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Les causes historiques de la polygamie (II)
Le désir de l’homme de jouir du plaisir sensuel et sa domination sur la femme ne constituent pas une cause suffisante pour l’émergence de la polygamie. Il doit y avoir d’autres raisons qui y ont contribué. Car, pour un homme licencieux, rien n’est plus facile que d’avoir des liaisons passagères avec des amantes et de profiter de la liberté sexuelle pour satisfaire ses désirs, car cela lui évite les responsabilités qu’entraînent le lien du mariage et la naissance des enfants qui s’ensuit.
C’est pourquoi, dans les sociétés où le système de la polygamie prévaut, soit ce sont les valeurs morales et sociales qui se dressent comme obstacle devant le désir d’un homme qui cherche la variété et la jouissance passagère avec des amantes, et l’obligent par conséquent à payer le tribut de sa gourmandise sexuelle par l’acceptation du mariage légal et de toutes les responsabilités qui en découlent, soit il y a d’autres raisons qui imposent cette situation (la polygamie), tels que des facteurs géographiques, économiques ou sociaux.
Les facteurs géographiques
Montesquieu et Gustave Le Bon insistent sur les conditions climatiques qu’ils présentent comme étant la cause principale du développement de la polygamie. Ces penseurs croient que le climat en Orient est tel que la polygamie y est inévitable. Ils disent que, dans les pays orientaux, la femme atteint la puberté et la vieillesse très tôt, ce qui conduit l’homme à avoir une deuxième et une troisième femmes pour satisfaire son besoin sexuel. En outre, ils estiment qu’une seule femme ne saurait satisfaire l’énergie sexuelle d’un homme dans un tel climat.
Gustave Le Bon dit dans son livre “Histoire de la Culture arabe et islamique” : «La coutume de la polygamie n’a pas été introduite par la religion. C’est la coutume des conditions climatiques, des caractéristiques raciales et d’autres causes dans la vie de l’Orient. On n’a pas besoin de démontrer que ce sont là des facteurs très importants et influents. En outre, la nature et la structure des femmes orientales, le fait qu’elles aient à élever leurs enfants, l’existence de certaines maladies, et bien d’autres facteurs similaires obligent l’homme à s’écarter de sa femme pendant un certain temps. Et étant donné que le climat oriental et la physiologie particulière des hommes de ces régions rendent l’éloignement de la femme difficile à supporter par les hommes, ceux-ci se trouvent obligés de recourir à la polygamie.»
Dans “L’Esprit des Lois”, Montesquieu dit : «Dans les pays au climat chaud, les filles atteignent la puberté à l’âge de huit ans, neuf ans et dix ans. Elles tombent enceintes tout de suite après le mariage, au point qu’on peut dire qu’elles se marient et tombent enceintes presque en même temps.» Etablissant une biographie du Prophète de l’Islam, un autre écrivain européen dit : «Le Prophète s’est marié avec Khadîjah alors qu’elle n’avait que cinq ans et il a consommé le mariage lorsqu’elle a eu huit ans. A cause de ce mariage précoce, les femmes dans les pays tropicaux deviennent vieilles à l’âge de vingt ans. Elles sont donc déjà vieilles avant ou dès qu’elles atteignent la maturité. En revanche, dans les pays au climat modéré, les femmes conservent leur charme et leur beauté pendant longtemps. Elles atteignent l’âge de la puberté plus tard et sont plus matures et expérimentées à l’âge du mariage. Elles mettent des enfants au monde à un âge relativement avancé, et elles vieillissent presque en même temps que leurs maris. Voilà comment est établie l’égalité entre l’homme et la femme, et pourquoi les hommes n’ont pas besoin de plus d’une femme… C’est pour cela que nous disons que l’interdiction de la polygamie en Europe, et son autorisation en Asie, sont liées aux conditions climatiques.»
Cette explication est tout à fait erronée. Car tout d’abord la polygamie n’est pas confinée aux régions tropicales de l’Orient. Pendant l’époque préislamique, cette coutume était répandue en Iran où le climat n’a rien de tropical. Il est tout à fait puéril de dire que dans les régions tropicales les femmes deviennent vieilles à l’âge de 20 ans, comme l’allègue Montesquieu. Et c’est encore plus fantastique de prétendre que le Prophète de l’Islam se serait marié avec Khadîjah alors qu’elle n’avait que cinq ans et qu’il aurait consommé le mariage quand elle est arrivée à l’âge de huit ans, car il est de notoriété publique qu’au moment de leur mariage, Khadîjah avait 40 ans, et le Prophète 25 ans.
Ensuite, si l’on admettait que la précocité de la vieillesse des femmes et l’intensité de la virilité des hommes soient la cause de la polygamie, pourquoi les peuples orientaux n’ont-ils pas adopté la pratique de l’amour libre et de la débauche comme l’ont fait les Occidentaux, aussi bien au Moyen Age qu’à l’époque moderne. En Occident, comme l’a souligné Gustave Le Bon, la monogamie n’existe que dans les codes civils, et n’a aucune trace dans la vie quotidienne.
Rappelons-le encore. En Orient, la polygamie existe sous une forme légale, et l’homme doit accepter la femme avec laquelle il désire avoir une liaison comme étant son épouse légale, et supporter la responsabilité de ses enfants, alors qu’en Occident, la polygamie se pratique illégalement et clandestinement, et l’homme s’adonne à l’amour libre et échappe aux responsabilités matrimoniales.
La Polygamie en Occident
Il convient de faire un bref exposé sur la polygamie en Europe pendant le Moyen Age, d’après le récit qu’en a fait un éminent historien occidental. Cet exposé devrait convaincre ceux qui critiquent l’Orient pour sa polygamie que, malgré ses défauts, celle-ci est beaucoup plus digne que ce qui se pratiquait en Europe.
Will Durant écrit dans son livre “Histoire de la Civilisation” (vol. 17) un chapitre intéressant intitulé “La Dissolution des murs”, où il décrit l’état des murs en Italie pendant la Renaissance. Ci-après un résumé d’un sujet intitulé “Les Relations Sexuelles” extrait de ce livre.
«Avant de parler des murs des gens irréligieux, et de leurs relations sexuelles, il convient de rappeler tout d’abord que l’homme tend, de par sa nature, à la polygamie, et qu’on ne peut lui imposer la monogamie que par l’existence de restrictions morales vigoureuses, un certain degré de pauvreté, un travail dur, et une surveillance constante de la part de sa femme.
«On ne peut affirmer que l’adultère chez les femmes était moins répandu au Moyen Age que pendant la Renaissance. De même que l’adultère se pratiquait sous le couvert de la chevalerie, de même, pendant la Renaissance, elle se dissimulait sous l’habit des bonnes manières et de l’esprit raffiné du beau sexe. Les filles issues de familles respectables étaient gardées, dans une certaine mesure, à l’écart des hommes étrangers à la famille, et on leur enseignait les mérites de la chasteté pré-maritale. Parfois de tels enseignements s’avéraient exceptionnellement fructueux. En effet, on rapporte qu’une jeune femme se jeta dans l’eau après avoir été violée. C’était sans doute un cas exceptionnel de suicide, puisque l’Evêque se donna la peine d’ériger une statue à sa mémoire après sa mort.»
«Le nombre de liaisons pré-maritales devait être considérable, si l’on en juge par les innombrables enfants illégitimes que l’on trouvait dans chaque ville italienne. On était fier si on n’avait pas d’enfants illégitimes, mais on n’avait pas honte si on en avait. Habituellement, si un mari voulait persuader une femme de se marier avec lui, il lui promettait d’élever son enfant illégitime avec les siens, et cela ne choquait personne. Par ailleurs on pouvait obtenir facilement un certificat de légitimité en payant un dessous de table à l’ecclésiastique. En l’absence d’un héritier légal ou désigné, un fils illégitime pouvait hériter une propriété et même une couronne, puisque Frante-I succéda à Alfonso-I, le Roi de Naples. Lorsque, en 1459 Pius-II vint en Bavière, il fut reçu par sept princes qui étaient tous des enfants illégitimes. La rivalité entre les fils légitimes et illégitimes était une cause importante d’une longue série d’agitations pendant la Renaissance. Concernant l’homosexualité, elle était pratiquée sous le prétexte de ressusciter d’anciennes traditions grecques.
«San Bernardino a trouvé cette perversion si courante à Naples qu’elle pouvait menacer cette ville du même sort que Sodome. Artino a constaté que l’homosexualité était aussi répandue à Rome. Il en va de même pour la prostitution. En 1490, parmi une population de 90000 âmes, il y avait 6800 prostituées officielles, sans compter les clandestines. Selon les statistiques de 1509, parmi une population de 300000 que comptait cette ville, il y avait 11654 prostituées. Au XVe siècle, une fille qui atteignait l’âge de 15 ans sans s’être mariée était considérée comme une honte pour la réputation de sa famille. Au XVIe siècle, cet “âge de disgrâce” fut porté à 17 ans, afin de permettre à la fille d’avoir une meilleure éducation. Les hommes qui avaient toutes les facilités pour jouir sexuellement, grâce à une large disponibilité de prostituées, n’étaient attirés par le mariage que si la femme proposée promettait d’apporter une dot très conséquente. Selon le système du Moyen Age, le mari et la femme se devaient en principe de s’aimer mutuellement et de partager bonheur et malheur. C’était souvent le cas. Cependant l’adultère était rampant. La plupart des mariages dans les classes supérieures étaient des unions diplomatiques contractées pour des raisons politiques et économiques, ce qui amenait les hommes à croire qu’ils avaient le droit d’avoir des maîtresses. Auquel cas, leurs épouses étaient obligées de garder et de dissimuler leur colère et leur frustration.
«Dans les classes moyennes, certains hommes considéraient l’adultère comme une jouissance légitime. Machiavel et ses amis ne se gênaient pas pour se raconter leurs aventures extra-conjugales, et lorsque leurs femmes décidaient de se venger en se livrant elles aussi à des aventures extra-conjugales, leurs maris ne se sentaient pas offensés, gênés, ni jaloux.»
C’était là un échantillon de ce qui se passait dans des pays qui considèrent la polygamie comme un crime impardonnable de l’Orient, et qui, à l’occasion, rendent le climat responsable de cette coutume présumée “inhumaine”. Quant à leur climat, il ne leur permettait évidemment jamais de tromper leurs femmes, ni de violer le système de la monogamie !
A propos, il est à rappeler que l’absence de la polygamie légale parmi les Européens -peu importe qu’elle soit une bonne ou une mauvaise chose- n’est nullement due à la religion chrétienne. Car aucun texte dans cette religion n’interdit la polygamie. Bien au contraire, étant donné que Jésus Christ a confirmé les enseignements de l’Ancien Testament, lequel reconnaît la polygamie, on pourrait dire que le Christianisme autorise la polygamie, et les anciens Chrétiens l’ont pratiquée effectivement. Donc le refus de l’Occident de la polygamie légale devrait avoir d’autres causes.
Les menstrues
D’aucuns attribuent la polygamie aux menstrues de la femme et à son aversion pour l’acte sexuel pendant cette période, ainsi qu’à sa fatigue après l’accouchement et à son désir de se consacrer à l’allaitement et à l’éducation de ses enfants.
Will Durant écrit : «Dans les sociétés primitives, les femmes vieillissent précocement, ce qui les conduit à encourager leurs maris à épouser une seconde femme, afin qu’elles aient plus de temps pour l’allaitement de leurs enfants, et afin que l’intervalle entre une grossesse et la suivante se prolonge sans que cela contrarie le désir du mari d’avoir plus d’enfants et de jouir sexuellement. En outre, avec une seconde femme, la première peut être soulagée des tâches ménagères, tout en ayant la satisfaction de voir la famille s’enrichir par de futurs nouveaux enfants sans qu’elle ait à en subir les principales peines.»
Il ne fait pas de doute que les menstrues, la grossesse et la période post-natale font que les positions de la femme et de l’homme sont sexuellement dissemblables.
Toutes ces raisons poussent l’homme à avoir une seconde femme, mais elles ne peuvent constituer à elles seules la cause de la polygamie, à moins qu’elles soient accompagnées d’un facteur moral ou social qui empêche l’homme de satisfaire ses besoins sexuels avec des maîtresses et extra-conjugalement. Les facteurs ci-dessus ne peuvent être efficaces que lorsque l’homme n’a pas la liberté de satisfaire sans restrictions ses désirs sexuels.
Les limites de la période de la fécondité chez les femmes
Certains croient que la limitation de la période de fécondité de la femme et sa ménopause sont la cause de la pratique de la polygamie, car il peut arriver qu’une femme atteigne l’âge de ménopause sans avoir pu mettre au monde le nombre voulu d’enfants, ou que ses enfants soient morts. Dans un tel cas, le mari ne veut pas se séparer de sa femme, mais en même temps il désire avoir encore des enfants, et il n’a en conséquence d’autre alternative que de se remarier une deuxième, voire une troisième fois. De même, la stérilité de la première femme peut être une autre raison qui amène un mari à épouser une seconde femme.
Les facteurs économiques
Certains facteurs économiques aussi ont été invoqués comme étant les causes de la polygamie. On dit que, dans les temps anciens, le fait d’avoir un grand nombre de femmes et d’enfants était considéré comme un avantage économique. L’homme faisait travailler ses femmes et ses enfants, et les traitait comme des esclaves. La plupart des esclaves n’étaient pas capturés dans les batailles, mais vendus par leurs pères.
Cela peut constituer une cause de la polygamie, dans la mesure où l’homme ne peut avoir d’enfants qu’en acceptant que la femme proposée pour les mettre au monde soit sa femme légale. L’amour libre ne peut assurer cet avantage. En tout cas, cette cause ne saurait expliquer tous les cas de polygamie. Car si nous supposons que la polygamie soit née chez les populations primitives pour cette raison -ce qui ne fut pas le cas dans toutes les populations- il faut savoir qu’elle a été répandue plus chez les classes aisées -les rois, les princes, les dirigeants, les grands commerçants- que chez les pauvres. Donc cette supposition n’est pas valable. Car, comme nous le savons, ces classes n’ont jamais exploité économiquement leurs femmes et leurs enfants.
Le facteur de nombre et de tribu
Le désir d’avoir beaucoup d’enfants et de former une famille nombreuse était un autre facteur de l’émergence de la polygamie. Ce qui fait la disparité entre l’homme et la femme sur ce plan est le fait que le nombre d’enfants qu’une femme puisse engendrer, que ce soit avec un homme ou avec plusieurs, reste limité, alors que le nombre d’enfants qu’un homme peut avoir dépend du nombre de femmes avec lesquelles il se marie. Ainsi, un homme pourrait faire des milliers d’enfants s’il avait la possibilité de se marier avec des centaines de femmes. A la différence de ce qui se passe dans le monde moderne, le nombre des membres d’une famille dans l’ancien monde était considéré comme un facteur social important. Les tribus et les clans faisaient tout pour accroître leur nombre. Dans le monde ancien, on était fier d’appartenir à une grande tribu. Or, il est évident que la polygamie était le seul moyen d’avoir une famille ou une tribu nombreuse.
La supériorité numérique des femmes
Le dernier et le plus important facteur ayant contribué à l’apparition de la polygamie était la supériorité numérique des femmes. Cette supériorité n’était évidemment pas due à un taux de naissance de filles supérieur à celui des garçons, car si, par hasard, quelque part le taux de naissance des filles est plus important que le taux de naissance des garçons, ailleurs c’est le contraire qui peut se produire. La raison de cette supériorité numérique des femmes candidates au mariage s’explique surtout par le taux de mortalité élevé chez les hommes, lesquels avaient toujours, à l’exclusion des femmes, la charge de s’engager dans les guerres interminables entre les tribus, les clans, les régions, etc. Dans ce cas, si on avait appliqué strictement la monogamie, beaucoup de femmes seraient restées célibataires, sans maris légaux, sans enfants légaux, et sans un foyer conjugal.
Il ne fait pas de doute que cette situation prévalait au moins dans les sociétés primitives. Nous avons déjà cité les propos de Will Durant qui expliquait que dans ces sociétés primitives la vie de l’homme était constamment menacée, parce qu’il faisait toujours la chasse et la guerre, et que de ce fait le taux de la mortalité chez les hommes y était supérieur à celui des femmes. Donc, puisque le nombre des femmes augmentait sans cesse, on se trouvait devant cette alternative : ou adopter la polygamie, ou condamner un grand nombre de femmes à rester célibataires leur vie durant.
Récapitulation
Nous avons énuméré ci-dessus tous les facteurs qu’on puisse présumer être à l’origine de la polygamie. Comme vous avez dû le constater, certains de ces facteurs, comme le climat, ne jouent en fait aucun rôle dans l’émergence de la polygamie. C’est pourquoi nous les négligeons. Il reste donc trois autres facteurs qui méritent d’être discutés.
1 – Le premier facteur est le facteur économique. On peut le considérer comme une cause illégitime et illégale, et il ne peut s’expliquer que comme une injustice, une agression et une oppression. Car il est évident que la vente d’un fils est l’un des actes les plus sauvages que l’homme ait connus, et le désir de recourir à la polygamie dans ce but et avec cette intention est en soi une intention sauvage et injuste comme l’acte lui-même.
2 – La deuxième catégorie de facteurs qui méritent d’être discutés et considérés comme un droit et une justification pour l’homme et la société de l’acceptation de la polygamie, comprend notamment l’exemple de la stérilité de la femme ou de sa ménopause, ou celui du besoin de l’homme d’un fils, et de la tribu ou de la nation d’augmenter le nombre de ses membres. En règle générale, tous les facteurs qui placent l’homme et la femme dans une position d’inégalité sur le plan sexuel, ou sur le plan de la procréation, deviennent une justification de la polygamie.
3 – Il y a une troisième catégorie de facteurs qui, si l’on suppose leur existence dans le passé ou à présent, constituent non seulement une justification pour l’homme ou la société, de l’institution de la polygamie, mais aussi un droit pour la femme et un devoir pour l’homme et la société, de l’adopter : il s’agit du cas où le nombre des femmes dépasse celui des hommes. Ainsi, si l’on suppose qu’il arrive que le nombre de femmes proposées au mariage dépasse celui des hommes prêts à se marier, de telle sorte que le système de la monogamie conduise à priver un certain nombre de femmes de la possibilité de se marier et de former un foyer conjugal comme tout le monde, l’institution du système de la polygamie deviendrait un droit pour ces femmes privées de mari, et un devoir pour les hommes. En d’autres termes, les hommes auraient le devoir de la mettre en pratique, et les épouses devraient l’accepter.
Le droit au mariage est un droit fondamental, et personne ne doit en être privé sous aucun prétexte. La société ne doit rien entreprendre qui puisse priver une partie de la population de ce droit.
Le droit au mariage est un droit naturel, au même titre que la liberté, le droit au travail, le droit à la nourriture, à un logement et à l’éducation. C’est pourquoi les droits naturels de l’homme répugnent à la loi de la monogamie lorsque le nombre des femmes en âge de se marier dépasse celui des hommes disponibles. C’était, du moins, le cas dans le passé.
Dans le chapitre suivant nous allons voir s’il existe encore des circonstances qui, non seulement justifient la polygamie, mais aussi font de celle-ci un droit pour les femmes, et si de telles circonstances n’existent plus, quelle est la position de ce droit vis-à-vis du droit de la première épouse.
Le droit de la femme à la polygamie
Nous avons déjà expliqué les causes de l’échec de la polyandrie et du succès de la polygamie, et montré les multiples facteurs qui ont concouru à l’apparition de celle-ci. Certains de ces facteurs proviennent de l’esprit de domination et d’oppression chez l’homme, d’autres émanent de la disparité entre l’homme et la femme sur le plan de la durée de leur faculté de procréation et du nombre d’enfants que chacun d’eux pourrait avoir. La dernière catégorie de facteurs peut être considérée comme une justification de la polygamie. Mais la cause principale de celle-ci à travers l’histoire a été la supériorité numérique des femmes candidates au mariage sur les hommes. Cette cause conduit à la création d’un droit pour la femme et d’une obligation pour l’homme.
Afin d’éviter d’entrer dans de longues discussions, nous passons l’éponge sur les facteurs justifiant la polygamie, pour nous concentrer sur la principale cause qui, lorsqu’elle existe, fait de la polygamie un droit pour la femme.
Pour que ce droit soit établi, il faut que deux choses se réalisent :
1 – Il faut qu’il soit établi, statistiques à l’appui, que le nombre des femmes candidates au mariage dépasse nettement celui des hommes disponibles.
2 – L’existence réelle de circonstances qui créent un droit, pour les femmes privées de mariage, sur les hommes et femmes mariés.
Concernant le premier point, fort heureusement, il y a des statistiques authentiques dans le monde moderne. Un recensement a lieu périodiquement dans chaque pays. Dans les pays avancés, les statistiques recensent non seulement le nombre des hommes et le nombre de femmes, mais aussi leur nombre respectif dans chaque tranche d’âge. Ces statistiques sont régulièrement publiées par les Nations Unies dans leurs rapports annuels sur la population du monde. Nous avons devant nous le rapport de 1964, publié en 1965.
Il est à souligner qu’il ne suffit pas de connaître le nombre de personnes de sexe masculin ou de sexe féminin dans un pays donné ; ce qu’il importe de savoir c’est le nombre de femmes et d’hommes “mariables”. Car le nombre des femmes et des hommes “mariables” diffère souvent de leur nombre total respectif, et ceci pour deux raisons :
1 – L’âge de la puberté arrive plus tôt chez les filles que chez les garçons, et c’est la raison pour laquelle l’âge légal du mariage pour les filles est plus bas que pour les garçons, dans tous les codes civils du monde. Et, sur le plan pratique, nous constatons que l’âge du mariage chez les hommes dépasse en moyenne de cinq ans celui de leurs femmes dans la plupart des régions du monde.
2 – La deuxième raison -et elle est plus importante que la première- est que, bien que le taux de naissance des filles ne soit pas supérieur à celui des garçons dans certaines régions du monde -et parfois même, c’est le contraire qui se produit- le taux de mortalité chez les garçons est supérieur à celui des filles, ce qui crée un déséquilibre entre le nombre des filles et des garçons en âge de se marier. Ainsi il arrive parfois que le nombre des filles en âge de se marier soit largement plus grand que celui des garçons “mariables”. C’est pourquoi il est possible que le nombre total des personnes de sexe masculin soit égal à celui des personnes de sexe féminin dans un pays donné, alors que le nombre des filles en âge de mariage soit supérieur à celui des garçons “mariables”.
Le Rapport de la Population des Nations Unies pour l’année 1964 atteste ces faits.
Par exemple, selon ce rapport, la population totale de la République de Corée est de 26277635 âmes. Sur ce total, 13145289 personnes sont de sexe masculin, et 13132346 de sexe féminin. Donc le nombre de la population masculine dépasse de 12943 personnes celui de la population féminine. Cette proportion se maintient dans les tranches des enfants âgés de moins d’un an, de 1 à 4 ans, de 5 à 9 ans, de 12 à 14 ans et de 15 à 19 ans.
Les statistiques montrent que, dans toutes ces tranches d’âge, le nombre des garçons est supérieur à celui des filles. Mais dans le groupe de personnes âgées de 20 à 24 ans la proportion change. Dans cette tranche d’âge, le nombre total des personnes de sexe masculin est de 1083364 et le nombre total des personnes de sexe féminin est de 1110051. Dans toutes les tranches d’âge supérieur, dont les représentants sont des gens en âge de se marier, le nombre de personnes de sexe féminin est plus grand.
Pourtant, il est à noter que la composition de la population dans la République de Corée est exceptionnelle dans la mesure où, dans le nombre total de la population, les personnes de sexe masculin sont plus nombreuses que les personnes de sexe féminin, alors que dans l’écrasante majorité des pays du monde le nombre de personnes de sexe féminin dépasse celui des personnes de sexe masculin dans le nombre total de la population et non seulement dans la catégorie des personnes “mariables”. Ainsi, en Union Soviétique par exemple, la population totale compte 216101000 âmes dont 97840000 de sexe masculin et 118261000 de sexe féminin, et cette différence dans le nombre des deux sexes reste constante dans les tranches d’âge d’avant le mariage ainsi que dans celles de mariage, soit dans les tranches de 20-24, 25-29, 30-34… 80-84.
Il en va de même pour d’autres pays, comme l’Angleterre, la France, l’Allemagne de l’Ouest, l’Allemagne de l’Est, la Tchécoslovaquie, la Pologne, la Roumanie, les Etats-Unis, le Japon, etc. et ce, sans parler de certaines régions, à Berlin Est et Berlin Ouest par exemple, où la disparité entre le nombre de personnes de sexe féminin et de sexe masculin est anormalement grande.
En Inde, dans le groupe d’âge de personnes “mariables”, le nombre des hommes excède celui des femmes. C’est seulement dans la tranche d’âge de 50 ans et plus que le nombre des femmes est supérieur. Apparemment ce manque de femmes supposé est dû au fait que beaucoup de gens dans ce pays n’aimeraient pas mentionner les noms de leurs jeunes femmes et jeunes filles aux agents de recensement.
Selon les tableaux du dernier recensement, l’Iran est l’un des rares pays où le nombre de personnes de sexe masculin dépasse celui des représentants de l’autre sexe.
Il est surprenant d’entendre certains critiques insister pour que la loi autorisant la polygamie soit abolie au moins dans les pays où le nombre des hommes excède celui des femmes. Car tout d’abord, cette loi est universelle. Elle n’a pas été promulguée pour un pays en particulier. Puis, il ne suffit pas de connaître la proportion des femmes et des hommes dans la population totale d’un pays, pour décider que la polygamie ne s’y justifie pas. Nous avons vu que dans la République de Corée, bien que le nombre des hommes soit plus grand que celui des femmes dans la population totale, il y a plus de femmes que d’hommes dans la tranche d’âge des personnes en âge de se marier. De plus, les tableaux du recensement ne sont pas crédibles dans beaucoup de pays. Par exemple, nous savons avec certitude que bien que la polygamie ait été courante en Iran aussi bien dans les zones urbaines que rurales, il n’y a jamais eu de prétendue pénurie de femmes prêtes au mariage. Les faits sont plus éloquents que les tableaux de recensement.
Dans son livre “La Femme, le sexe supérieur”, Ashley Montague admet qu’à travers le monde le nombre de femmes “mariables” excède celui des hommes en âge de se marier.
Les statistiques de 1950 montrent que le nombre des femmes en âge de se marier en Amérique dépasse d’environ un million quatre cent trente mille, celui des hommes des mêmes tranches d’âge.
Bertrand Russel écrit dans son livre “Le Mariage et la Morale” que dans l’Angleterre d’aujourd’hui le nombre des femmes excède de deux millions celui des hommes. Selon la coutume, elles doivent rester pour toujours sans enfants, ce qui est une grande privation pour elles.
Il y a quelques années, des articles ont paru dans la presse, expliquant qu’à la suite de grandes pertes, parmi les hommes, que l’Allemagne avait subies pendant la Seconde Guerre Mondiale, un grand nombre de femmes ont été privées d’un mari légal et d’un foyer conjugal. Ces femmes ont par conséquent exercé beaucoup de pressions sur le gouvernement pour qu’il abolisse la loi de la monogamie et établisse la loi de la polygamie. Le gouvernement allemand a demandé alors officiellement à l’Université islamique d’al-Azhar (au Caire) des conseils à ce sujet. Mais par la suite l’Eglise s’y est énergiquement opposée, préférant priver les femmes de leur droit à un mari et à un foyer conjugal, ou plutôt, elle a préféré la propagation de la turpitude à l’adoption d’un programme islamique.
Pourquoi y a-t-il plus de femmes que d’hommes en âge de se marier ?
Bien que le taux de naissance des filles ne soit pas plus élevé que celui des garçons, il y a plus de femmes en âge de se marier que de garçons de la même tranche d’âge. La raison en est claire. Le taux de mortalité des hommes est supérieur à celui des femmes. La mort survient généralement pour un homme alors qu’il est normalement chef de famille. Si nous prenons en compte la mort accidentelle, celle qui survient dans une guerre, à la suite d’une noyade, d’une chute, d’un accident de voiture, etc. nous pouvons constater que dans la plupart des cas d’une telle mort, la victime est un homme, et rarement une femme. Lorsqu’une guerre est livrée, et lorsqu’il y a un conflit entre l’Homme et la nature, la plupart des victimes sont des adultes de sexe masculin. Pour savoir pourquoi la balance entre les hommes et les femmes en âge de se marier est déséquilibrée, il suffit de se rendre compte que depuis le début de l’histoire de l’humanité, il ne s’est pas passé un seul jour sans qu’il y ait une guerre et des victimes parmi ceux qui la livrent.
Les victimes de guerres pendant l’ère industrielle sont cent fois plus nombreuses que ceux qui mouraient pendant l’ère de la chasse ou de l’agriculture. Durant les deux dernières guerres mondiales, le nombre des victimes a été estimé à soixante-dix millions de personnes. Ce nombre est équivalent à ce que l’humanité a perdu en hommes pendant plusieurs siècles qui ont précédé le nôtre. Et si l’on prend en considération les pertes dues aux guerres qui sont survenues pendant les dernières années en Extrême-Orient, au Moyen-Orient et en Afrique, ou qui s’y déroulent encore vous serez d’accord avec nous sur ce point.
Will Durant dit que plusieurs facteurs ont contribué au déclin de la polygamie. La vie agricole caractérisée par la stabilité a fini par réduire les peines et les difficultés auxquelles devaient faire face les hommes auparavant, ce qui a conduit à la fin à l’égalité approximative du nombre des hommes et des femmes.
Ces propos de Will Durant sont très surprenants : Car si les pertes enregistrées parmi les hommes résultaient uniquement de la lutte contre la nature, il y aurait une différence dans le nombre des pertes à l’ère de la chasse et à l’ère de l’agriculture. Or les pertes subies étaient principalement dues aux guerres, lesquelles n’ont pas marqué une diminution pendant l’ère de l’agriculture par rapport à l’ère de la chasse. De plus, l’homme se chargeait constamment, pendant l’ère agricole, de la défense de sa femme, et s’exposait pour cela à tous les dangers, y compris la mort. C’est pourquoi, le déséquilibre dans le nombre des hommes et le nombre des femmes existait aussi bien pendant l’ère de l’agriculture que pendant l’ère de la chasse.
Mais, chose encore plus étonnante, Will Durant ne se réfère ni de près ni de loin à l’ère industrielle, alors que pendant cette ère les pertes en vies humaines parmi les hommes ont augmenté considérablement, et le déséquilibre entre le nombre des hommes et celui des femmes s’est accentué énormément.