapporta ce récit:
Quand le calife ‘Umar nous envoya en Irak, il nous reconduisit jusqu’au Çurâr puis il dit:
-Savez-vous pourquoi je vous ai raccompagnés?»
– Pour nous tenir compagnie et nous rendre hommage, avons-nous répondu.
– Oui et une préoccupation avec! Vous allez en Irak, vous y rencontrez des gens qui s’occupent du Coran et le lisent d’une lecture qui rappelle le bourdonnement des abeilles. Ne les y écartez pas par les hadîths que vous rapportez à partir du Messager d’Allah et je suis votre associé!
Quradzah ajouta: «après cela, je n’ai rapporté aucun hadîth du Messager d’Allah (SAW)».
Dans une autre version: «quand Quradzah b. Ka’b fut arrivé (en Irak), on lui demanda de rapporter des hadîths, mais il répondit: «’Umar nous l’a défendu». (16)
Comme Quradzah b. Ka’b, d’autres Compagnons suivirent la politique des califes et s’empêchèrent de diffuser la tradition prophétique: Ad-Dârimî rapporte ceci (Sunan, titre: “Ceux qui craignent de donner l’avis religieux”, livre de la science 1/84-85). Ash-Shi’bî dit: «j’ai accompagné Ibn ‘Umar pendant un an sans l’avoir entendu rapporter un hadîth à partir du Messager (SAW)».
A son tour, Ash-Shi’bî b. Yazîd raconte: «J’ai accompagné Sa’d b. Abî Waqqâs jusqu’à Makkah puis jusqu’à Médine sans l’avoir entendu rapporter un hadîth à partir du Messager d’Allah (SAW)».
En revanche, il y eut parmi les Compagnons ceux qui, en opposition à la politique des califes, rapportèrent la sunnah du Messager (SAW) quitte à subir des épreuves:
Dans Kanzul-‘Ummâl, ‘Abdur-Rahmân b. ‘Awf dit:
«Bien avant sa mort, ‘Umar fit venir à Médine les Compagnons du Messager d’Allah (SAW), qui s’étaient dispersés dans tous les horizons. Il fit venir ‘Abdullah b. Hudhayfah, Abûd-Dardâ, Abû Dhar et ‘Uqbah b. ‘Amir et leur demanda:
– Quels sont ces hadîths que vous avez répandus dans les pays (les horizons)?
– Nous l’interdis-tu?, lui demandèrent-ils.
– Non, répondit-il. Mais restez ici près de moi. Par Allah, vous ne me quitterez pas, tant que je vis. Nous sommes plus savants (que les habitants des autres contrées musulmanes). Nous pouvons tantôt approuver ce que vous dites tantôt le récuser.
Ils restèrent alors près de lui jusqu’à sa mort». (17)
Adh-Dhahabî rapporte que ‘Umar emprisonna trois Compagnons pour propagation des hadîths prophétiques: Ibn Mas’ûd, Abû-Dardâ’ et Abû Mas’ûd al-Ançârî. (18)
Il disait souvent aux Compagnons: «Rapportez le moins possible de récits à partir du Messager d’Allah à l’exception de ce qui est nécessaire dans la pratique (du culte)». (19)
3)- A l’époque de ‘Uthmân
‘Uthmân a suivi dans ce domaine la même politique que celle de ses prédécesseurs puisqu’il dit sur la chaire: «Il n’est permis à personne de rapporter un récit dont on n’a pas entendu parler à l’époque d’Abû Bakr ou de ‘Umar». (20)
Ad-Dârimî rapporte qu’un jour «Abû Dhar était assis à côté du lieu médian de la lapidation rituelle. Autour de lui, les gens s’étaient réunis pour se renseigner en matière de religion. Soudain un homme se tint debout près de lui et dit: «Ne t’a-t-on pas interdit de donner des avis religieux?». En levant la tête vers lui, Abû Dhar lui demanda: «Me surveilles-tu? A supposer que vous mettiez l’épée sur ma nuque et que je puisse malgré cela faire aboutir un mot que j’avais entendu du Messager d’Allah (SAW), avant que vous m’acheviez, eh bien! Je le ferai aboutir». Il paraît que cela s’est passé à l’époque de Uthmân. (21)
C’est à cette époque aussi que se passa le récit rapporté par Al-Ahnaf b. Qays:
«J’ai été en Syrie et, le vendredi, je me rendis à la mosquée. Un homme était là, seul et sa prière était courte. Chaque fois qu’il se mettait devant une colonne de la mosquée (pour compléter le rang, paraît-il) les gens s’en allèrent. Je me suis approché de lui et pris place à côté.
– Qui es-tu, ô serviteur d’Allah?, lui demandai-je.
– Je suis Abû Dhar, et toi?
– Je suis Al-Ahnaf b. Qays, répondis-je.
– Va d’ici, que mon mal ne te contamine pas, me dit-il.
– Comment le ferais-tu?
– Ecoute, celui-là, c’est-à-dire Mu’âwiyah, a donné l’ordre que personne ne doive s’asseoir près de moi. (22)
C’était en raison de son opposition aux ordres des Autorités qu’Abû Dhar fut exilé d’une contrée à l’autre jusqu’à ce qu’il fût mort solitaire et banni à la Rabadhah en l’an 31 de l’hégire.
Cette persécution se passait durant la première moitié du califat de ‘Uthmân. Quand il a faibli et que des Compagnons comme la mère des Croyants Aïsha, Talhah, Az-Zubayr, ‘Amru b. al-‘As l’eurent abandonné voire critiqué ouvertement, les gens n’hésitaient pas à braver l’interdiction de rapporter la sunnah du Prophète (SAW) dont une partie put être diffusée mais non compilée.
4)- A l’époque de l’Imam ‘Ali (a. s.)
A cette époque, les Compagnons pouvaient rapporter une bonne partie des traditions prophétiques à tel point qu’on découvrit à cette époque les divergences qui existaient entre le contenu de la sunnah du Messager (SAW) et celui des avis religieux et juridiques des trois califes prédécesseurs de ‘Ali (a. s.), qui n’ont fait que marmonner les raisons pour lesquelles ils interdisaient l’écriture de la sunnah. Mu’âwiyah, lui, les exprima clairement et sans détour.
5)- A l’époque de Mu’âwiyah
‘Abdullah b. ‘Amir al-Yahçubî dit: «J’ai entendu Mu’âwiyah parler sur la chaire, à Dimashq (Damas) et dire: «Ô les gens! Ne rapportez pas les hadîths du Messager d’Allah (SAW) à moins qu’il s’agisse d’un hadîth cité à l’époque de ‘Umar qui, pour Allah, faisait peur aux gens (dans ce domaine)». (23)
Dans son Târîkh (histoire), At-Tabarî rapporte ce récit: «Quand Mu’âwiyah eut désigné en l’an 41 de l’hégire, Al-Mughîrah b. Shu’bah – comme gouverneur d’al-Kûfah il lui dit: «Je veux te recommander plusieurs choses mais, comptant sur ta perspicacité, je m’en passe, à l’exception d’une chose: ne néglige pas l’insulte de ‘Ali et son dénigrement, ni l’appel de la grâce et du pardon sur ‘Uthmân, ni le dénigrement des compagnons de ‘Ali et leur mise à l’écart, ni l’éloge des partisans de ‘Uthmân et leur rapprochement (de toi)». Al-Mughîrah dit: «J’ai éprouvé et on m’a éprouvé; j’ai été auparavant gouverneur pour le compte de quelqu’un d’autre que toi sans avoir été critiqué. Toi, quand tu m’auras éprouvé, tu apprécieras ou tu déprécieras». «J’apprécierai, inshâ Allah!», rétorqua Mu’âwiyah. (24)
Dans son livre Al-Ahdâth (les événements) Al- Madâ’inî rapporte que Mu’âwiyah, après l’année de l’union envoya la même copie à ses gouverneurs (dans le monde musulman): «On n’est pas responsable de ce qui peut arriver à quiconque rapporte quelque hadîth que ce soit sur les mérites d’Abû Turâb (‘Ali) ou de sa famille». Les plus éprouvés alors furent les habitants d’al-Kûfah (en Irak). (25)
C’est dans ce contexte et pour cette cause que furent assassinés Hujr b. ‘Adîy et ses compagnons, qui furent tués et crucifiés: Rashid al-Hujrî et Maytham At-Tammâr.
Ainsi donc l’Ecole des califes persécuta des Compagnons et des Tâbi’îne et liquida ceux qui étaient opposés à sa politique. En même temps, elle a ouvert la porte à d’autres clients qui pouvaient, en toute liberté, raconter ce qu’ils voulaient parmi les Musulmans.
Notes:
- Az-Zarkashî, Al-Burahâ fi’Ulumil-Qur’ân, 1/282; As-Suyûtî, Al-Itqân, p. 63
- Al-Bukhârî, Sahîh, 4/120; Muslim, 5/116; Abû Dâûd, Sunan, 2/229; At-Tirmidhî, 6/204; Ibn Mâjah, h/ 2552; Ad-Dârimî, 2/179; Mâlik, Al-Muwatta’, 3/42
- Muslim, 4/167, chap. “L’empêchement par cinq tétées Abû Dâûd”, 1/279; An-Nasâ’î, 2/82; Ibn Mâjah, 1/626, chap. “L’allaitement de l’adulte”, h/1944; Mâlik, Al Muwatta’, 2/118
- Muslim, Sahîh, 3/1000, chap. “Si l’homme avait deux vallées”, “Livre de la Zakât”.
- Les récits comportant des versets prétendus retranchés sont qualifiés par ceux qui ont traité cette question de versets dont la lecture fut abrogée. Al- Bukhârî, “Livre des sanctions”, h/ 1; et Muslim , h/ 15
- Ibn al-Athîr, Nihâyatul-Lughah, le terme: Sanan
- Ar-Râghib, Mufradât, le terme: bid’
- Il arrive que les partisans d’Ahlul-Bayt rapportent des récits relatifs aux mérites.
- Al-Bukhârî, “Livre de la science”, 1/22
- Al-Maqrîzî, Imtâ’ul-Asmâ’, p. 546. Ici l’auteur précise que c’était Zaynab bint Jahsh qui parla et avec elle ses compagnes.
- Ibn Sa’d, At-Tabaqât, 2/243-244; Al-Muttaqî, Kanz, 3/138, 4/52
- Ibn Sa’d, At-Tabaqât, 2/244
- Ad-Dârimî, Sunan, 1/125; Abû Dâûd, Sunan, 2/126; Ahmed, Al-Musnad, 2/162, 192, 207, 215; Al-Hâkim, Al-Mustadrak, 1/105-106 etc.
- Adh-Dhahabî, Tadhkiratul-Huffâdz, “Biographie d’Abû Bakr”, 1/2-3
- Ibn Sa’d, At-Tabaqât, 5/140, “Biographie d’Al-Qâsim Mohamed b. Abî Bakr”.
- Ibn ‘Abdil-Bar, Jâmi’u Bayân al-‘Ilm, 2/147; Al-Khatib al-Bagdâdî, Sharaf Açâbil-Hadîd, p. 88; Adh-Dhahabî, Tadhkiratul …, 1/4-5
- Al-Muttaqî, Kanz …, h/4865 (1ère éd.) ou n 1398
- Adh-Dhahabî, Tadhkiratul-Huffâdz, 1/7
- Ibn Kathîr, Târîkh, 8/107
- Al-Muttaqî, Muntakh al-Kanz, en marge d’Al-Musnad d’Ahmed, 4/64
- Al-Daramî, Sunan, 1/132; Ibn S’ad, Tabaqât, 2/354; Al-Bukhârî, Sahîh, chap. “Le savoir avant l’acte”, 1/161
- Ibn Sa’d, At-Tabaqât, 4/168
- Ibn ‘Asâkir, Târîkh Madînati-Dimashq (manuscrit), 9/9, 2/236 … etc.
- At-Tabarî, Târîkh, 2/112-113, 2/38; Ibn al-Athîr, op. cit., 3/102
- Rapporté par Ibn Abîl-Hadîd, Sharhun-Nahj, 3/15-16