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- LA DEMONSTRATION PHILOSOPHIQUE
Avant d’aborder la démonstration philosophique de l’existence de Dieu, nous devons nous demander ce qu’est cette démonstration. Quelles sont ses divisions et quelle est la différence entre elle, et la démonstration scientifique?
Il y a généralement trois sortes de démonstration: la démonstration mathématique, la démonstration scientifique, la démonstration philosophique.
* La démonstration mathématique: c’est la démonstration utilisée dans le domaine des mathématiques pures et dans la logique formelle. Elle est toujours basée sur un principe fondamental, celui de non-contradiction selon lequel A est A et n’est pas autre chose que A. Toute démonstration basée sur ce principe (ainsi que les résultats qui s’en ramifient) est appelée démonstration mathématique, laquelle bénéficie de la confiance de tous.
* La démonstration scientifique: c’est la démonstration utilisée dans le domaine des sciences naturelles. Elle est basée sur les connaissances qu’on peut prouver par la sensation ou par le raisonnement inductif scientifique, outre les principes de la démonstration mathématique.
* La démonstration philosophique: c’est démonstration qui se base sur des connaissances rationnelles (celles qui ne nécessitent ni sensation ni expérience), outre les principes de la démonstration mathématique, en vue de prouver une réalité objective du monde extérieur.
Cela ne signifie pas nécessairement que la démonstration philosophique ne se base pas sur des connaissances perceptibles ou inductives, mais qu’elle ne s’en contente pas; c’est-à-dire qu’en plus de ces connaissances ou indépendamment d’elles, elle repose sur d’autres connaissances rationnelles dans le cadre de la démonstration du sujet qu’on veut prouver.
Ainsi, la démonstration philosophique diffère de la démonstration scientifique en ceci que la première traite des connaissances rationnelles qui n’entrent pas dans le cadre des principes de la seconde.
Ayant présenté la conception de la démonstration philosophique, nous envisagerions dans ce même cadre la question suivante: peut-on compter sur les connaissances rationnelles, c’est-à-dire celles que la raison nous fournit, sans avoir besoin de la sensation ni de l’expérience ni de l’induction scientifique?
La réponse est positive. Car, il y a des connaissances qui sont dignes de la confiance de tous, telles le principe de non-contradiction sur lequel sont fondées toutes les mathématiques pures et auquel nous croyons rationnellement sans avoir besoin de recourir à l’observation ni à l’expérience, lesquelles constituent la base de l’induction.
La preuve en est que le degré de notre croyance en ce principe ne varie pas selon le nombre d’expériences et d’observations qui correspondent à ce degré. Prenons, à titre d’exemple, une application mathématique évidente de ce principe: 2 + 2 = 4. Notre croyance à la justesse de cette équation mathématique simple est très profonde et n’augmente pas avec les multiplications des exemples. Mieux, nous ne sommes pas disposés à prêter attention à un exemple qui le contredirait ; et si l’on nous disait que 2 + 2 = 5 ou 3 dans un cas exceptionnel, nous ne le croirions guère. Cela signifie que notre croyance en cette vérité n’est liée ni à la sensation ni à l’expérience, sinon elle serait affectée par elles positivement ou négativement
Et puisque nous croyons entièrement à cette vérité sans que notre croyance soit liée à la sensation ni à l’expérience, il est tout naturel que nous puissions nous fier parfois aux connaissances rationnelles sur lesquelles est basée la démonstration philosophique.
En d’autres termes, refuser la démonstration philosophique tout simplement parce qu’elle est fondée sur des connaissances qui ne sont pas liées à l’expérience et à l’induction, signifie qu’on doit refuser également la démonstration mathématique, laquelle est fondée sur le principe de non-contradiction auquel nous croyons sans nous référer à l’expérience ni à l’induction(1).
- Un Modèle de Démonstration Philosophique de L’Existence de Dieu:
Cette démonstration est fondée sur trois postulats que voici:
- L’axiome selon lequel chaque événement à une cause à laquelle il doit son existence. Cet axiome est perçu par l’homme d’une façon innée et il est confirmé constamment par le raisonnement inductif scientifique.
- L’axiome selon lequel lorsqu’une chose à des degrés différents dont les uns sont plus forte et plus perfectionnés que les autres, il n’est pas possible que le degré inférieur de perfectionnement et de contenu soit la cause de l’existence du degré supérieur. Ainsi, la chaleur, le savoir, la lumière… etc ont des degrés dont les uns sont supérieurs en perfectionnement ou en solidité aux autres. Un haut degré de chaleur ne peut être le résultat d’un degré inférieur, de même qu’un homme connaissant parfaitement l’anglais ne peut acquérir une connaissance plus perfectionnée de cette langue, d’un autre individu qui n’en a que des connaissances rudimentaires, ou pis, qui l’ignore complètement. De même, un degré de lumière faible ne peut réaliser un degré plus fort de lumière; car chaque degré supérieur comporte un surplus qualitatif et quantitatif par rapport au degré inférieur. Et ce surplus qualitatif ne peut être fourni par une source qui ne le possède pas. Lorsque vous voulez financer un projet avec votre argent, vous ne pouvez pas fournir plus d’argent que vous n’en possédez.
- La matière prend, tout au long de son évolution continuelle, des formes diverses quant à son degré d’évolution et de concentration. La particule de l’eau dépourvue de vie et de sensibilité représente l’une des formes de l’existence de la matière. Le protoplasma qui entre dans la composition de la substance du végétal et de l’animal, représente une forme plus développée de la matière. L’amibe, cet animalcule unicellulaire incarne une autre forme de la matière, encore plus évoluée. L’Homme, cet être vivant, sensible et pensant est la forme supérieure de l’existence dans cet univers.
A propos de ces différentes formes de l’existence, une question se pose: leur différence est-elle une simple différence quantitative du nombre de molécules et d’éléments, et des relations mécaniques entre eux? Ou bien, s’agit-il d’une différence qualitative et modale(2), traduisant des degrés différents de l’existence et des étapes de l’évolution et du perfectionnement? En d’autres termes, la différence entre la Terre et l’Homme qui en est issu, est-elle numérique seulement, ou bien une différence entre deux degrés de l’existence, deux étapes de l’évolution et du perfectionnement, comme la différence entre une lumière faible et une lumière intense?
L’Homme a cru d’une manière infuse, depuis qu’il s’est posé cette question, que ces formes représentent des degrés de l’existence et des étapes du perfectionnement. La vie est un degré supérieur de l’existence par rapport à la matière et le degré lui-même, n’est pas absolu; il est subdivisé lui aussi en sous degrés. Plus la vie acquiert un nouveau contenu, plus elle exprime un degré supérieur. C’est pourquoi, la vie de l’être sensible et pensant exprime un degré supérieur à la vie du végétal et ainsi de suite.
Mais la pensée matérialiste s’est opposée à cette vérité depuis deux siècles parce qu’elle croyait à la conception mécanique de l’interprétation de l’univers, selon laquelle le monde extérieur se compose de corpuscules identiques qui sont affectés, dans le cadre de lois générales, par des forces simples, attractives et répulsives, dont la fonction se borne au rôle de catalyseur, permettant aux corpuscules de se mouvoir et de se déplacer. Par cette action d’attraction et de répulsions mutuelles, des particules se rassemblent. D’autres se dispersent, permettant ainsi, à la matière de se diversifier. C’est pourquoi le matérialisme mécanique réduit l’évolution et le mouvement à un simple déplacement de corps et de corpuscules dans l’espace. Il a expliqué la diversité des formes de la matière par les différentes façons de rassemblement et de répartition de ces corpuscules, et a exclu de ces transformations la création de tout élément nouveau, affirmant que la matière ne croit pas dans son existence, ni ne se développe dans son évolution, mais qu’elle se rassemble et se disperse comme un pâté que la main façonne en différentes formes, sans qu’il acquière rien de nouveau.
Cette hypothèse a été inspirée de la science mécanique, – première des sciences à être libérale dans ses méthodes de recherche – et encouragée par les succès que cette science a réalisés dans les découvertes des lois du mouvement dynamique et dans l’interprétation sur la base de ces lois – des mouvements habituels des corps ordinaires – y compris les mouvements des astres dans l’espace.
Mais la continuation de l’évolution de la science et l’extension des méthodes de la recherche scientifique vers d’autres domaines divers ont démontré la fausseté de cette hypothèse et son incapacité d’expliquer mécaniquement tous les mouvements mécaniques, et de contenir, d’autre part, toutes les formes de la matière dans le cadre du mouvement mécanique des corps et des corpuscules d’un endroit à l’autre. Quant à la science, elle a confirmé ce que l’Homme a perçu naturellement, à savoir que la diversité des formes de la matière ne s’explique pas par le simple déplacement de ces corpuscules, d’un point à l’autre, mais par une variété d’évolutions qualitatives et modales. Les expériences scientifiques ont démontré qu’une combinaison numérique de corpuscules ne représente ni une vie, ni une sensibilité, ni une pensée; ce qui nous met devant une conception totalement différente de celle que le matérialisme mécanique nous présente. Car aussi bien dans la vie que dans la sensation ou la pensée, nous assistons à un processus de véritable développement de la matière et à une évolution qualitative dans ses degrés d’existence, et ce, quel que soit le contenu de cette évolution qualitative: matériel (exprimé par le passage d’un degré à un autre plus élevé) ou immatériel.
Récapitulons pour résumer les trois postulats que nous venons d’énumérer. Ce sont:
- Chaque événement a une cause.
- « l’inférieur » ne peut être la cause du « supérieur ».
- La diversité des degrés de l’existence et la variété modale dans notre univers.
A la lumière de ces trois postulats, nous savons que nous rencontrons dans les formes qualitatives évoluées un véritable développement, c’est-à-dire un perfectionnement dans l’existence de la matière ainsi qu’une croissance qualitative. Nous sommes en droit, dès lors, de nous interroger sur l’origine de cette croissance et de nous demander comment ce supplément nouveau est apparu alors que chaque événement a une cause, comme nous venons de le souligner?
Il y a deux réponses à cette interrogation:
- Ce supplément proviendrait de la matière elle-même, laquelle était, à l’origine, dépourvue de vie, de sensibilité et de pensée, mais qui les aurait créées à travers son évolution; autrement dit, la forme inférieure de l’existence serait la cause de l’existence de la forme supérieure en degré et la plus riche en contenu.
Mais cette réponse est en contradiction avec le deuxième postulat précité et selon lequel la forme au degré inférieur ne peut être la cause d’une forme d’existence supérieure en degré et plus riche en contenu. Car la supposition selon laquelle la matière morte et dépourvue de vie peut donner à elle-même ou à une autre matière, la vie, la sensibilité et la pensée, ressemble à la supposition selon laquelle un individu qui ignore la langue anglaise peut l’enseigner; ou à celle selon laquelle une lumière faible peut nous fournir une lumière plus forte, telle la lumière du Soleil par exemple; ou encore à celle selon laquelle un pauvre désargenté peut financer des projets capitalistes.
- Ce surplus résultant de l’évolution de la matière provient d’une source dotée de toute la vie, de toute la sensibilité et de toute la pensée dont il est lui-même pourvu; et cette source, c’est Dieu. Seigneur des Mondes. Dans ce cas, la croissance de la matière (le surplus) n’est qu’un développement et une éducation accomplis par la Sagesse, la conduite et la Maîtrise du Seigneur:
« Et très certainement, nous avons créé l’homme d’un choix d’argile, puis nous l’avons consigné, goutte de sperme dans un reposoir sûr, puis nous avons fait du sperme un caillot, puis du caillot nous avons créé un morceau de chair, puis du morceau de chair nous avons créé des os, puis nous avons revêtu de chair les os. Ensuite, nous en avons produit une tout autre créature. Béni soit Dieu, donc le meilleur des créateurs! ». (Coran XXIII, 12-14)
C’est la seule réponse qui concorde avec les trois postulats en question. Elle peut fournir une interprétation raisonnable du processus de la croissance et du perfectionnement intervenus dans les formes de l’existence sur ce vaste univers.
Cette démonstration que le Coran fait allusion à travers plusieurs versets, en s’adressant à la nature saine de l’homme et à sa raison normale:
« Voyez-vous donc cela que vous éjaculez: est-ce vous qui le créez? Ou si c’est nous le créateur? ». (Coran LVI, 58-59)
« Voyez-vous donc cela que vous cultivez; est-ce vous qui le cultivez? Ou si c’est Nous le cultivateur? ». (Coran LVI, 63-64)
« Voyez-vous donc le feu que vous obtenez en frottant: est-ce vous qui en produisez le bois? Ou si c’est Nous le producteur? ». (Coran LVI, 71-72)
« Il est de Ses signes de vous avoir créés de poussière; puis vous voilà des hommes qui se dispersent ». (Coran, XXX, 20)
- La Position du Matérialisme vis-à-vis de Cette Démonstration:
Le matérialisme mécanique ne s’embarrasse pas de cette démonstration; car, comme nous l’avons vu, il définit la vie, la sensibilité et la pensée comme: rien d’autre que des formes de rassemblement et de répartition des corps et des corpuscules, ne produisant rien de nouveau, à part un mouvement de particules, dû à des forces mécaniques.
En revanche, le matérialisme moderne s’en embarrasse en raison de sa croyance à l’évolution qualificative et modale de la matière, à travers ces formes. Mais il a choisi un mode d’interprétation de cette évolution modale, dans lequel il réconcilie le second postulat avec son désir de se contenter de prendre la matière à elle seule comme explication de toutes ses propres évolutions. Selon ce mode d’interprétation, la matière est la source de tout; et c’est elle qui alimente le processus de l’évolution modale (non pas à la manière d’un « pauvre finançant des projets capitalistes »; ce qui contredirait le second postulat) puisqu’elle renferme à l’état latent et dès l’origine, toutes les formes et tous les contenus de l’évolution: le poulet existe dans l’œuf et le gaz dans l’eau et ainsi de suite.
Quant à savoir comment la matière peut être en même temps œuf et poulet, eau et gaz, le matérialisme dialectique répond qu’il s’agit là d’une contradiction et que celle-ci est la loi générale de la nature. Pour lui, chaque chose contient son contraire – son « opposé » – à l’intérieur d’elle-même et est en lutte permanente avec lui. A travers cette lutte entre les deux contraires, le contraire intérieur se développe jusqu’à ce qu’il surgisse à la surface pour réaliser un changement dans la matière, exactement comme un œuf qui éclot subitement pour sortir de son intérieur un poussin. Et c’est de cette manière que la matière se perfectionne perpétuellement, car le « contraire » qui ressort de la lutte représente l’avenir, c’est-à-dire un pas en avant.
Cette analyse appelle les remarques suivantes:
Qu’est-ce que le matérialisme entend exactement par «chaque chose porte en elle son « contraire » ou son « opposé »», ou plus précisément, laquelle des significations suivantes est visée par cette affirmation:
- Veut-il dire que l’œuf et le poussin sont deux « contradictoires » ou deux « contraires » et que l’œuf crée le poussin et le doté des propriétés de la vie, c’est-à-dire que le mort engendre le vivant et crée la vie? Cela nous ramène exactement au « pauvre finançant des projets capitalistes », et contredit par conséquent le postulat précité.
- Ou bien, il veut dire que l’œuf ne crée pas le poussin, mais le fait apparaître alors qu’il y était en puissance étant donné que chaque chose contient à l’état latent son contraire. L’œuf, lorsqu’il était œuf, était en même temps poussin, exactement comme une photo qui offre un profil d’un côté, un autre profil différent, de l’autre.
Or, il est évident que si l’œuf était en même temps poussin, aucune opération de croissance ni de perfectionnement n’interviendrait lorsqu’il devient poussin; car tout ce que ce dernier état (poussin) présente maintenant, existait déjà originellement dans le cas précédent (œuf); cela ressemblerait à l’action d’un homme qui prend de l’argent de sa poche pour le tenir dans sa main, ce qui ne l’enrichit guère, puisque tout l’argent qui se trouve maintenant dans sa main, se trouvait déjà dans sa poche. Donc pour qu’il y ait une opération de croissance et de perfectionnement et que quelque chose de nouveau se réalise vraiment lors de la transformation de l’œuf en poussin, il faudrait dire que l’œuf n’était pas poulet ou poussin, mais un projet de poulet, c’est-à-dire quelque chose de susceptible de devenir poulet. Par-là seulement, l’œuf se distingue de la pierre qui ne peut devenir poulet. Quant à l’œuf, il peut être poulet sous certaines conditions et dans des circonstances précises. Car la possibilité d’une chose ne signifie pas forcément sa réalisation. Si l’œuf devient vraiment poulet, la possibilité à elle seule ne suffit pas pour en expliquer la transformation.
D’un autre côté, si les formes de la matière résultaient de leurs contradictions internes, il faut expliquer leur variété par la variété de ces contradictions internes. Ainsi l’œuf a ses propres contradictions qui diffèrent des contradictions de l’eau: c’est pourquoi, alors que de celles-ci résulte le gaz, de celle-là, résulte un poulet. On a là, une supposition facile à formuler, puisqu’il s’agit d’une phase avancée de la variation des formes de la matière; car dans la phase où nous avons affaire à l’œuf et à l’eau, nous pouvons facilement expliquer leur différence par leurs contradictions internes; mais que dire de la vérité des formes de la matière au niveau des corpuscules qui constituent des unités fondamentales dans l’univers, tels les électrons, les protons, les neutrons, opposés à des contre électrons, des contre protons et des contre neutrons? Chacun de ces corpuscules a-t-il pris une forme particulière des dites formes en raison de ses contradictions internes, ce qui reviendrait à dire que le proton existait dans les entrailles de sa matière avant d’en sortir à la suite du mouvement et de la lutte, exactement comme le cas de l’œuf et du poulet?
Si nous admettons une telle supposition, comment pourrions-nous justifier la variété des formes de ces corpuscules, alors qu’une telle variété suppose, selon la logique de la contradiction interne, que ces corpuscules variés soient différents par leurs contradictions internes, c’est-à-dire leur entité interne. Or, nous savons que la science moderne tend à croire à l’unité de l’entité de la matière et à l’unité de son contenu intérieur, et que les diverses formes qu’elle prend ne sont que des cas changeants à contenu unique et invariable; ce qui rend possible la transformation de proton en neutron et vice-versa, c’est-à-dire que la forme du corpuscule change (outre l’atome et la particule) alors que son contenu reste unique et invariable. Est-ce que cela signifie que le contenu est le même dans tous les cas, même si les formes changent? Comment supposer, dès lors, que ces formes résultent des contradictions différentes internes?
L’exemple de l’œuf et du poulet suffit lui-même à éclairer cette question. Car pour que les formes que prennent plusieurs œufs varient en raison de leurs contradictions internes supposées, il faut qu’elles soient différentes de par leur structure interne. L’œuf d’une poule et celui d’un oiseau produisent deux formes différentes, en l’occurrence, le poulet et l’oiseau. Mais si les deux œufs étaient d’une même sorte, tels deux œufs de poule, nous ne pourrions pas supposer que leurs contradictions internes débouchent sur deux formes différentes.
Ainsi, nous pouvons remarquer que l’interprétation du matérialisme moderne, des formes de la matière, basée sur les contradictions internes de celle-ci diverge avec la tendance de la science moderne à affirmer l’unité du contenu intérieur de la matière.
- Ou bien, le matérialisme entend-il, en affirmant que «toute chose contient son « contraire »», que l’œuf lui-même exprime deux contraires ou deux contraires indépendants, dont chacun a son existence propre et dont l’un est représenté par l’embryon issu de la présence de la semence à l’intérieur de l’œuf, et l’autre par tout ce que l’œuf contient de substances, que ces deux contraires se sont unis par leur combat à l’intérieur de la coque de l’œuf et qu’à l’issue de cette lutte l’un des deux contraires s’est imposé pour aboutir à la victoire de l’embryon qui transforme l’œuf en poule?
Ce genre de lutte entre les contraires est courant dans la vie des hommes et enraciné dans leurs visions habituelles en plus de leurs visions philosophiques. Mais pourquoi appeler cette corrélation entre l’embryon et les substances qui composent l’œuf, contradiction? Pourquoi appeler la corrélation entre la graine, le sol et l’air, contradiction? Pourquoi appeler la corrélation entre le fœtus à l’intérieur de l’utérus et la nourriture qu’il y puise, contradiction? Ce n’est en fait qu’une simple appellation qui peut bien être formulée autrement. On peut le remplacer par cette affirmation: les deux « contraires » fusionnent l’un dans l’autre et s’unifient.
Mettons que cela s’appelle contradiction. Le problème serait-il résolu pour autant, tant que nous admettons que cette corrélation spécifique entre les deux contraires aboutit à un résultat plus grand, à l’opération de la croissance d’une chose nouvelle qui dépense le total numérique des deux contraires? D’où vient donc ce surplus? Vient-il des deux contraires en lutte, lesquels l’ont perdu tous les deux, alors que celui qui perd une chose ne peut pas l’offrir, si l’on en croit le deuxième des trois postulats précités?
Connaissons-nous un seul exemple de la nature dans lequel la contradiction et la lutte entre les contraires constituent vraiment un facteur de développement? Comment un contraire peut-il contribuer à développer son contraire à travers sa lutte contre lui, alors que cette lutte traduit un degré de résistance et de refus, et que toute résistance réduit la capacité de l’autre à se mouvoir et à se développer au lieu de l’y aider? Nous savons tous que si le nageur se heurte en se baignant, à des vagues d’eau opposées à la direction qu’il suit, celles-ci entravent son mouvement au lieu de le faciliter.
Si la lutte entre les contraires, – en quelque sens que ce soit – est la base du développement de l’œuf et de sa transformation en poulet, quel est le développement produit de la lutte entre les contraires lors de la transformation de l’eau en gaz et son retour à l’état d’eau de nouveau?
La nature nous dévoile constamment des contraires dont l’adhésion et la rencontre conduit à leur destruction mutuelle au lieu de les conduire au développement et au perfectionnement. Le proton positif qui est la particule constitutive du noyau de l’atome et dont la charge électrique est positive, a en face de lui un proton contraire et négatif. L’électron négatif qui gravite dans l’orbite de l’atome a un électron contraire et positif, et s’il arrivait que ces deux contraires se rencontrent, des processus d’anéantissement atomique seraient déclenchés qui feraient disparaître la matière, alors que des énergies en seraient libérées qui se répandraient dans l’espace.
De tout ce qui précède, nous pouvons conclure que le mouvement de la matière sans alimentation ni approvisionnement venant de l’extérieur ne saurait produire un véritable développement et une évolution vers des formes supérieures et des degrés plus élevés de concentration. Pour que la matière se développe et s’élève vers des niveaux supérieurs, tels la vie, la sensibilité et la pensée, il faut qu’il y ait un Seigneur qui jouit de ces qualités afin qu’il puisse les conférer à la matière.
Le rôle de la matière dans les opérations du développement se limite à une aptitude, à une disposition, à une possibilité. Il est comparable à celui d’un enfant disposé et apte à apprendre des leçons qui lui donnent ses éducateurs.
Que Dieu, Seigneur des Mondes soit donc béni.
- Les Attribut Divins
Lorsque nous croyons en Dieu, Créateur de l’Univers, son Educateur et l’Organisateur de sa marche selon une sagesse et une gestion pertinente, il est naturel que nous prenions connaissance de Ses attributs à travers Sa création et Sa créativité, et apprécions Ses qualités à travers les indices rayonnants de Ses œuvres, exactement comme nous apprécions un ingénieur à travers les qualités qui distinguent ses travaux géométriques, ou comme nous jaugerions un auteur à la lumière de la science et du savoir que son livre renferme, ou encore comme nous déterminerions la personnalité d’un éducateur à travers les qualités et les vertus de ceux qu’il a éduqués.
C’est de cette façon que nous pouvons faire un aperçu des qualités du Créateur grandiose, telles la science, la sagesse, la vie, la capacité, l’ouïe et la vue. Car la précision et la créativité dont relève l’univers mettent en évidence la Science et la Sagesse. Les énergies qu’il renferme dans ses tréfonds démontrent la capacité et la maîtrise. Les variétés de la vie et des degrés de la perception rationnelle et sensorielle montrent combien le Créateur est doté de Vie et de Conscience. L’unité de plan et de construction constatée dans le dessin de cet univers, ainsi que les corrélations solides entre ses différents aspects soulignent l’unicité du Créateur et de l’expérience, dont est issu ce vaste univers.
- a) Sa Justice et Sa Droiture
Nous croyons tous, par notre raison innée et infuse, à des valeurs générales de la conduite, à savoir les valeurs qui affirment que la Justice est le Bon Droit et le Bien, que l’Injustice est Illégitime et un Mal, que celui qui se montre juste dans sa conduite est digne de respect et de récompense et celui qui commet injustices et agressions est digne du contraire. Ces valeurs, seraient par entendement et – nature innée le moteur qui anime et dirige la conduite de l’homme s’il n’avait pas d’autres obstacles, tels l’ignorance et l’intéressement qui l’en empêchent. Tout homme, s’il devait choisir entre la vérité et le mensonge, ou entre la fidélité et la trahison, choisirait la vérité plutôt que le mensonge, la fidélité plutôt que la trahison, s’il n’y avait pas un motif personnel et un intérêt privé l’incitaient à dévier de ces valeurs dans son comportement.
Cela veut dire que lorsqu’un homme n’a aucun intérêt à tromper quelqu’un ni à le trahir, ni à être injuste envers lui, il se conduit en homme véridique, honnête, juste, c’est-à-dire avec droiture. C’est exactement ce qui s’applique au Créateur Sage qui est au courant de toutes ces valeurs que nous percevons par notre raison innée. Car c’est Dieu qui nous a doté de cette raison; et en même temps c’est Lui seul qui, vu Sa Puissance inestimable et Sa Domination totale sur l’Univers, n’a besoin ni de transiger ni de biaiser. C’est pourquoi, IL est toujours Juste et n’est jamais injuste envers personne.
- b) la Justice Divine Fixe la Récompense(3)
Les valeurs auxquelles nous croyons, appellent, comme nous avons pu le constater, à la justice, à la droiture, à l’honnêteté, à la véracité, à la fidélité… et à bien d’autres qualités, et condamnent leurs contraires. Loin de se contenter de cet appel et de cette condamnation, elles réclament une récompense appropriée à chacune de ces qualités (positives ou négatives). Car la raison innée et le bon sens réalisent que l’injuste et le traître méritent d’être punis et que le juste, l’homme honnête qui fait des sacrifices pour la justice et l’honnêteté mérite d’en être récompensé. Chacun de nous se sent animé de ces valeurs pour punir l’injuste dévié et estimer le juste intègre. Mais ce qui nous empêche de mettre en exécution ce désir de faire justice nous-mêmes, c’est notre incapacité d’adopter l’attitude appropriée ou notre partialité personnelle.
Et puisque nous croyons en un Dieu juste et intègre dans son comportement, et capable de rendre justice – punition ou récompense selon le cas – et d’appliquer les valeurs qui imposent la sentence juste et déterminent la récompense convenable au comportement honnête, et la punition méritée au comportement déshonorant, il est normal que nous en concluions que Dieu récompense le bienfaiteur pour sa bienfaisance et rend justice à la victime au détriment de l’injuste.
Mais en même temps, nous remarquons que cette justice ne se réalise pas toujours dans la vie que nous connaissons sur cette Terre, bien que Dieu en soit capable. Cela prouve, lorsqu’on tient compte de ce qui précède, qu’il y a un jour de Jugement à venir dans lequel le bienfaiteur anonyme qui aura fait des sacrifices pour une noble cause, sans avoir cueilli les fruits de ses sacrifices, et l’injuste qui aura échappé momentanément à la punition qu’il méritait, et vécu sur le sang et les ruines de ses victimes, seront récompensés chacun selon ses actes. Ce jour-là, c’est le Jour du Jugement Dernier qui incarne toutes ces valeurs absolues de la conduite et sans lequel ces valeurs sont vidées de leur sens.
Notes:
1- Voir notre ouvrage: « Les Fondements Logiques de l’Induction », pp. 480 – 500. Pour plus de détails sur ce point et sur les sujets suivants qui en traitent:
* les positions de la logique empirique
* la logique positiviste
* la méthode positiviste d’interpréter par la fréquence, la certitude dans le principe mathématique
* le critique de cette méthode.
2- En arabe: « Kayfi ». Nous avons traduit ce terme littéralement. Il est possible que l’auteur entende par « Kayfi »: quantitatif. Etant donné que « Kayfi » vient de « Kayfa » = « comment », on ne doit pas comprendre le mot « modal » dans son sens philosophique technique, mais dans un sens très général qui se rapporte au mot: « mode ».
3-Au sens positif et négatif du terme (N.D.T.).