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– La méconnaissance de soi.
– Les dénigreurs.
– Regard sur les enseignements de la religion.
Parmi les grandes imperfections morales de l’homme, figure l’inconscience qu’il manifeste à l’égard de ses propres défauts. Souvent l’égarement et la confusion procèdent de l’ignorance et de la négligence.
Que de fois, par manque de vigilance, l’âme a-t-elle été envahie par des défauts qui se sont incrustés en elle, et ont miné son succès. Quand l’homme devient esclave de son âme ignorante, il tue en lui-même l’amour de la vertu, et devient la proie de ses différents penchants et passions qui le frustrent du bonheur et de ses joies. Il demeure aussi privé de toute orientation morale.
La première condition, pour la réforme de soi, consiste à connaître ses insuffisances. Après quoi on saurait briser les chaînes du vice, et échapper au danger que font peser sur nous les défauts.
Il importe beaucoup en effet d’examiner les spécificités de l’âme humaine avant d’essayer de l’amender; et cela est la seule voie de perfection morale et spirituelle.
En décelant les points forts et faibles de l’âme, on peut discerner les zones sataniques enfouies dans ses replis et les séparer des aptitudes et propensions méritoires d’ailleurs plus nombreuses puis les éliminer avant qu’elles ne contaminent l’ensemble.
Si par négligence nous omettons d’examiner notre image réelle au miroir de nos actes, nous commettrons une faute irréparable. Nous sommes tenus avant toute chose, d’évaluer nos particularités et nos attributs, afin de connaître les défauts qui ont pris racine en nous, à notre insu. Un effort continu nous permettra d’extirper ces pousses sauvages et, de les empêcher d’apparaître à leur aise. Certes l’amendement et la réforme de l’âme, ne sont pas chose facile. Ils exigent une volonté constante, une longue peine et une persévérance.
Outre l’identification des défauts et vices de l’âme, l’éradication des mauvaises habitudes exige une résolution sans faille conduisant l’homme à l’objectif désiré.
Quand nous ordonnons nos actes, nous ordonnons par là même nos idées, et nous leur donnons une bonne direction et plus de force. Chaque pas accompli dans ce sens exerce un impact utile et décisif que nous pouvons mesurer en toute évidence a la fin de l’action.
Le célèbre savant Alexis Carrel écrit:
«La méthode la plus efficace pour rationaliser nos actions consiste à établir minutieusement tous les matins notre emploi du temps quotidien, et à en étudier les résultats le soir venu.
Tout comme nous prévoyons de faire telle ou telle chose déterminée à telle ou telle heure, et de l’achever aussi à telle heure fixée d’avance, de manger telle chose, d’obtenir telle somme, d’écouter telle musique, et de voir telle personne…, de même nous devons programmer d’être utile à autrui, d’agir en toute équité dans toutes nos affaires.
La bassesse morale est détestable aussi bien que la saleté corporelle. Nous devons débarrasser nos esprits de leurs souillures comme nous nettoyons nos corps.
Certains ont pris l’habitude de faire des exercices physiques avant et après le coucher pour garder leur forme. Il n’en est pas moins important de consacrer quelques minutes de notre temps à exercer notre sens moral, et nos facultés spirituelles et psychologiques.
En méditant sur l’attitude que nous devons observer, et en veillant à ne pas nous écarter de l’application du programme prévu, nous pourrons donner une impulsion à notre esprit et notre volonté. Et grâce à cet ordre, un nouveau domaine insoupçonné jusqu’ici se dégagera au fond de l’âme, dans lequel chacun pourra se voir seul sans voile aucun.
Notre succès dans l’application des impératifs de la vie est lié à notre vie intérieure. Tous les hommes, pauvres ou riches, vieux ou jeunes, lettrés ou analphabètes, doivent inscrire dans leur esprit, leurs actions quotidiennes bonnes et mauvaises, comme le commerçant tient à jour son registre des achats, des ventes, et des dépenses ou comme le savant qui classe ses notes avec une infinie précaution. En appliquant patiemment ces méthodes pédagogiques, nous transformerons nos esprits et même nos corps.»
Un homme conscient et actif ne manque pas de canaliser ses potentialités et ses efforts dans un sens adéquat. Plus sa personnalité gagnera en noblesse; et plus il fera preuve de respect envers les droits et l’honneur des autres, et se retiendra de tout acte pouvant blesser leur amour-propre. Il réalisera que son comportement avec autrui est ce qui le définira le mieux.
On demanda à un grand homme:
Qu’y a-t-il de plus difficile et de plus facile?
Il répondit: le plus difficile est de se connaitre soi même, et le plus facile est de critiquer les autres et de les dénigrer.
Les dénigreurs
Certaines personnes sont par nature portées à espionner la vie privée des gens, leurs faiblesses et leurs secrets, et à les en critiquer. Tout cela en dépit de ce qu’en eux-mêmes les vices l’emportent sur les vertus, tant en qualité qu’en quantité.
Ils sont cependant indifférents, à égard de leurs défauts et s’occupent de ceux des autres, sans jamais penser à s’en repentir.
L’habitude de dénigrer les autres obscurcit la vie, et dégrade la personnalité morale.
Les mobiles incitant l’homme à nuire à ses semblables traduisent une sorte de complexe d’infériorité, de bassesse du caractère qui empire avec la fatuité, l’orgueil et la vanité et qui est cause de beaucoup d’erreurs.
Les moqueurs consacrent leur temps à penser sur des sujets rejetés par la raison. Ils se dépensent à épier les actes de leurs amis, dans l’espoir d’y dénicher des points faibles à dénigrer et à critiquer, croyant pouvoir porter atteinte à leur rang et à leur notoriété. Ce faisant, ils manquent l’occasion de porter un regard critique sur eux-mêmes, et s’écartent ainsi du droit chemin de l’émancipation de soi.
Ceux-ci manquant effectivement du courage nécessaire, deviennent si réfractaires à toute règle, qu’ils ne croient pas devoir vénérer l’honneur d’autrui. Ils ne peuvent pas vivre en bons termes, même avec leurs plus proches. Car s’ils ont plaisir à médire des absents devant leurs amis, ils sont aussi prompts dès que le champ est libre, à aborder les défauts de ces derniers et à les critiquer. C’est pourquoi ils sont souvent incapables de se faire des amis authentiques auprès de qui ils pourraient goûter aux joies d’un sentiment sincère.
La dignité de l’homme est tributaire de ses actes, et quiconque tente de nuire à celle d’autrui, met en péril la sienne.
Il se peut que le dénigreur ignore les conséquences de son acte vil, mais il ne pourra pas se mettre à l’abri des contrecoups de son acte? Combien en effet il s’attire d’inimitié et de réprobation! Les regrets ne serviront à rien.
Comme dit le dicton:
«Ta langue est un lion, si tu l’attaches il te gardera si tu le laisses échapper, il te dévorera.»
«Beaucoup ont péri par le tranchant de l’épée, mais pas autant que ceux qui ont péri par la langue.»
Quand on veut fréquenter les gens, il faut connaître ses devoirs et obligations envers eux, notamment considérer leurs aspects positifs et leurs actes de valeur ainsi que leur mérite. Il faut aussi se réformer en tout ce qui peut porter atteinte à la dignité d’autrui, et qui contredit le principe de l’affection, car celle-ci ne peut subsister que si elle est réciproque.
En s’habituant à la discrétion sur les défauts des amis, on consolide l’amitié. Quand on remarque un point faible chez un ami, il faut savoir choisir le moment opportun pour lui en parler, et l’inviter en aparté à se changer.
Quand on veut édifier un ami en lui reprochant son défaut, il faut s’y prendre avec une précaution particulière de façon à ne pas le blesser.
Un fin psychologue a dit:
«Vous pouvez faire comprendre à un homme qu’il se trompe, par un regard, une intonation, un geste aussi éloquemment que par des mots. Et si vous lui dites qu’il a tort, croyez-vous ainsi l’amener à penser comme vous? Non, jamais! Vous avez frappé un coup direct à son intelligence, à son jugement, à son amour-propre. Cela va l’inciter à riposter, mais ne l’amènera jamais à modifier son opinion. Vous pourrez bien ensuite lui jeter à la tête toute la logique d’un Platon ou d’un Emmanuel Kant, vous ne changerez pas la conviction de cet homme, car vous l’avez blessé.
Ne commencez jamais en annonçant: « Je vais vous prouver cela… », « Je vais vous démontrer que… » Cela équivaut à dire: « Je suis plus malin que vous. Je vais vous faire changer d’avis.»
Il est difficile même dans les conditions les plus favorables de corriger l’opinion de nos semblables. Alors, pourquoi élever encore des obstacles? Pourquoi vous handicaper? Si vous avez l’intention de prouver quelque chose, que personne n’en sache rien. Opérez si adroitement, si subtilement, que nul ne puisse soupçonner où vous désirez en venir.
Suivez le conseil du poète:
«Enseignez sans paraître enseigner….»
Regard sur les enseignements de la religion:
Le Coran met en garde les moqueurs contre le noir destin qui leur est réservé, et les invite à redouter l’issue finale de leurs mauvaises actions:
«Malheur a tout calomniateur acerbe,….»
L’Islam prescrit aux musulmans le respect des règles morales et celles de la politesse afin de sauvegarder l’intégrité sociale, et leur interdit les insinuations diffamantes les uns envers les autres qui créent la division, et la tension dans les rapports mutuels. Les musulmans doivent tous veiller au respect de la dignité d’autrui et s’abstenir de se montrer méprisants ou humiliants.
L’Imam Sadeq, dit:
«Le Croyant éprouve au contact de son frère en religion le même sentiment de paix que celui que ressent l’homme assoiffé qui reçoit de l’eau fraîche.»
Et L’Imam Mohammad el Bâqer, cinquième Imam des Chiites dit:
«Il suffit comme défaut pour un homme, de voir en autrui le mal qu’il ne voit pas en soi-même, ou de se moquer des gens pour un handicap qu’il a aussi, ou de nuire à son ami, par une indiscrétion.»
L’Imam Ali, le premier des Imams -que la paix soit sur eux tous- a dit:
«Garde-toi de fréquenter les mauvaises langues, car nul n’est à l’abri de leurs coups.»
Même s’il devait faire violence à son penchant naturel, l’homme devrait apprendre à accueillir avec le sourire, les reproches fondés qu’on lui adresse avec une bonne intention. Grâce à ces critiques, et en portant notre attention sur nos insuffisances, nous serons à même de créer en nous-mêmes les conditions favorisant notre édification et notre amélioration.
L’Emir des Croyants, Ali, nous donne à ce sujet le conseil suivant:
«Que le plus préférable parmi les hommes soit pour toi celui qui te montre ton défaut, et qui t’aide à le combattre.»
Dale Carnegie écrit dans son livre: «comment se faire des amis.»:
Aujourd’hui, je ne crois presque plus rien de ce que je croyais il y a vingt ans, exception faite pour la table de multiplication. Et encore! J’en arrive même à douter de celle-ci lorsque je lis les théories d’Einstein.
Dans vingt ans d’ici, je ne croirais peut-être plus un mot de ce que j’ai dit dans ce livre. Mes opinions sont beaucoup moins définitives qu’elles ne l’étaient autrefois. Socrate répétait à ses disciples en Athènes: « Je ne sais qu’une chose: c’est que je ne sais rien. ».
Que voulez-vous… Je n’ai pas la prétention de me croire plus fort que Socrate; c’est pourquoi j’ai cessé d’affirmer aux gens qu’ils ont tort….»
Toujours dans le même livre est rapportée une parole d’Emerson:
«Tout homme m’est supérieur en quelque manière: c’est pourquoi je puis m’instruire à son contact.»
L’Emir des Croyants a dit:
«Celui qui est curieux de découvrir des vices chez les autres, a intérêt à commencer par les siens!»
Le docteur Helen Schachter dit:
«Plutôt que de trouver toujours à redire sur le comportement et la parole des gens, il vaudrait mieux chercher à compatir à leurs maux et leurs douleurs et les aider dans la mesure du possible. Plus encore, occupons-nous de nos propres misères; portons sincèrement et courageusement notre attention sur elles, et tâchons de les traiter.»
Au lieu de s’atteler résolument à se réformer l’ignorant s’emploie à cacher ses inaptitudes.
L’Imam Ali a dit:
«C’est assez pour être stupide que de regarder les défauts des gens, et de ne pas regarder ceux qui sont dissimulés en soi-même.»
Aviboury écrit:
«Nous fermons trop les yeux, du fait de notre bêtise, sur nos imperfections, et nous les recouvrons du voile de la négligence et de l’inconscience, pour nous tromper ainsi nous-mêmes. Il est étonnant que les gens cherchent à dissimuler leurs défauts, et ne pensent jamais à s’amender. Quand un de leurs défauts est trop visible pour être travesti ils se débrouillent par des milliers d’artifices pour le préserver des regards, et en réduire la gravité. Ces gens-là oublient que toute incapacité, même légère, s’alourdira au fil des jours, comme la graine qui grandit jusqu’à devenir un grand arbre.»
L’examen attentif de la psychologie est la seule méthode utilisé de nos jours par les savants pour en étudier les maladies et les traitements correspondants.
L’Imam Ali recommandait la même démarche disant:
«L’homme doué de raison devrait observer et recenser les imperfections de son âme en matière de foi, de morale et de comportements. Puis ses rappeler ou les noter par écrit, et oeuvrer à déraciner ces défauts l’un après l’autre.»
Un psychologue moderne préconise la méthode suivante pour une introspection fructueuse:
«Asseyez-vous seul et à l’aise dans une chambre silencieuse. Prévenez auparavant les membres de votre famille de ne pas vous déranger.
Plus le lieu choisi sera calme et reposant, mieux ce sera, car le but recherché exige une condition fondamentale, à savoir que votre pensée ne soit nullement préoccupée par autre chose que cet objectif, ni par des soucis matériels.
Ayez avec vous du papier à bon marché, et un porte-plume au trait rapide. Je dis papier à bon marché, pour que vous puissiez vous en servir sans vous inquiéter de sa valeur, et porte-plume à trait rapide car vous serez dans un état où votre esprit sera sollicité par mille et un facteurs psychologiques pouvant vous retenir, et vous inhiber.
Rédigez une liste des sentiments et des états que vous avez éprouvé en vous-même ce jour-là et la veille.
Puis après, réexaminez la liste en chacun de ses éléments, méditez sur chaque sentiment ou état et écrivez tout ce qui vous vient à l’esprit à son sujet, sans retenue ni limitation, même si cela prend beaucoup de pages.
Après cela, gardant à l’esprit tous les instincts et passions, l’amour de soi, l’égoïsme, l’orgueil, etc… Comparez-y toutes vos pensées, vos actions et sentiments, l’un après l’autre, et demandez-vous quel instinct a été à l’origine de tel ou tel acte ou sentiment?
Le but de cette introspection est d’apporter des transformations dans la personnalité morbide, de façon que la force régénératrice et consolidatrice de son être puisse la libérer de ses névroses, surmonter ses contradictions psychologiques, et l’amène à ressentir une personnalité nouvelle. Il trouvera de nouvelles valeurs, de nouveaux objectifs dans son existence, et en fait, prendra une nouvelle direction dans sa vie.»
Source: Problèmes moraux et psychologiques
Seyyed Mojtaba Moussavi Lari