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L’Imam Hussein (as) savait-il au cours de ses péripéties de la Mecque vers Koufa qu’il allait tomber en martyr? Ce dernier avait-il pour but le martyr en se dirigeant vers l’Irak ou bien avait-il l’intention de former un gouvernement équitable et islamique?
Le prince des martyrs (surnom donné à l’Imam Hussein [as]) est, selon les chiites imamites, un Imam à qui l’obéissance est une prescription religieuse. Il est le troisième successeur des descendants du Saint Prophète (P) et possesseur de l’autorité charismatique générale (particulière aux douze Imams duodécimains). La science de l’Imam, visible et décrite dans les récits et les preuves logiques, peut être divisée en deux catégories bien précises que nous allons analyser ici:
L’Imam est en effet, informé, par la permission de Dieu des vérités universelles de la création, quelles que soient les conditions de leurs existences, à la fois celles qui peuvent être appréhendées par les sens et celles y étant externes telles les créatures célestes, les événements passés et futurs. Ceci est prouvé dans les traditions transmises de témoin en témoin, rapportées dans les recueils de hadiths chiites tels que livres: « Kâfî » et « Baṣâér », « çodouq », Bahâr et autres. En vertu de ces traditions, en nombres illimités, l’Imam est informé de toutes choses grâce à la faveur divine et non par acquisition personnelle; il prend connaissance de tout ce qu’il désire par la moindre attention, avec la permission de Dieu.
Dans le Saint Coran, pourtant, se trouvent des versets précisant que la science de l’inconnaissable (‘ilm gheib) est spécifique de l’Essence divine du Très Haut et est réservée à Son Immensité sacrée, à l’exception du verset:
عَالِمُ الْغَيْبِ فَلَا يُظْهِرُ عَلَىٰ غَيْبِهِ أَحَدًا إِلَّا مَنِ ارْتَضَىٰ مِنْ رَسُولٍ
« Il est Le Connaissant de l’invisible. Et Il ne dévoile Son Mystère à personne, sauf à celui qu’Il agréé comme Messager… » (1)
Ce verset démontre que la spécificité de cette connaissance de l’invisible appartient au Tout Puissant et signifie que le Mystère n’est connu indépendamment et par essence, par nul autre que Dieu. Mais il est possible que les Prophètes élus de Dieu connaissent ces choses par l’intermédiaire d’une initiation divine comme il possible que d’autres personnes choisies par les Prophètes acquièrent ces connaissances par leur enseignement. Dans de très nombreuses traditions, il est rapporté que la science de l’Imâmat (‘ilm Imâmat) (ces connaissances initiées par Dieu et réservées aux Imams duodécimains) a été confiée par le Saint Prophète et les Imams à leur successeur avant de quitter ce monde.
Grâce à la logique démonstrative, en vertu de laquelle les Imams sont, en fonction de l’éclat de leur sainteté, les humains les plus parfaits de leur époque et l’incarnation des Noms et des Attributs divins. En réalité, ils sont au courant de toutes les choses de ce monde et de toutes les circonstances pouvant survenir individuellement; par leur existence élémentaire, vers où ils se tournent, des réalités s’éclairent à leurs yeux. (Nous renvoyons l’énoncé de ces preuves à un moment plus propice étant donné que ces propos se situent à niveau bien supérieur à cet article et s’arrêtent sur une série de questions rationnelles très complexes.)
Il faut être attentif au fait que ce genre de science -don de Dieu- (‘ilm Mouhebatî), en vertu de preuves rationnelles et transmises – la justifiant-, ne peut être retardé et ne supporte aucun changement. Elle ne se trompe jamais et est, comme on dit, une science inscrite sur une Table gardée (Tabula secreta, Lawh-i-Mahfouz); ainsi qu’une connaissance de tout ce qui dépend des indispensables décrets célestes.
Il faut savoir que la personne possédant cette science n’a aucun devoir vis-à-vis de celle-ci et aucun de ses désirs et objectifs n’intervient dans celle-ci (dans le sens qu’il dépend de cette science incontournable). Étant donné que le devoir dépend constamment de l’acte en fonction des possibilités, l’accomplissement ou la renonciation de celui-ci sont au libre choix de celui qui en est chargé. Les actes ne pouvant être inévitables et inéluctables de toute prédestination reviennent alors à la responsabilité humaine. Il est certes juste que Dieu ordonne à ses serviteurs d’accomplir ou de renoncer à tel ou tel acte étant dans leur capacité; mais il est invraisemblable qu’Il ordonne de choisir à propos d’un fait n’appartenant qu’à Sa Volonté Créatrice et Son Inévitable Prédestination, qui surviendra malgré tout. Cette permission ou interdiction serait de toute façon sans aucun effet.
De la même manière, l’homme a la possibilité de prendre une décision sur les actes réalisables ou non, les choisir pour objectif et y joindre tous ses efforts. Mais il ne pourra jamais faire intervenir sa volonté pour des faits qui s’accompliront sans aucun doute, car prédestinés. Il restera incapable de les prendre pour objectif, sa volonté et son intention n’ayant aucun effet sur ceux-ci.
Il est par conséquent, évident que:
1- Cette science de l’Imam, don de Dieu, n’a aucun effet sur ses faits et gestes et aucune relation avec les devoirs lui étant particuliers. Et fondamentalement tout problème donné, dépendant d’une inévitable destinée, ne dépend absolument pas de la volonté, de la renonciation ou encore des objectifs humains.
En effet l’appartenance à un destin inéluctable et la Volonté décisive du Très Haut, fait l’objet d’une entière satisfaction face au destin. C’est ainsi que le Prince des martyrs (Imam Hussein [as]) prononça ces paroles avant de rendre l’âme sur le champ de bataille:
“رضا بقضاءک و تسلیماً لامرک لا معبود سواک”
« Satisfait de Ton décret céleste (destinée que Dieu a décrétée) et soumis à Tes commandements. ( Il n’existe) nul objet d’adoration (M’abûd) hormis Toi » (2)
Ou encore lorsqu’il s’apprêtait à quitter Médine pour se diriger en direction de la ville de Koufa, où il avait été invité par la population des croyants:
” رضا اللّه رضانا اهل البیت “
« La satisfaction de Dieu est notre satisfaction, nous les gens de la maison » (3)
2- Que les actions humaines soient indubitables, puisqu’elles dépendent de la prédestination divine, n’est guère contradictoire à ce qu’elles soient délibérées puisque que l’activité humaine est volontaire. Les décrets célestes (actes) incombent avec toutes leurs conditions et n’en sont pas privés. Le Tout Puissant a par exemple voulu que l’homme accomplisse tel ou tel acte volontaire de son libre arbitre. Dans ce cas la réalisation de cet acte apparemment intentionnel, dépend en réalité de la décision divine, indubitable et inévitable; alors que dans un même temps elle est laissée au libre-choix et fait partie des particularités humaines.
3- Même si l’apparence des actes de l’Imam (as) peut s’adapter à certains motifs, il ne faut guère les prendre en tant que preuve d’absence de toute science -donnée par Dieu- ou d’ignorance face aux événements. Il est parfois ainsi suggéré: si le Maître des martyrs (Imam Hussein) (as) connaissait les faits à venir, pourquoi a-t-il donc envoyé Muslîm en tant que représentant vers la ville de Koufa? Pourquoi par l’intermédiaire de çaydâvî a-t-il écrit une missive pour la population de Koufa? Comment se fait-il qu’il décide de quitter la Mecque pour se rendre à Koufa? Pour quel motif s’est-il jeté vers la mort, alors que Dieu ordonne:
وَلَا تُلْقُوا بِأَيْدِيكُمْ إِلَى التَّهْلُكَةِ
« Et ne vous précipitez pas tête en avant dans l’abîme… » (4)
Pourquoi donc? Pourquoi?
La réponse à toutes ces interrogations a été donnée très clairement et ne nécessite pas de répétition.
Selon le texte coranique, le Saint Prophète et l’Imam (étant l’un de ses descendants) sont des êtres humains semblables aux autres individus de l’humanité. Leurs actes s’effectuent tout au long de leur existence, en fonction de leur volonté et d’une connaissance tout à fait ordinaire; semblables aux personnes du commun. L’Imam distingue également le bien et le mal, le bien fait et le méfait de toute affaire comme tout être humain, et ce qui lui semble, il l’exécute après en avoir pris décision; c’est alors qu’il y emploie tous ses efforts. Lorsque les causes, les facteurs et les conditions extérieurs sont favorables, il atteint le but désigné et lorsqu’au contraire ces éléments sont contrevenants, il ne parvient à progresser dans cette direction. (Le fait que l’Imam soit informé de tous les détails des événements, passés ou futurs, par la permission de Dieu, n’a rien à voir avec ses actes accomplis volontairement comme nous l’avons vu précédemment.)
L’Imam (as) est comme tout autre être humain, serviteur de Dieu, chargé de ses devoirs et réglementations religieux et conformément à son autorité de leader venue de la part de Dieu, il doit accomplir toutes les mesures habituelles et mettre le maximum d’effort pour faire renaître la parole de Vérité, préserver la religion et le culte divin.
Par une brève revue sur les conditions de l’époque, nous pouvons appréhender les objectifs du Prince des martyrs lorsqu’il prit ces décisions et ces mesures.
La période la plus obscure de l’histoire islamique pour la famille du Prophète et leurs chiites futs certes les vingt années du règne de Muawiya.
Lorsque ce dernier s’empara du califat islamique par mille et une ruses et devint le gouverneur insouciant et négligent de ce vaste territoire islamique, il mit toutes ces capacités pour renforcer son pouvoir et exténuer les membres de la famille du Prophète. Il ne voulait pas seulement les éliminer, mais également effacer leur nom, souvenir ou toute trace pouvant rester sur les langues et dans les mémoires.
Il employa pour cela, un groupe des compagnons du Prophète très respecté et recevant l’entière confiance des croyants; afin de rassembler et de créer des traditions avantageant les compagnons par rapport à la famille du Prophète. Il ordonna d’autre part que sur toutes les chaires des territoires islamiques, l’on insulte et maudisse le Prince des croyants (L’Imam Ali, successeur, gendre du Prophète et premier Imam duodécimain).
Par des hommes de main, tels que Ziâd-ibn-Abah, Samrah-ibn-Djondab, Bosr-ibn-Artâh ou autres, ils recherchaient les descendants du Prophète où ils se trouvaient et les exterminaient. Pour cela il employait tout ce qui était dans ses moyens: force, corruption, persuasion et menace.
Il est normal que dans de telles conditions, la majorité de la population répugne à prononcer le nom de l’Imam Ali et de ses descendants. Et ceux qui avaient gardé une quelconque affection pour la famille du Prophète au fin fond de leur cœur, avaient annulé toute relation avec ceux-ci, par crainte pour leur vie, leurs biens et leur réputation.
Par Sayyid Muhammad Husayn Tabataba’i: On peut appréhender la réalité de cette épopée lorsque l’on apprend que l’Imâmat de l’Imam Hussein (as) dura environ dix ans et correspondit précisément à la période du règne de Muawiya (hormis les derniers mois de son existence). Tout au long de ces années, aucune tradition de n’a été mentionnée de cet Imam, représentant de la connaissance spirituelle et de la jurisprudence islamique (étant donné que ces traditions étaient rapportées par les gens durant cette période; celles-ci témoignent en fait parfaitement de la consultation et l’accueil que lui réservait la population de l’époque. Non pas les traditions rapportées par ses proches et ses descendants). Il est par conséquent évident que durant cette période, les portes de la maison de la famille du Prophète restaient constamment fermées et que la population n’était guère avenante à leur égard.
La pression quotidienne qui sévissait alors au sein du milieu islamique n’avait pas permis à l’Imam Hassan (as) (deuxième Imam duodécimain et frère ainé de l’Imam Hussein) de lutter ou de se soulever contre Muawiya. S’il l’avait fait cela n’aurait eu aucun résultat, étant donné que:
Premièrement: Muawiya avait obtenu de sa part un serment d’allégeance. Personne n’était donc prêt à l’assister tant que ce serment existait.
Deuxièmement: Muawiya s’était présenté en tant que l’un des plus importants compagnons du Prophète (p), scribe de la révélation, auquel les gens pouvaient se confier et se situant à la droite des trois premiers califes. Il s’était donné lui-même le surnom d’« oncle maternel des croyants »
Troisièmement: Il pouvait aisément, par une ruse -lui étant tout à fait particulière- ordonner que ces hommes de main tuent l’Imam Hassan (as), puis se soulever pour venger son sang et tuer cette fois ses assassins; pour enfin célébrer son deuil par une cérémonie funéraire !
Muawiya avait rendu les conditions d’existence de l’Imam Hassan si précaire que même au sein de sa propre demeure, il ne possédait la moindre sécurité. Pour finir, c’est d’ailleurs par l’intermédiaire de son épouse que l’Imam fut empoisonné et tomba en martyr (alors que Muawiya décida d’obtenir le serment d’allégeance de la population pour son fils Yazid).
Avec le décès de Muawiya, le Prince des Martyrs s’empressa de se soulever contre Yazid; dans cette épopée il emmena avec lui ses partisans, ses proches parents ainsi que son propre nouveau-né et les sacrifia pour cet objectif grandiose. La période de son Imâmat contemporain du règne de Muawiya ne lui avait guère permis d’accomplir un tel don de soi, il n’aurait alors eu aucun effet face aux ruses et complots apparemment justes de Muawiya et le serment d’allégeance qui lui avait été donné.
Voilà en résumé la situation malsaine qu’avait instituée Muawiya dans les milieux islamiques, aboutissant à ce que les portes de la demeure du Prophète soient constamment fermées sur ses descendants et les empêchent d’avoir la moindre influence et efficacité.
Le dernier coup qu’il assena à la communauté islamique et aux musulmans fut de rendre le califat héréditaire et autocratique. Il installa son fils Yazid, sur le trône; alors que ce dernier n’était guère une personnalité religieuse (même en apparence ou simple hypocrisie). Il passait publiquement, la majorité de son temps dans les jouissances telles que la musique, le vin, la pédérastie et la danse des singes. Il ne respectait point du tout les règles islamiques et n’adhérer à aucune conviction religieuse et cultuelle.
Le régime de Yazid associé à la poursuite de la politique de Muawiya éclairait la responsabilité islamique et les musulmans, tout particulièrement les relations (consistant à les négliger) avec la famille du Prophète (p).
De telles conditions uniques étaient le facteur le plus efficace pour provoquer la chute définitive des descendants du Prophète et vaincre la vérité et la justice. Pour cela il fallait que le Prince des martyrs prête serment d’allégeance à Yazid et le reconnaisse Calife et successeur du Prophète à qui l’obéissance est un devoir religieux.
Or, l’Imam Hussein (as), de par sa véritable responsabilité de guide et de chef religieux, ne pouvait se permettre de prêter allégeance avec Yazid et assister au démantèlement de la religion et du culte musulman. Il se devait de réfuter tout serment d’allégeance; Dieu n’attendait d’ailleurs que cela de lui.
Refuser de prêter allégeance n’avait bien entendu que d’amères conséquences et des désagréments. Cet effroyable et irrésistible régime au pouvoir ne désirait rien d’autre que ce serment d’allégeance (il proposait de prendre soit l’allégeance soit la tête des gens). La mort de l’Imam était ainsi, sûre et inévitable en raison de son refus de toute allégeance avec Yazid.
Le Prince des martyrs décida de refuser catégoriquement cette obligation, contraire à l’intérêt de l’Islam et des musulmans, et d’accepter le martyr. Il préféra sans aucun égard pour lui-même de choisir la mort à la vie; son devoir religieux n’était d’ailleurs autre: rejeter toute allégeance même au prix d’être exécuter. (Voilà l’explication d’un des rêves du Prophète de l’Islam rapporté dans certaines traditions, dans le lequel celui-ci lui aurait déclaré: « Dieu désire te voir tué. » Aux personnes s’enquérant de la signification de son mouvement, ce dernier leur répondait: « Dieu désire me voir sacrifié. » De toute façon, le dessein est certes une volonté législative et non pas une volonté cosmogonique, puisque comme nous l’avons précisé précédemment la Volonté cosmogonique divine n’a aucun effet sur les décisions et les actes.)
En effet, l’Imam Hussein (as) prit la décision de rejeter toute demande de serment d’allégeance et d’être (par conséquent) tué. Il préféra la mort à la vie et le cours des événements, prouva d’ailleurs la justesse de son opinion. Son martyr dans d’horribles conditions confirma l’oppression commise envers les membres de la famille du Prophète et leur légitimé. Douze ans après le martyr de l’Imam Hussein, les soulèvements et les effusions de sang se poursuivirent. Mais par la suite, lorsque le calme se réinstalla en partie à l’époque du cinquième Imam duodécimain, cette même demeure qui était restée méconnue durant son existence, fut assailli de toute part par les allées et venues des chiites, grâce à la légitimité et l’éclat de sainteté de cette personnalité (Imam Hussein) qui avait brillé dans tous les coins du monde. Un tel rayonnement et fondement solide, ne provenaient en fait que de la légitimité des descendants du Prophète soumis à toutes ces oppressions; l’Imam Hussein étant le précurseur de ce nouveau genre de bataille. Dès lors, on peut comparer les conditions de la famille du Prophète et l’accueil que lui réservait la population de son vivant avec la situation après à son martyr, durant plus de quatorze siècles, et qui s’approfondit et s’amplifie d’ailleurs d’année en année.
Voilà pourquoi Muawiya avait formellement conseillé à Yazid, de négliger Hussein Ibn Ali ce dernier refusait de lui prêter serment d’allégeance et de ne pas le déranger. Si Muawiya fit cette recommandation à son fils, ce n’était pas égard ou attachement; mais parce qu’il savait parfaitement que l’Imam Hussein (as) n’accepterait jamais de prêter un serment d’allégeance et que s’il était tué par Yazid, il deviendrait alors évident que la famille du Prophète était en effet, opprimée. Or ceci deviendrait dangereux pour la dynastie des Omeyyades (Bani Omayé) et par contre, le moyen de propagande le plus favorable pour les descendants du Prophète, leur permettant à nouveau de progresser.
Le Prince des martyrs instruit de son devoir envers Dieu, qui était de rejeter toute allégeance, et appréhendait mieux que quiconque la puissance extrême de l’opposition de la famille Bani Omayé et l’état d’esprit de Yazid; savait que son refus de tout serment lui vaudra la mort et que l’accomplissement de son devoir religieux équivaudrait au martyr. C’est dans ce sens qu’il le proclama de diverses façons à différentes occasions.
-Dans une assemblée organisée par le gouverneur de Médine, lui demandant de présenter son serment d’allégeance, celui-ci répondit: « Une personne comme moi ne prête pas allégeance avec quelqu’un comme Yazid. »
– Lorsqu’il quitta de nuit Médine, il raconta que son aïeul, le Prophète de l’Islam, avait vu en rêve qu’on lui avait déclaré: « Dieu veut (c’est-à-dire en tant que devoir) que tu sois tué. »
-Dans un discours prononcé lors de son départ de la Mecque; en réponse aux personnes qui désiraient le faire renoncer à son départ pour l’Irak, il répéta ces mêmes paroles.
-En réaction aux Arabes qu’il rencontra en chemin et qui insistaient pour qu’il s’abstienne de se rendre dans la ville de Koufa; pour ne pas se faire tuer. Il déclara: « Cette décision ne m’est point cachée, mais de toute façon ils ne me laisseront pas, où que j’aille et où que je sois, ils finiront par me tuer. »
(Même si certaines de ces traditions se contredisent et au point de vue documentaire ne sont pas sans défaillances; mais une analyse des événements, des conditions et des situations de l’époque les confirme parfaitement.)
Bien entendu, en disant que l’objectif de l’Imam lorsqu’il se souleva était de tomber en martyr et que Dieu désirait qu’il tombe en martyr; ne signifie nullement que Dieu voulait qu’il refuse de prêter serment à Yazid et qu’ensuite s’il se laisse assassiner sans aucune réaction, par les hommes de main de ce dernier. Ceci n’aurait eu comme effet que de faire sourire l’ennemi même s’il accomplissait son devoir et tout en lui donnant le nom de soulèvement. La tâche de l’Imam était toute autre, il fallait qu’il se soulève contre le funeste califat de Yazid, rejette de lui prêter serment et que ce refus se poursuive jusqu’à ce qu’il tombe finalement en martyr pour cette cause.
Nous voyons ainsi que la méthode de l’Imam varia tout au long de son soulèvement, en fonction des différentes circonstances survenant. Pour commencer lorsque les pressions exercées par le gouverneur de Médine se renforcèrent, il sortit de nuit de cette ville pour se diriger vers la Mecque -lieu du sanctuaire divin- et se réfugia dans cet asile sacré. Il y resta quelques mois en tant que réfugié, mais il ne tarda pas à être contrôlé secrètement par les agents secrets du califat. Jusqu’à ce que la décision fut prise par le pouvoir qu’une délégation soit envoyée vers la Mecque et qu’au cours du rituel du pèlerinage ces agents, le tuent ou le fassent prisonnier pour l’emmener de force vers Damas. D’un autre côté un nombre important de missives arrivaient de l’Irak (pour l’Imam); des centaines et des milliers d’entre elles promettaient de le soutenir et d’obtenir la victoire. Elles l’invitaient à se rendre en Irak et lorsque la dernière d’entre elles (comme l’ont écrit certains historiens) provenant de Koufé lui parvient à titre de dernier ultimatum, il se décida à partir et de se soulever par le sang. En dernier recours il envoya Muslim Ibn Aqeel en tant que représentant vers cette ville et peu après lui parvint un message de celui-ci expliquant que la situation était favorable pour un tel soulèvement.
Face à ces facteurs, avec d’un côté l’arrivée des agents secrets de Damas pour le tuer ou l’enlever et de l’autre côté son devoir de préserver l’inviolabilité de la Maison de Dieu ( à la Mecque) et les dispositions propices en Irak pour un tel soulèvement, il prit la direction de Koufa. Lorsqu’en cours de route, il apprit le tragique assassinat de Muslim et Hani (partisan de l’Imam Hussein et habitant Koufa), il changea ses plans d’insurrection offensive pour un soulèvement défensif. Il rectifia ses rangs et ne garda que les personnes dont il était sûr qu’ils ne le quitteraient pas jusqu’à la dernière goutte de leur sang. (5)
Notes:
1- Coran, Sourate 72 (Les djinns), versets 26-27.
2- Mo’alâ-as-sabtaïn, 2/21.
3- Lahûf: 26. Le terme « Les gens de la maison » désigne les proches du Prophète.
4- Coran, Sourate 2 (La vache), verset 195.
5 – Cette discussion fut apportée par le professeur Tabâtabâï en réponse, à une question posée par un groupe de personnes; et comme vous l’avait remarqué ces propos, tout en respectant les événements survenus et leurs fondements, observent par la même occasion une certaine brièveté et concision. Puisque le commentaire des preuves existantes nécessitait toute une série de questions rationnelles et philosophiques à un niveau très élevé. Cet article a déjà été publié sous forme d’un petit fascicule et il nous a semblé intéressant de l’insérer dans ce livre. (L’éditeur)