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Les Sources de la Législation islamique (la Shari’ah) dans les deux Ecoles
La tradition du Messager (SAW) en matière d’Al-‘Umrah
Ibn al-Qayyim dit: «Le Messager d’Allah (SAW) effectua quatre petits pèlerinages (Al-‘Umrah) après son émigration, tous dans le mois Dhu al-Qi’dah(1) , le but ayant été de faire différemment des Polythéistes qui détestaient cet acte rituel quand il était effectué en période d’Al-Haj. Cela prouve que faire Al-Umrah pendant les moins consacrés au grand pèlerinage a sans aucun doute plus de valeur que si elle était effectuée dans le moins de Rajab. (2)
La question est tranchée par le texte sacré le Coran qui dit:
«… Quiconque jouira d’une vie normale entre le petit et le grand pèlerinages, enverra l’offrande qui lui sera facile …». (V. 196/II)
Le Prophète (SAW) l’institua à son tour pendant le pèlerinage d’Adieu qu’il décida d’effectuer le mois Dhul-Qi’dah en l’an dix de l’hégire. Toute la presqu’île arabique, avec une bonne partie du Yaman avaient embrassé l’Islam. Beaucoup de monde affluèrent donc à cette époque à Médine pour assister au pèlerinage du Prophète (SAW) et le suivre dans la pratique du culte et du rituel. Les épouses, les Ahlul-Bayt (a. s.), l’ensemble d’al-Muhâjirîne et d’al-Ançar et une multitude innombrable de tribus arabes et de gens accompagnaient le Prophète (SAW) qui «était parmi nous», disait Jâbir, «et recevait la Révélation coranique dont il connaissait l’interprétation et la juste matière de l’accomplir». (3) A Wadî al-‘Aqîq (en route vers Makkah), le Prophète (SAW) dit à ‘Umar: «Il m’est révélé que “le petit pèlerinage” (Al-‘Umrah) pénètre dans Al-Haj (le grand pèlerinage) et ce jusqu’à la fîn des temps». Quand vous aurez fait la circumanbulation autour de la Maison d’Allah et entre Ad-çafâ et Al-Marwah, vous romprez votre sacralisation, si vous voulez, à moins que vous ayez amené une offrande (une bête à immoler à Minan, à la fin du rituel); dans ce cas, on ne devra pas rompre par quelque jouissance que ce soit «avant que l’offrande n’ait atteint sa destination». (V. 196/II). Dans un deuxième temps, le Prophète (SAW) réitéra l’instruction relative au petit pèlerinage (Al-‘Umrah), ‘Aïsha (r. d.) dit: «Certains de ses Compagnons se saisirent de la nouvelle loi; d’autres n’en voulurent pas». (4) D’abord à Al-‘Aqîq (il le dit à ‘Umar seulement) puis à ‘Asfân (il le dit à Surâqah), enfin à Saraf, il a transmis le contenu de la nouvelle disposition à l’ensemble de ses Compagnons. L’auteur dit à ce propos: il semble que le Prophète (SAW) a voulu faire une communication progressive de la nouvelle disposition rituelle que les Quraïshites (originaires de Makkah) jugèrent certainement comme extravagante (avant l’Islam c’était la plus abominable des perversions!)
Une fois entre As-çafâ et Al-Marwah(5), le Prophète (SAW) ne put reporter à plus tard l’ordre divin et le transmit alors ainsi à tous les pèlerins: «que celui qui n’a pas amené l’offrande convertisse son pèlerinage en ‘Umrah. Je l’aurais fait le premier si je n’avais pas apporté l’offrande. Aucune sacralisation ne pourra donc être rompue avant que l’offrande n’ait atteint sa destination». (6) Quand Surâqah lui eut demandé si Al-‘Umrah pénètre dans la période d’Al-Haj pour l’année en cours seulement ou pour toujours, le Prophète (SAW) lui répondit que ce serait pour l’éternité (2 fois).
Là, ceux qui croyaient que l’accomplissement de l’Umrah en temps du grand pèlerinage était interdit, trouvèrent ce nouvel ordre prophétique énorme et insupportable. Ils posèrent question sur question au Messager d’Allah (SAW) qui, sans relâche, leur expliquait comment ils devaient faire. «Jouissez donc de la vie normale jusqu’au jour d’At-Tarwiyah (le 8e jour Dhul-Hijjah) où vous devriez formuler l’intention d’accomplir le hadj (la sacralisation)». Certains Compagnons n’hésitèrent pas à s’exclamer devant le Prophète (SAW) en guise d’opposition: «Comment pouvons-nous jouir d’Al-‘Umrah alors que nous avons visé Al-Haj?». D’autres dirent carrément: «Il ne reste que cinq jours à la station ‘Arafah et voilà qu’il (le Prophète) nous ordonne de rompre la sacralisation, de jouir de la vie normale de toucher à nos femmes de façon à nous y rendre avec nos “sexes” mouillés!». Les dires se propageaient et le Prophète s’est mis en colère.
Chez Aïsha, il s’expliqua: «J’ai un ordre et je ne suis pas suivi (obéi)». (7)
Par après, il donna un sermon dans lequel il rappela qu’il était «le plus pieux et le plus respectueux des rites, que s’il n’avait amené l’offrande avec lui, il aurait rompu le grand pèlerinage pour entamer et achever une ‘Umrah». «Jouissez donc, touchez au parfum et aux femmes comme fond des gens en désacralisation et le jour d’At-Tarwiyah, de nouveau abstenez-vous-en pour Al-Haj». (8)
Ils n’ont aussi obéi que difficilement. Al-‘Umrah fut donc accomplie pendant la période qui était autrefois réservée au Hadj à l’exception de Aïsha qui était indisposée et qui devait, après son lavage rituel et après Al-Haj, sortir de Makkah en compagnie de son père ‘Abdurrahmân jusqu’à Tan’îm, y formuler l’intention d’une ‘Umrah et revenir l’accomplir. Ainsi, elle non plus n’aura pas singularisé Al-Haj.
Après la mort du Prophète (SAW), Abû Bakr singularisa Al-Haj (l’a fait à l’exclusion d’Al-Umrah), ‘Umar fit de même et dit: «Séparez entre le grand et le petit-pèlerinages, que la ‘Umrah soit effectuée en dehors de la période consacrée au Haj!». Quand Abû Mûssâ lui eut demandé les raisons de ce changement, il répondit (par une interprétation): le Coran dit: «complétez Al-Haj et Al-‘Umrah et dans la sunnah de notre Prophète (SAW) il n’a accompli Al-‘Umrah qu’après avoir achevé le rituel d’Al-Haj».
Abû Mûssâ n’a pas osé lui rétorquer que le Prophète n’avait agi ainsi qu’à cause des offrandes qu’il avait amenées avec lui et que le cumul des deux pèlerinages se trouve bel et bien dans le Coran. L’Imam ‘Ali, par contre, lui dit ceci: «Celui qui jouira de la ‘Umrah aura appliqué le Livre d’Allah et la sunnah de Son Messager!». Par après ‘Umar se vit obligé de déclarer ouvertement et sans détour sa position à ce sujet: «Deux jouissances étaient d’application à l’époque du Messager d’Allah et moi, je les interdis et je sanctionne à leur sujet …».
Le but était, semblait-il, d’empêcher le reste des Compagnons de suivre l’Imam ‘Ali et la tradition prophétique rapportée afin que sa position ne soit pas affaiblie. Il a aussi expliqué les raisons de sa prohibition du pèlerinage de jouissance:
«Je déteste, dit-il, que les hommes (à Makkah) jouissaient de leurs femmes sous les arbres puis allèrent en pèlerinage, les cheveux mouillés (en raison du lavage consécutif aux rapports sexuels).
Les habitants de Makkah n’ont ni troupeaux (importants) ni culture céréalière; leurs recettes ne venant que de l’apport des pèlerins (il faut donc que ceux-ci fassent le petit-pèlerinage dans une autre période de l’année pour en faire profiter les Mekkois).
On voit que les mêmes propos par lesquels on avait envisagé le Prophète lors de son institution du pèlerinage de jouissance, furent repris par ce calife quraïshite. ‘Uthmân lui emboîta le pas. Mais l’Imam ‘Ali (a. s.) afficha de nouveau son opposition et dit à ‘Uthmân: «Tu as osé prohiber une sunnah prophétique instituée au profit de pèlerins nécessiteux et des gens qui habitent très loin de Makkah! (Pour que sa défense de la sunnah ne soit pas théorique seulement). l’Imam ‘Ali (a. s.) formula sur-le-champ l’intention de cumuler la même année, Haj et Umrah; ‘Uthmân recula alors d’un pas et dit: «Je n’ai rien prohibé, ce n’était qu’une opinion personnelle que j’ai donnée!» Mais, dans une autre version ‘Uthmân dit à ‘Ali: «La fais-tu alors que je l’interdis?» L’Imam (a. s.) répondit: «Oui, je n’aurais pu délaisser une sunnah du Messager d’Allah pour suivre les paroles de personne d’autre». (9)
Mais aux yeux de ‘Uthmân, les Compagnons qui avaient cumulé avec ‘Ali les deux pèlerinages n’avaient pas la même immunité que lui. Aussi les condamna-t-il à être frappés et rasés!
A l’époque de Mu’âwiyah, Sa’d lui dit: «certes, le pèlerinage de jouissance est une belle et bonne chose!». Mu’âwiyah lui répliqua: «’Umar la prohibait».
Le même argument sera donné un jour par le général des forces “spéciales” de Mu’âwiyah Ad-Dahâk qui dit: «N’accomplit le pèlerinage de jouissance que celui qui ignore l’ordre d’Allah». Comme argument, il dit simplement: «’Umar l’a interdit». On rapporte aussi que Mu’âwiyah fit fabriquer un récit qui imputait au Prophète (SAW) l’interdiction de pratiquer Al-‘Umrah en temps d’Al- Haj. Malgré l’opposition des autres Compagnons, Mu’âwiyah, y insistait.
Le terrorisme était à cette époque si dur qu’un Compagnon comme ‘Imrân b. Huçayn, garda le silence à ce sujet jusqu’à la fin de sa vie. A quelqu’un qui lui avait juré de ne rien dire s’il devait rester encore en vie, ce Compagnon lui dit que le Prophète (SAW) avait effectivement cumulé les deux pèlerinages et prohibé de le faire. Aucun verset abrogeant ne fut descendu par après pour changer ce jugement. Seulement, quand le Prophète (SAW) est mort, un homme a donné à ce sujet une opinion personnelle. (10)
De ce qui précède, nous constatons que cette époque fut caractérisée par deux choses:
a)- La tradition de ‘Umar était prise comme un culte à suivre et à faire respecter (le propos de Mu’âwiyah et de son général Ad-Dahâk).
b)- L’invention des hadîths pour consolider la position de ‘Umar et sa tradition.
Cela a perduré après l’époque de Mu’âwiyah. A Makkah, par exemple, les fils d’Az-Zubayr (Abdullah et ‘Urwah) interdisaient aux gens d’accomplir le pèlerinage de jouissance en temps d’Al-Haj alors qu’Ibn Abbâs la leur recommandait. Quand les partisans de l’Ecole des califes lui eurent dit: «Jusqu’à quand continueras-tu à égarer les gens en les incitant à accomplir Al-‘Umrah en période d’Al-Haj alors qu’Abû Bakr et Umar l’on interdit?» Ibn ‘Abbâs dit: «Je crois qu’ils vont périr. Je leur annonce: le Prophète dit (ceci ou cela) et eux me disent: Abû Bakr et ‘Umar ont interdit…».
On en venait même aux disputes et aux insultes – ‘Urwah, alors, inventa un hadîth qui fit dire au Prophète (SAW) l’ordre de singulariser (faire uniquement) Al-Haj lors du pèlerinage d’Adieu. Comme références, il cita sa mère et sa tante mais celles-ci dirent: nous avons accompli la ‘Umrah lors du pèlerinage d’Adieu.
Après ‘Urwah, d’autres inventions de hadîths virent le jour, imputés à ‘Ali b. Abî Tâlib, à Abû Dhar qui auraient dit que l’accomplissement d’Al-‘Umrah était l’apanage des Compagnons du Prophète (SAW).
Malgré cet acharnement à agir contre cette sunna du Prophète, les curs des gens s’y attachaient non parce qu’ils ne voulaient pas suivre la sunnah de ‘Umar mais parce qu’ils ne pouvaient pas le faire: tous les Musulmans ne sont pas à même de se rendre du fin fond du monde islamique à Makkah, deux fois par an, une pour le Haj et l’autre pour la ‘Umrah … (11)
(Questions d’Al-Khurasânî adressées à Hassan Al-Baçrî, et celles adressées à Mujâhid). Ainsi la sunnah de ‘Umar s’effrita sous le coup de la réalité vécue par les pèlerins – on disait jadis: «Si tu veux qu’on ne t’obéisse pas, demande alors ce dont on n’est pas capable!». Certains Musulmans qui ne pouvaient faire le Haj en exclusivité, délaissèrent donc tout à fait l’ordre de le “singulariser”. D’autres firent l’amalgame des deux pèlerinages sans rompre leur sacralisation, d’autres en fin, comme les Hanbalites, ignorèrent tout à fait l’innovation de ‘Umar. Toutefois, les Musulmans n’ont jamais négligé à travers les siècles, de justifier les actes des califes, de rapporter des récits à partir du Prophète (SAW) de sa famille et de ses Compagnons pour soutenir l’opinion des califes et par-là même leur politique. Quand ils ont frappé, c’était pour éduquer (leurs sujets). Quand cela aboutit à l’erreur, cela rentra sous la rubrique de l’Ijtihâd. Enfin, on arrive à ceci: Allah dit, le Messager dit, ‘Umar ijtahada, toutes, des locutions qui comportent des décisions législatives islamiques!!!
Exemple et enseignement
Malgré l’accomplissement du pèlerinage de jouissance par plus de soixante-dix mille pèlerins qui n’ont pas seulement entendu le Prophète (SAW) le leur recommander mais l’ont mis en pratique sous ses yeux et sa vigilance, le calife ‘Umar a réussi à l’interdire aux Musulmans et à sanctionner ceux qui osèrent déroger à son ordre.
Le soutien qu’il avait obtenu auprès des Compagnons et des Tâbi’îne qui n’ont pas hésité à inventer des récits selon lesquels le Prophète (SAW) aurait interdit comme ‘Umar, la ‘Umrah en temps du Haj, constitue un exemple (éloquent) des autres lieux de leur Ijtihâd en opposition avec les textes sacrés (le Coran et la sunnah) et de l’obéissance qu’ils ont eue des Compagnons et des Tâbi’îne. Pour nous il y a là un enseignement précieux: comme les motivations qui poussaient les califes à supprimer le pèlerinage de jouissance étaient moins fortes que celles relatives à la prise du pouvoir, il n’était donc pas anormal qu’ils s’opposaient au Messager (SAW) quant à la désignation de l’Imam ‘Ali (a. s.) à la succession le Jour de Ghadîr Khum!!!
B- Le mariage de jouissance
Les récits ont été successivement rapportés au sujet de l’interdiction du pèlerinage de jouissance et du mariage de jouissance par le calife ‘Umar. (12) Il s’agit à présent d’étudier la prohibition du mariage temporaire, ses raisons et l’Ijtihâd à ce propos. L’Ecole des califes définit ce mariage comme suit: «C’est le contrat établi par un homme et une femme afin de se marier, en présence de deux témoins et après autorisation du tuteur matrimonial (walî) pour une durée déterminée. Après cette durée, l’homme n’aura aucun droit sur elle. Elle sera assujettie au délai de viduité. L’enfant né de ce mariage est sans aucun doute de filiation reconnue. Sa retraite légale est d’un flux menstruel. Entre les deux, le droit successoral n’est pas d’application. Si après la durée de ce mariage, ils voulaient renouer, il devra lui verser un nouveau douaire».
L’Ecole d’Ahlul-Bayt définit le mariage de jouissance comme suit: «C’est le contrat par lequel une femme se marie à un homme ou la lui marie son mandataire ou son tuteur (walî) si elle était mineure. Ne sera licite que s’il n’a y a pas d’empêchement par la parenté, par l’alliance par le lait, par le délai ou par engagement matrimonial précèdent: à condition de verser un douaire à la femme et de préciser la durée de l’union conjugale. Après celle-ci (ou si le mari fait grâce de ce qui en reste) les liens du mariage se rompent (automatiquement). Après la séparation, la femme doit respecter un délai de viduité de deux flux menstruels en cas de consommation du mariage et si la femme n’a pas atteint la ménopause. Si la femme connaît le flux menstruel, le délai de viduité sera de quarante cinq jours. Si le mariage n’est pas consommé, le cas sera comme celui de la femme répudiée avant la consommation du mariage, c’est à dire que la femme ne sera pas assignée à un délai de viduité. L’enfant né du mariage temporaire a le même statut que l’enfant né du mariage permanent».
Le mariage de jouissance dans le Livre d’Allah
Allah gloire à Lui dit: «Versez le douaire prescrit aux femmes dont vous avez joui …». (V. 24/IV)
Dans le Muçhaf d’Ibn ‘Abbâs, où il avait à côté du Coran, le commentaire ou le Tafsîr choisi: «… aux femmes dont vous avez joui pour une durée déterminée». L’ont lu ainsi, en plus d’Ibn ‘Abbâs, Ubayd b. Ka’b, Sa’îd b. Jubayr et As-Suddîy et l’ont rapporté d’eux Qatadah et Mujâhid». (13)
Le mariage de jouissance dans la sunnah
‘Abdullah b. Mas’ûd, Jâbir, Salamah b. al-Akwa’, Sabrah, Al-Juhnîy, Abû Sa’îd al-Khudrî, tous rapportèrent les hadîths relatifs à l’autorisation du mariage temporaire par le Prophète (SAW).
Jâbir précise l’évolution de l’affaire: «Nous avons pratiqué la mut’ah en échange d’un bien (dattes ou farine) à l’époque du Messager d’Allah, d’Abû Bakr et de ‘Umar. Mais ce dernier vers la fin de son califat la prohiba suite à un mariage de jouissance contracté par ‘Amru b. Hurayth, qui a abouti à la grossesse de l’épouse». (14)
La même histoire est racontée sur le compte de ‘Amru b. Hawshab qui l’avait contracté sans avoir fait assister de témoins. Ce mariage, par l’interdiction de ‘Umar, devient alors illicite dans la société islamique.
Mais ‘Umar persista et signa. Le prouve cette conversation entre ‘Umar et ‘Imrân b. Sawâdah qui raconte:
– Naçihah (un bon conseil)! Lui proposai-je.
– Bienvenue au conseiller! Vas-y.
– Ta Communauté te reproche d’avoir interdit la ‘Umrah en temps du Haj alors que le Messager d’Allah ne l’avait pas fait ni Abû Bakr.
– Oui, mais s’ils voyaient que cela suffisait comme ‘Umrah, alors Makkah resterait vide de ses pèlerins!
– On dit aussi que tu as rendu illicite le mariage de jouissance alors que c’était une grâce d’Allah, en échange d’une poignée de dattes (par exemple) on se marie et au bout de trois jours on se sépare!
– Oui, le Prophète l’avait autorisé en un temps de nécessité. Après, les gens sont entrés dans l’aisance. Aujourd’hui celui qui veut le faire qu’il le fasse mais il doit le finir par un divorce.
L’auteur dit: est-il convenable (en Islam) qu’on rend illicite ce qu’Allah a permis en temps du pèlerinage pour la simple raison que Makkah manquerait de pèlerins le reste de l’année?!
De même, (le Prophète (SAW) avait institué le mariage de jouissance en une période de voyage) était-il nécessaire à l’époque du Prophète seulement? Que ferait alors l’homme qui, dans d’autres temps, passait des mois voire des années en voyage? Et l’homme qui ne peut contracter un mariage permanent dans son pays, s’opposerait-il à ses instincts ou bien violerait-il la loi de la société en secret ou encore celle-ci lui permettrait de recourir carrément à la fornication (zina)?
Quand ‘Umar dit: «Oui, qu’il le fasse mais que cela finisse par un divorce, si les deux conjoints s’étaient ainsi mis d’accord (la séparation après 3 jours) c’est bel et bien un mariage de jouissance; si, par contre, seul l’époux avait eu l’intention de se séparer avec la femme après un certain temps passé avec elle, cela s’appellerait: trahison envers la femme. Or l’Islam condamne la trahison».
Cette conversation qu’avait eue le calife ‘Umar, ses autres interventions au sujet du mariage de jouissance, les récits rapportés par les Compagnons à partir du Messager d’Allah (SAW) confirment la légalité d’Al-Mut’ah pendant l’époque du Prophète, d’Abû Bakr et de ‘Umar, prouvent que les narrations postérieures à partir du Prophète (SAW) qui aurait interdit le recours au mariage temporaire, ont été inventées après le califat de ‘Umar qui aurait, si ces hadîths avaient été connus à son époque, argué de leur contenu pour soutenir sa thèse.
C’était donc ‘Umar et non le Prophète (SAW) qui l’avait prohibé. D’où cette affirmation célèbre rapportée à partir de ‘Ali et d’Ibn ‘Abbâs: «Si ‘Umar ne l’avait pas interdit, n’aurait commis l’adultère qu’un misérable». C’est pour cela qu’après le Messager d’Allah, des Compagnons sont restés fidèles au caractère licite du mariage temporaire: ‘Ali, Ibn Mas’ûd, Ibn ‘Abbâs, Asmâ’, Abû Sa’îd al-Khudrî, Jâbir, Salamah et Ma’bad fils d’un Umayyade, Mu’âwiyah et ‘Imrân b. al-Huçayn. Parmi les Tâbi’îne: Tâwûs, ‘Atâ, Sa’îd b. Jubayr et les juristes de Makkah et du Yaman. Ceux qui optèrent, par contre, pour l’opinion de ‘Umar, ils se sont accrochés aux récits inventés sur le compte du Prophète (SAW) et à l’Ijtihâd de ‘Umar devenu pour eux un véritable culte.
Ainsi les actes des Compagnons qui ont fait preuve d’Ijtihâd ou d’interprétation furent érigés en sources de législation islamique. D’où cette contradiction courante entre des hadîths se rapportant au même sujet: des récits disent par exemple que le Prophète n’a fait durant le pèlerinage d’Adieu que le Haj; d’autres disent qu’il ordonna à ses Compagnons d’accomplir le pèlerinage de jouissance …
La raison de cette contradiction devient claire: certains hadiths furent inventés pour soutenir la position des califes en opposition avec ceux du Prophète (SAW). D’où cette règle (admise dans l’Ecole d’Ahlul-Bayt) qui stipule ceci: chaque fois qu’on se trouve devant deux hadîths contradictoires, il faudra mettre à l’index celui qu’on trouve conforme à l’opinion du pouvoir politique en place.
7- L’Ijtihâd durant et après le deuxième siècle de l’hégire; la déduction des lois à partir des actes des Compagnons
Après avoir défini l’Ijtihâd, Ad-Dawâlibî(15)dit que les Compagnons y recouraient chaque fois qu’ils ne trouvaient pas de disposition coranique ou prophétique relativement au sujet traité. En faisant de l’Ijtihâd, les Compagnons ne se basaient pas sur des règles précises ou des critères connus. Ils partaient seulement de l’esprit des lois qu’ils avaient … Cette connaissance implicite (intuition?) ne sera pas partagée entièrement par ceux qui viendront après eux. Alors l’Ijtihâd connut une évolution sensible … en rapport avec le milieu social du Mujtahid. D’où les controverses scientifiques en matière de législation au fur et à mesure qu’on s’éloignait de l’époque de la Révélation. Les spécialistes en la matière s’attelèrent alors à la formation des règles de l’Ijtihâd, une science appelée Uçul al-Fiqh. L’existence de ces règles dans le cadre de cette nouvelle science caractérise l’Ijtihâd durant le deuxième siècle de l’hégire. Avant, seul le goût sain du juriste (l’esprit scientifique) lui faisait découvrir les secrets de la Shari’ah. Cet esprit des lois, était le seul critère(16) dans ce domaine.
Le même auteur dit que les sources du jugement (Shar’î) reconnues par le Coran sont:
1- Le Coran.
2- La sunnah (prenez ce que le Messager vous donne)
3- Al-‘Ijmâ (le consensus)
4- L’Ijtihâd (l’effort de déduction et d’interprétation).
Leurs arguments pour fonder l’Ijtihâd
a- Le récit de Mu’âdh
Ad-Dârimî (Sunan) rapporte ce récit: quand le Prophète (SAW) voulut envoyer Mu’âdh au Yaman il lui demanda:
– Comment vas-tu statuer?
– En me basant sur le Livre d’Allah, répondit Mu’âdh
– Si tu n’y trouves pas ?
– Je me référerai alors à la sunnah du Messager d’Allah (SAW)
– Si tu n’y trouves pas non plus?
– Ajtahidu, je ferai des efforts de mon mieux (pour trouver le jugement adéquat).
Alors le Prophète (SAW) tapa sur ma poitrine et dit: «Louange à Allah qui guida l’émissaire du Messager d’Allah (SAW)». (17)
b- Le récit de ‘Amru b. al-‘As
Al-Bukhârî, Muslim et Ahmed rapportent à partir de ‘Amru que le Messager d’Allah dit: «Si le juge fait un effort d’interprétation (ijtahada) et que son Ijtihâd s’avère juste, il aura droit à une double rétribution; si par contre, il s’y est trompé, il n’en aura droit qu’à une seule». (18)
c- La lettre de ‘Umar b. al-Khattâb, adressée à Abû Mûsâ al-Ash’arî
Dans cet écrit, il est dit: «D’abord comprends bien ce qui se meut dans ton esprit, ce que tu ne trouves pas relaté par le Livre et la sunnah. Ensuite, par analogie, fais les déductions nécessaires …». (19) Ce sont les principaux arguments avancés par les partisans de l’Ijtihâd; les autres ne méritent pas d’être discutés en raison de la faiblesse de la chaîne de transmission et de son incompatibilité avec le sujet traité.
Pour ce qui est du récit imputé à Mu’âdh, Ibn Hazm l’a jugé ainsi:
«Il n’est pas licite de le présenter comme argument à cause de sa chute (sic) car il ne fut rapporté que par l’intermédiaire d’Al-Hârith b. ‘Amru; or ce dernier est inconnu. Al-Bukhârî dit dans son Târikh al-Awçat: «On ne connaît Al-Hârith que par la narration de ce récit et il n’est pas authentique». Ensuite Al-Hârith rapporta des hadiths à partir des hommes habitant Hims, inconnus à leur tour. Ce hadîth ne fut pas connu des Compagnons qui n’en ont jamais parlé, ni à l’époque des Tâbi’îne. Quand Abû ‘Awn l’eut pris d’on ne sait qui, les partisans de l’opinion personnelle dans l’Ijtihâd le trouvèrent chez Shu’bah – et s’envolaient avec dans tous les airs et le diffusèrent partout dans le monde alors qu’il est faux et sans fondement». (20)
Ensuite, dit-il, ce qui prouve que c’est un récit faux, cette vérité claire et nette que le Messager d’Allah (SAW) ne put en aucun cas dire: «Si tu ne trouves pas dans le Livre d’Allah ni dans la sunnah de Son Messager» alors que son Seigneur lui dit: «Suivez ce qui est descendu sur vous, de la part de votre Seigneur». (V. 3/VII)
«Aujourd’hui, J’ai rendu votre Religion parfaite…» (V. 3/V), et cet autre verset: «… Celui qui transgresse les lois d’Allah se fait tort à lui-même». (V. 1/LXV)
En plus, de par la tradition du Prophète (SAW) il est illicite d’introduire l’opinion dans le domaine religieux.
Même en supposant que ce récit est authentique, “Ajtahidu …” de Mu’âdh signifierait: je continuerai à faire des efforts jusqu’à ce que je trouve la vérité dans le Coran et la sunnah …
En parlant du récit rapporté par ‘Amru b. al-‘As, Ibn Hazm dit: «Ce récit est un argument qui va à leur encontre car il stipule que le juge vise juste et se trompe. Donc il est illicite de juger en matière de religion en raison de l’erreur (qui pourrait s’y glisser). Jamais Allah n’a permis le passage (l’acceptation) de l’erreur dans le jugement. Leur attachement à ce hadîth est donc nul». (21)
Après avoir rapporté la lettre de ‘Umar, susmentionnée, par le biais de deux chaînes de transmission, Ibn Hazm dit: ce récit n’est pas authentique car dans la première chaîne il y a ‘Abdul Mâlik b. al-Walîd b. Ma’dân et c’était, chez tous, un Kufî’ ayant des hadîths délaissés et il était de père inconnu. Pour ce qui est de la deuxième chaîne, entre Al-Karjî et Sufiân, le rapporteur est inconnu. Le récit souffre aussi d’une rupture dans sa narration. Il est nul comme argument. (22)
Notre discussion de leur propos sur l’Ijtihâd
Au premier siècle de l’hégire, l’Ijtihâd était compris dans son sens propre qui veut dire dans la langue arabe: fournir l’effort dans une question donnée. Les hadîths de Mu’âdh et Ibn al-‘As comportent le terme d’Ijtihâd utilisé dans son sens premier.
Ensuite le contenu des deux hadîths est hors propos. Ils traitent de la question du jugement en justice et non de la qualité de légiférer chez les Mujtahidîne. On peut dire la même chose de la lettre de ‘Umar et des autres arguments avancés qui, malgré le caractère apocryphe de leur origine, traitent de la justice à émettre et non de la législation à déduire.
Même en matière de justice, les deux hadîths ne supportent pas l’argumentation voulue. Que signifie le hadîth de Mu’âdh, par exemple?: les lois islamiques dans le Livre d’Allah et dans la sunnah sont de deux sortes: il y a celles qui se trouvent dans le Livre et/ou la sunnah d’une façon explicite ou même détaillée et d’autres qui s’y trouvent aussi mais contenues dans un principe global qu’il incombe au juge de découvrir et d’expliciter en fournissant l’effort nécessaire pour y parvenir.
La manière dont les savants de l’Ecole des califes présentent leur argumentation prouve qu’ils croient en l’existence d’un manque ou de lacunes dans la législation islamique transmise par le Messager. Cet état de choses nécessite chez eux le recours des juges et des juristes au droit de légiférer dans des domaines négligés par la Shari’ah.
La déduction des règles juridiques à partir des actes des Compagnons
L’Ijtihâd dans l’Ecole des califes, est de trois sortes:
1- L’explication des textes du Livre et de la sunnah.
2- Juger par analogie aux jugements qui se trouvent dans le Livre et la sunnah.
3- L’opinion personnelle (du Mujtahid) qui ne repose pas sur un texte particulier mais seulement sur l’esprit de la Shari’ah – qui se trouve infuse dans l’ensemble de ses textes et sur l’esprit de l’utilité selon leur adage: «Le but de la shari’ah – est de servir l’intérêt général; là où ce but se trouve atteint, réside en fait la Shari’ah d’Allah» et cet autre principe: «Ce que les Musulmans trouvent bien, il est bien auprès d’Allah aussi».
L’auteur cite Ad-Dawâlibî (Al-Madkhal Ilâ ‘Ilm Uçul al-Fiqh) dans son exposé sur les règles des fondements de la jurisprudence dans l’Ecole des califes: Al-Ijmâ’, Al-Qiyâs, Al-Istihsân, Al-Istiçlâh. Il parla aussi du changement introduit dans la loi à cause de l’évolution des temps, citant Ibn al-Qayyim (A’lâm al-Muwaqqi’îne) qui après avoir exposé les questions à propos desquelles ‘Umar b. al-Khattâb s’était opposé aux textes divins, prétendit que ‘Umar, en vertu de la règle précédente (le service de l’intérêt général) se permit de changer la loi (la répudiation par trois fois introduite par ‘Umar, par exemple).
En guise de conclusion, l’auteur dit ceci: ainsi toutes les règles de l’Ijtihâd dans l’Ecole des califes convergent vers la considération de l’opinion personnelle. En plus, celle-ci prime parfois dans cette Ecole sur le texte divin (Shar’î). L’imam de l’Ecole d’Ar-Ra’y (l’opinion personnelle) déclarait souvent que son avis personnel avait la primauté sur le hadîth prophétique.
L’imam des Hanafites et le recours à l’opinion personnelle
Al-Khatîb al-Bagdâdî rapporte (dans Târîkh Bagdad) à partir de Yûsuf b. Asbât: «Abû Hanîfah dit: «si le Messager d’Allah était resté en vie jusqu’à mon époque ou si moi j’avais été à la sienne, il aurait pris beaucoup de mes propos et décisions; la religion est -elle autre chose que la bonne opinion?». (23)
‘Ali b. ‘Açim rapporte ceci: «Nous avons proposé un hadîth à Abû Hanifah mais ce dernier dit: «je n’en veux pas du Prophète?». «Non, je ne le prends pas, répéta-t-il.
Les récits d’Abî Ishâq al-Fizârî; de Hammâd b. Salamah, de Wakî’ et de Çâlih al-Farrâ’ vont dans le même sens. (24)
L’auteur, ensuite, cita les récits dans lesquels Abû Hanîfah donna des avis religieux en opposition avec les hadiths prophétiques.
Nous avons revu les livres de hadiths les plus sûrs et nous trouvâmes que ces hadîths étaient effectivement rapportés à partir du Prophète (SAW). Ensuite nous avons revu les Fatwa (avis religieux, décisions) d’Abû Hanifah et nous trouvâmes qu’il avait effectivement émis des avis en opposition avec ces hadîths:
Al-Bukhârî et d’autres traditionnistes rapportent ceci: «Le Messager d’Allah donna au cheval deux parts (du butin) et en donna une à son maître».
Abû Hanîfah voit autrement la chose selon Ibn Rushd (Bidâyatul-Mujtahid) (25): «Le Messager d’Allah égratigna les offrandes (chameaux et chamelles) sur la bosse droite».
Ce hadith est rapporté dans les livres d’Al-Bukhârî (Livre du pèlerinage, chap. 51), de Muslim (h/ 205) d’At-Tirmidhî (Sunan, 64), d’Ibn Mâjah (Sunan, 96) d’Ad-Dârimî (Sunan,68), d’Ahmed (Al-Musnad, 1/216-254-280-334-339-347-372).
Or, dans Al-Muhallâ, Abû Hanîfah dit: «Je n’aime pas Al-Ish’âr (qu’on blesse l’animal; c’est une torture!). Ibn Hazm dit: «Ceci est une calamité qu’on critique un acte accompli par le Prophète!». (26)
Tant qu’elles ne se séparent pas, les parties contractantes gardent le choix(27) (de rompre ou de signer l’accord). Abû Hanifah, Malik et ceux qui les ont suivis dirent: «La vente s’accomplit par la parole même s’ils (les contractants) ne se séparent pas, de leurs corps …». (28)
L’auteur expose ensuite cinq autres exemples où Abû Hanifah donna des Fatwa (avis) en opposition avec les hadîths prophétiques (chaussures du pèlerin, loi du talion, les ablutions etc.).
Peut-être les hadîths transgressés par Abû Hanifah et les autres Mujtahidîne dépassent-ils deux cents ou quatre cents comme l’a indiqué l’auteur de Târikh Bagdad. Mais le plus grave reste le fait qu’ils se sont forgé des règles d’Uçul comme Al-Qiyâs (déduire par analogie) l’Istihsân (trouver bon, mieux) et Al-Maçâlih Al-Mursalah (trouver intéressant …) par les portes desquelles, ils légiféraient en conformité ou en opposition avec le Livre et la sunnah. C’est ainsi qu’ont évolué les lois islamiques dans l’Ecole des califes à tel point qu’elles sont toutes imputées à la Shari’ah. D’où cette croyance répandue chez les adversaires de l’Islam et chez certains Musulmans(29) que l’Islam était incomplet à l’époque du Messager et qu’il s’est perfectionné dans son évolution après lui (l’exemple de l’orientaliste juif: Goldzïher dans son livre: l’évolution de la foi et de la shari’ah en Islam).
La considération de l’opinion personnelle dans la législation Shar’î a conduit certains Mujtahidîne au sein de l’Ecole des califes à forger au nom des ruses juridiques des lois singulières qu’aucun code sur terre n’admet et qui font rougir de honte. (30)
Plus grave encore est la fabrication de hadîths élogieux de ces Mujtahidîne, imputés au Messager d’Allah (SAW), comme celui rapporté par Al-Khatîb à partir d’Abû Hurayrah citant le Prophète (SAW): «Viendra dans ma Communauté un homme appelé An-Nu’mân dont le surnom est Abû Hanîfah. Il est le flambeau de ma Communauté, il est le flambeau de ma Communauté (3fois)». (31)
Que dis-je alors? Que le roi Adh-Dhâhir Beybars al-Bandaqdârî, le Mamlûkî d’Egypte a rendu un service bienfaiteur à l’Islam quand il avait fermé la porte de l’Ijtihâd en l’an 665 de l’hégire ou non? (32)
En tout cas, l’Ijtihâd c’est à dire le recours à l’opinion personnelle fut ouvert dans l’Ecole des califes par le pouvoir en place à l’époque des califes “bien guidés”, Râshidîne, et fermé par après et jusqu’à nos jours, par l’Autorité politique dirigeante.
Quant aux partisans de l’Ecole d’Ahlul-Bayt, ils ont donné – suite à leurs Imams (a. s.) – le nom d’Al-Fiqh à cette science de la recherche juridique et celui d’Al- Faqîh (le docte) au jurisconsulte qui s’y spécialiste. Ainsi, Al-Kishî (dans Ma’rifatu-Ar-Rijâl) dit: les Fuqahâ’ (pluriel de Faqîh) parmi les Compagnons d’Abî Ja’far et d’Abî ‘Abdillah (a. s.) … les plus versés dans Al-Fiqh parmi les prédécesseurs sont Zurârah, Ma’ruf b. Khurbûdh, Barîd al-‘Ajlî, Abû Baçîr al-Asadî, Al-Fudayl b. Yasâr et Mohamed b. Muslim At-Tâ’ifî … (33)
Il (Al-Kishî) dit aussi: «Les noms d’Al-Fuqahâ’ parmi les compagnons d’Abî ‘Abdillah (a. s.)… (34)
Sheikh As-Çadûq (m. en 381 h.) composa la première encyclopédie juridique dans l’Ecole d’Ahlul-Bayt, basée sur le hadîth et appelé: “Faqîh man Lâ Yahduruhul-Faqîh“.
Son élève, Sheikh Al-Mufîd (mort en 413 h.) composa Uçul al-Fiqh. Tout le monde savait que les Fuqahâ’ (jurisconsultes) dans l’Ecole d’Ahlul-Bayt ne donnaient pas le nom d’al-Ijtihâd au Fiqh.
Ainsi Sheikh At-Tûsî dit au début de son livre Al- Mabsût: «Certes, je continue à entendre nos adversaires dire … celui qui rejette Al-Qiyas et Al-Ijtihâd n’a plus de moyen pour cerner les questions juridiques …».
Néanmoins, la terminologie: Ijtihâd, Mujtahid a trouvé son chemin dans les livres de ‘Uçul al-Fiqh au sein de l’Ecole d’Ahlul-Bayt et dans les licences accordées par les Shwyûkh (pluriel de Sheikh) à leurs élèves dans le domaine de la narration des hadîths.
D’abord la licence était accordée par le professeur à son élève suite à la narration des hadîths rapportés à partir des Ma’çûmîne (les Infaillibles). (35)
Ensuite l’octroi de la licence connut une certaine évolution: l’élève qui aura lu et rapporté les livres du hadîth devant son sheikh ou qui les aura entendu lire par lui aura sa licence.
Par après la licence comporta la capacité de rapporter les livres de hadîth ou d’autres sciences que l’élève eut lus devant son sheikh.
Dans le huitième siècle certaines licences présentaient les savants comme Mujtahidîne à l’instar de ce qui fit Ibn al-‘Allâmah al-Hillîy quand il décrivit son père ainsi: «Mon père Sheikhul-Islam, imam des Mujtahidîne» (36) et quand il fut lui-même décrit comme: «Sheikhul al-Mawlâ, l’imam Al-‘Allâmah, Khâtamul-Mujtahidîne» par ‘Ali An-Nilûy dans la licence accordée à Ibn Fahd. (37)
Enfin, dans certains licences, il fut dit dans l’attestation délivrée au lauréat qu’il était parvenu au garde de l’Ijtihâd comme l’a écrit Al-Majlisî Mohamed Bâqir en 1085 h. en faveur de son petit-fils Al-Khawâtûn Abâdî suite à la narration de ses uvres par ce derniers. (38)
Dans ces derniers temps, les Fuqahâ’ de l’Ecole d’Ahlul-Bayt délivrent parfois des attestations particulières à leurs élèves qui sont parvenus au garde de Mujtahid.
Ainsi ces termes (Ijtihâd et Mujtahid) sont passés dans la coutume de l’Ecole d’Ahlul-Bayt. Mais seul le nom est commun dans l’usage de ces termes par les deux Ecoles respectées. Pourtant (à cause de l’allergie ressentie à l’égard de ces termes) Al-Ikhbâriyyûn (les traditionnistes) parmi les partisans de l’Ecole d’Ahlul-Bayt en condamnèrent l’usage alors que le contenu, suivant qu’on est de ce côté ou de l’autre, est différent.
Comme les Fuqahâ’ dans l’Ecole d’Ahlul-Bayt ne reposent sur aucun des fondements juridiques inventés par les partisans de l’Ecole des califes, ils comptent pour la déduction des lois sur le livre d’Allah et sur la sunnah de Son Messager (SAW).
Notes:
- Ibn al-Qayyim, Zâd al-Ma’âd, 1/209; Al- Bukhârî, Sahîh, 1/212; Muslim, op. cit., h/ 217-220, pp. 916-917; Al-Bayhaqî, As-Sunan al-Kubrâ, 4/357, 5/10-12
- Ibn al-Qayyim, Zâd al-Ma’âd, 1/211 et p. 223; Al-Bayhaqî, Sunan, 4/345
- Zâd al-Ma’âd 2/213.
- Al-Bukhârî, Sahîh, 1/186, Abî Dâwûd, Sunan, “Al-Manâsik” 2/159; Al-Bayhaqî, Sunan, 5/13-14 etc.
- Al-Bayhaqî, Sunan, 5/6.
- Al-Bukhârî, op. cit., 1/189; Al-Bayhaqî, Sunan, 5/6, 4/356
- Ibn Mâjah, Sunan, p. 993; Ahmed, op. cit., 4/286
- Ibn al-Qayyim, Zâd al-Ma’âd, 1/246
- Al-Bukhârî, Sahîh, 1/190; An-Nasâ’î, Sunan, 2/15
- Muslim, Sahîh, p. 899, h/ 166, 168, 169
- Ibn Hazm, Al-Muhallâ, 7/103
- Nous avons mentionné au début de l’exposé sur Mut’at al-Hajj certaines références de ce récit, et nous y rajoutons ici ce qui suit: Tafsîr al-Qurtubî, 2/388; Tafsîr al-Fakhr al-Râzî, 2/167 et 3/201-202; Kanz al-‘Ummâl, 8/293-294; Al-Bayân wa-l-Tibiyân, d’Al-Jâdidz, 2/223.
- Ibn Kathîr, Tafsîr, 1/474.
- Muslim, Sahîh, p. 1023, h/ 1405
- Mohamed Ma’rûf Ad-Dawâlibî, Al-Madkhal Ilâ ‘Ilm Uçul al-Fiqh, éd. Dar Al-‘Ilm, Beyrouth 1385 h.
- Ad-Dawâlibî, op. cit., pp. 14-17.
- Ad-Dârimî, Sunan, “Al-Muqaddimah”; Ahmed, Al-Musnad, 5/230, 276
- Al-Bukhârî, Sahîh, 4/178; Muslim, Sahîh, p. 1242, h/ 15; Ibn Mâjah, Sunan, h/ 2314; Ahmed, Al- Musnad, 2/187, 4/198, 204, 205
- Ibn Hazm, Al-Ihkâm, 5/1003; Ibn al-Qayyim, A’lâm al-Muwaqqi’îne, 1/85-86
- Ibn Hazm, Al-Ihkâm, 5/773-775
- Ibn Hazm, Al-Ihkâm, 5/771
- Ibn Hazm, Al-Ihkâm, 5/1003; Ibn al-Qayyim, A’lâm al-Muwaqqi’îne, 1/85-86
- Al-Khatîb, Târîkh, p. 390; Ibn Hibbân al- Bustî (mort en 354 h.), Kirâb al-Marûhîne, 3/35
- Ibid
- Al-Bukhârî, Sahîh, “Livre du Jihâd”, 2/99, 3/63; Muslim, Sahîh, “Le partage du butin”, h/ 57; Abû Dâûd, Sunan, chaps. 143-147; Al-Muwatta’, “Livre du Jihâd”, 21; Ahmed., op. cit., 2/2, 62, 80, 4/138
- Ibn Hazm, Al-Muhallâ, 7/111.
- Ibn Hazm, Al-Muhallâ, 7/111
- Al-Bukhârî, Sahîh, “Livre des ventres”, chap. 19, 22, 42; Muslim, Sahîh, h/43, 46, 47; Abû Dâûd, Sunan, 51; At-Tirmidhî, Sunan, “Livre du commerce”, 17; Ahmed, op. cit., 1/216, 254, 280, 334, 339 etc.
- Ibn Hazm, Al-Muhallâ, 8/351, 352, “La question”, no 1417.
- Voir, Ibn Hazm, Al-Muhallâ, 11/251, 257, “La question”,
no 2213 (la prostituée salariée).
- Al-Khatîb al-Baghdâdî, Tarîkh Baghdâd, 13/335.
- Al-Maqrîzî, Khitat, 4/161
- Al-Kishî, Rijâl, p. 238 et p. 431 (L’appellation Al-Fuqahâ’)
- Al-Kishî, Rijâl…, p. 275, no 705.
- Voir à la fin de ce livre le chapitre relatif aux des chaînes des transmissions des Cheikhs remontant aux Infaillibles dans l’Ecole d’Ahl-ul-Bayt (p)
- Idem.
- Al-Majlisî, Al-Bihâr, 107/215-216
- Al-Majlisî, Al-Bihâr, 105/29