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Discours de Zaynab (a) à Koufa (en arabe: خطبة زينب في الكوفة) est le sermon qu’elle adressa aux gens de Koufa qui s’étaient rassemblés pour voir le convoi triste venant de Karbala et conduit vers le palais de ‘Ubayd Allah b. Zîyâd.
Zaynab (a) et les gens de Koufa
Koufa fut la capitale de l’Irak et le lieu de gouvernement de l’Imam Ali (a). Cette ville fut aussi le lieu de résident des partisans et des amis de l’Imam Ali (a). Zaynab (a) y vécut en tant que fille du Calife. Les femmes avaient l’habitude de la saluer en s’adressant à elle, par des titres comme :
« Fille du Commandeur des croyants (a) », « fille du Prophète d’Allah (s). », etc.
Elle était une figure extrêmement respectée par les habitants de Koufa.
Mais, au lendemain de l’événement de Karbala, elle y fut emmenée en tant que prisonnière. Ceux qui l’avaient toujours respectée l’observèrent avec douleur et tristesse. Il y a en avaient aussi, d’autres, qui jadis l’honoraient, mais, qui firent là, preuve d’une grande cruauté à son égard.
Elle était assise sur le dos d’un chameau sans selle. Au lieu de ressentir du remords et des regrets après l’assassinat du petit-fils du Prophète (s), certains gens de cette ville célébraient ce crime dans la liesse et la réjouissance !
D’un côté, il y avait cette masse au comportement si inhumain, et de l’autre, il y avait la souffrance de ces femmes (Zaynab (a) et les autres captives de Karbala) assises sur des chameaux non sellés et précédées par les têtes de ces êtres chers (les martyrs de Karbala), brandies sur les lances. Un groupe d’enfants assoiffés tentaient tant bien que mal de rester debout; l’Imam as-Sajjâd (a), enchaîné et attaché, terminait cette macabre procession : au-dessus d’eux, il y avait des hordes de spectateurs qui tournaient en dérision cette scène pathétique et cruelle.
Y’a-t-il quelqu’un qui a songé de se mettre à la place de Zaynab (a), afin de toucher du doigt la violence de sa condition ? Ce n’est pas une tâche aisée que de relever la tête et de délivrer un sermon lorsque qu’on se trouve isolé et écrasé sous le poids d’une telle calamité.
Pour être efficace, un discours doit être prononcé dans certaines conditions : l’orateur ne doit pas être soumis à aucune tension psychologique, mais, dans un état de sérénité. Il ne doit pas être tourmenté par la soif et la faim et encore moins, submergé par la tristesse et la douleur. Aucune de ces conditions n’était remplie ce jour-là.
La faim et la soif de l’oratrice, Zaynab (a), avaient atteint son paroxysme et elle était sujette à toutes sortes d’émotions et de contraintes physiques. Les enfants pleuraient dans cette atmosphère pleine d’hostilité. Le regard de chaque spectateur était rempli de crueté. Mais, Zaynab (a) avait hérité de son père, son éloquence et sa notoriété.
Grâce à ses talents et son éloquence, lorsqu’elle commença à s’adresser au public, elle parvint à toucher les cœurs des plus rudes des assassins. Ses mots pénétrèrent le cœur de l’auditoire comme un couteau dans la chair et leurs yeux furent bientôt humides. Les gémissements devinrent des lamentations, des larmes et des cris.
Discours de Zaynab (a)
Lorsque Zaynab (a) se décida à parler, un seul de ses signes figea tout le monde, aussi bien les humains que les animaux.[1] Son aura, sa passion, sa domination, sa notoriété dans cet univers, malgré toutes ces épreuves, mais surtout son recul et son maîtrise de soi, faisaient d’elle une personne au-dessus de tous les éloges. Elle entama alors, cet incroyable sermon :
» Louange à Allah, à qui nous dédions toutes nos prières et que Sa Bénédiction soit sur mon père, Muhammad (s), et sur sa descendance immaculée.
Ô peuple de Koufa, ô peuple de la duperie et de la trahison, vous vous lamentez pour nous ! Que jamais ne tarissent vos larmes, que jamais ne se taisent vos supplications. Vous êtes semblables à celle qui défait le fil de son fuseau après l’avoir solidement tordu.
Vous avez cru au Saint Prophète (s), mais, vous avez vous-même trahi votre engagement. Car, vous considérez vos serments, comme un sujet d’injure entre vous. Il n’y a parmi vous que des courtisans, vaniteux, vicieux, orgueilleux et cruels. En réalité, vos agissements ne relèvent que de la flatterie de servants aux maîtresses et vous médisez en cachette comme des ennemis. Vous êtes telle qu’une végétation sur un marécage, comme une prairie sur un fumier, comme un ornement d’argent sur un tombeau. Vos paroles sont pleines d’éclats mais vos actes sont détestables. Le mal que vous avez commis causera votre perdition et certainement la colère d’Allah s’abattra sur vous et vous demeurerez éternellement dans le châtiment.
Vous pleurez, alors que vous avez décimé de vos propres mains nos bien-aimés. Pourquoi donc, gémissez-vous ? Par Allah, vous devriez pleurer abondamment et rire peu. Par ce crime et votre trahison, vous ne récolterez que disgrâce et discrédit. Jamais, vous ne vous débarrasserez de cette souillure. Jamais, vous ne parviendrez à laver cet affront : celui de l’assassinat du fils du Sceau des Prophètes (s), le seigneur de la jeunesse du Paradis, le refuge des meilleurs d’entre vous, l’espoir de ceux qui vivent dans l’oppression, le phare des preuves d’Allah et le guide de la Sunna (al-Husayn (a)). Qu’Allah vous châtie pour votre horrible méfait.
Désormais vos efforts seront vains, vos mains vont se flétrir, vos transactions vous conduiront à votre défaillance. Vous encourez la punition d’Allah et vous serez très certainement condamnés à la disgrâce et à l’humiliation.
Ô peuple de Koufa ! Soyez maudits ! Savez-vous quel être chéri du Prophète (s) vous avez mis à mort, et les voiles de quelles femmes vous avez offensé ? Savez-vous le sang de qui avez-vous versé, et quel tabou avez-vous transgressé ? La gravité de votre péché pourrait fendre les cieux, diviser la terre et réduire en poussière les montagnes. Vous avez commis un acte innommable. Il ne serait point étonnant de voir se déverser sur vous une pluie de sang et votre rétribution sera une torture encore plus terrible. Personne n’y trouvera assistance et méfiez-vous, il n’y aura ni répit, ni sursis. Dieu ne se presse pas pour punir et Allah ne craint pas la vengeance. En vérité, votre Seigneur est à l’affût. »[2]
Zaynab (a) face à Ibn Zîyâd
À l’arrivée du convoi au palais de ‘Ubayd Allah b. Zîyâd, ce criminel dit avec réjouissance et fierté :
« Louange à Allah, qui vous a scandalisé, vous a tué et a démenti vos histoires. »
Zaynab (a) prit alors, la parole et répondit :
« Louange à Allah, qui nous a honoré par Son Messager — paix et bénédictions sur lui et sa descendance immaculée — et qui nous a parfaitement purifié des vices. Allah ne scandalise que le pervers et ne dément que le vicieux qui est autre que nous. »
Ibn Zîyâd lui demanda alors :
« N’as-tu pas vu ce qu’Allah fit de ta famille et de ton frère ? »
Zaynab (a) répondit :
« Je n’y ai vu que la beauté. Ce sont des gens qu’Allah inscrit comme Martyrs et les voici martyrisés. Allah vous rassemblera un jour et l’on verra à qui sera la victoire ».
Il s’exclama alors :
« Quel assonance ! Ton père était un poète assonant. »
Zaynab (a) répondit :
« Ibn Zîyâd, de quel assonance parles-tu ? L’assonance n’est aucunement mon souci. Cela m’étonne que l’assassinat de tes Imams te soulage, alors que tu es bien conscient de leur vengeance dans l’Au-delà ».[3][4]
Références
- Ardistnî, Ahmad Sadiqî, Zaynab Qahrmãn Dukhtir Ali, p 227-228.
- Abû Mikhnaf, Waqi’at At-Taf, p 311.
- Cheikh al-Mufîd, Al-Irshâd, T 2, p 115 – 116.
- Al-Majlisî, Muhammad Baqir, Bihâr al-Anwãr, T 45, p 117.
Bibliographie
- Ibn Assakir, Arlãm Nissae, réalisation : Mohammad Abdel-Rahim, Dar Fikr, Beyrouth, 1424 H/ 2004.
- Ahmad Sadeqi, Ardestãni, Zaynab Qahramãn Dokhter Ali, Téhéran.
- Baqer Charif Qoreichi, Sayida Zaynab, Beyrouth, Dar Tara’of, 1419 H.
- Mohammad Baqer Majlissi, Bihar Anwãr, Beyrouth, Maison d’édition Al Wafãe, 3ème édition, 1403 H/ 1983.
- Abou Makhnaf, Waqirat Taf, réalisation : Mohammad Hadi Youssoufi Gharawi, Qom, Majma’ ‘Alami Ahl-Beit, 1427 H.
- Moufid, Irchad fi Ma’rifat hojaj Allah ala ‘Ibad, édition: établissement Al-Beit (a) li Ihyae Torath, Qom, 1413 H.