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L'Imam ar-Ridha (Partie I)

L’Imam ar-Ridha (Partie I)

2023-05-21

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L’Imam ar-Ridha A.S ou Alime Ale Mouhammad

Moulla Nissarhoussen RAJPAR

Au Nom d’ALLAH Le Très Miséricordieux Le Tout Miséricordieux

La naissance de H° Ali RIDHA(as)

Hazrat Thameen Al Houjaj, Imamé Hashtoum, Ali Ibn Mousa Ar RIDHA Alayhissalam (que la Paix soit sur lui) est né à Madinah, le jeudi 11 Zilkaad 148 A.H. (Après Hégire).

Son grand-père et notre 6è Imam, H° Jaafar As Sadiq (as), venait de quitter ce monde éphémère, quinze jours plus tôt, soit plus précisément le 25 Shawwal, martyrisé par Mansour, le cruel Calife Abbasside illégal de l’époque, qui lui donna du poison.

Sa mère fut une servante d’Oumme Hamida, elle-même l’épouse du sixième Imam (as) et la mère du septième Imam (as). Elle était aussi native de la même région que celle de sa maîtresse qui était d’origine Berbère, de l’Afrique Septentrionale, de l’Algérie, de l’Andalousie ou, plutôt, elle venait de la Nubie. Elle s’appelait Takktoum ou Touktam ou encore Bibi Souttana, mais on la nommait « la Blonde de la Nubie. »Elle portait plusieurs noms : Oummoul Baneen, Najmakhatoune, Soumana khatoune, ou encore, Khizranekhatoune et Soukkankhatoune.

H° Oumme Hamida demanda, un jour, à son fils, H° Moussa Al Kazhim (as), d’aller acheter une fille chez le commerçant d’esclaves de la ville de Madinah. Lorsque ce dernier lui présenta ses clientes, l’Imam (as) les lui refusa toutes et lui pria d’en amener une autre de son choix à laquelle il prêtait beaucoup d’attention.

« Lors de mon voyage en Afrique du Nord, déclara le marchand, j’ai trouvé une fille en provenance de Marrakech pour laquelle, une Dame Chrétienne très pieuse m’avait donné des instructions particulières. Bibi Souttana, me dit-elle, est une esclave très spéciale, elle se mariera avec la meilleure créature de la terre et donnera naissance à un fils qui écartera le vrai du faux et répandra le vrai Islam d’Est en Ouest. Mais elle est malade et fatiguée.»

H° Mousa Al Kazhim (as) rentra après cet entretien et lui envoya son serviteur le lendemain avec une somme d’argent. Celui-ci hésita un instant puis, se dirigea chez le vendeur qui lui remit la fille contre le montant qu’il trouva conforme à ses vœux.

H° Oumme Hamida vit, une nuit, le Saint Prophète (saw) dans le rêve qui lui annonçait la bonne nouvelle d’offrir H° Oummoul Baneen Najma à son fils H° Moussa Al Kazhim (as).

Le huitième Imam (as) s’appelait ALI, comme le premier et le quatrième Imams, mais était connu par son nom honorifique ou le surnom de AR RIZA qui signifie l’Agréé ou le Satisfait. Allah lui attribua ce nom glorieux car Allah était content de lui, ainsi que Son Prophète et les Imams. Ses amis, ses parents et même les ennemis éprouvaient de lui la satisfaction et le plaisir, en raison de ses hautes qualités morales.

Il porte divers titres et surnoms tels que Aboul Hassan, Al Sâbir (le patient), Al Zaki (le pur), Al Fadhil (le vertueux), Al Wafî (celui qui tient ses engagements), et Ghariboul Ghourbhâ, un étranger parmi les étrangers, loin de sa ville natale.

Il prit les fonctions de l’Imamat, comme huitième Successeur du Saint Prophète (saw), à l’âge de trente cinq ans, après le martyr du septième Imam (as). Il gouverna durant vingt ans : il passa dix ans à Madinah pendant le califat de Haroun, cinq ans pendant la période de Al Amîne et les cinq autres pendant celle de Al Mamoun dont les trois dernières années à Khôrassan en Iran.

Que vaut un sang noble quand l’âme est vile ? Mouhammad Al Amîne était noyé dans la débauche et fut en guerre contre son frère Mamoun Al Rachid pendant toute la durée de son règne. H° Ali Ibn Moussa Ar RIZA (as) exploita cette période paisible à la propagation de l’Islam en général, de la voie Shiite en particulier. Al Amîne ne prêta aucune attention à l’Imam (as).

L’avènement des Abbassides :

Abou Jaafar ou Abdoullah ben Mouhammad ben Ali ben Abdoullah ben Abbas, connu sous le nom de Al Mansour (le vainqueur), est le deuxième calife Abbasside qui succéda à son frère Abou Al Abbas Saffah , à la fin de l’année 136 A.H. Ce dernier conquit le califat au début de l’année 132 A.H., soit seize ans avant la venue de l’Imam Ali RIZA (as) dans ce monde. Il mit fin au pouvoir barbare et cruel des Omeyyades qui avait duré presque quatre vingt dix ans et mourut, à l’âge de trente trois ans, après quatre ans et huit mois de règne sans cœur.

Son action fut dirigée principalement contre la famille des Omeyyades et ses sympathisants et il fit répandre tellement de sang qu’il reçut le nom de « Saffah» (Le Sanguinaire).On raconte qu’un jour, Abou Al Abbas invita quatre vingt personnes appartenant à cette dynastie de Damas, les fit assassiner dans son palais et prit joyeusement son repas devant ses victimes tandis qu’ils gisaient sur le sol et rendaient leur dernier soupir.

« Je n’ai jamais eu autant de plaisir à table que ce jour-là, » déclara-t-il par la suite.

Proclamé Calife dans la Mosquée de Kûfa à l’âge de vingt neuf ans, probablement le vendredi 12 Rabioul Awal (le jour anniversaire de la naissance du Saint Prophète – saw – chez les Musulmans, suivant une autre Tradition), il transféra la capitale de l’Empire arabe de Damas (en Syrie) en Mésopotamie ou l’Iraq actuel et dota la ville de Kûfa de ce magnifique titre.

En cumulant les fonctions religieuses et royales, les Abbassides adoptèrent la couleur noire qui devint la couleur du « bien » contre le blanc, la couleur des Omeyyades, celle qui reflétait le « mal. » Ce dualisme convenait assez bien aux Perses d’autant que le blanc était leur couleur du deuil.

Les Omeyyades descendaient de Omayya, l’ancêtre de Mouawyah bin Abou Soufyan et de son fils Yazid, les ennemis acharnés du Saint Prophète (saw) et de sa Sainte Postérité (as). Les Abbassides sont, par contre, les descendants de H° Abbasse, l’oncle paternel de H° Mohammad (saw), l’Envoyé d’Allah et l’ancêtre de nos onze Imams Infaillibles qui sont issus de l’union de H° Ali (as), le premier Imam, cousin et gendre du Messager d’Allah et de H° Fatima (as), son unique fille bien-aimée et la Reine des femmes de l’Univers.

En 158 A.H. donc, Abou Abdoullah Mouhammad «  Al Mahdi » (le bien guidé ), le fils de Mansour, hérita de son père qui fut un cruel despote de son temps et qui fit ses quatre volontés en massacrant sans pitié les Bani Fatima, les Sadates ou les descendants du Saint Prophète de l’Islam. Mansour se procurait un plaisir en faisant souffrir ses victimes et se servait de différentes méthodes pour les exterminer : il les enfermait dans une prison et les laissait mourir de faim ; il leur enlevait la vue en leur frappant d’un fouet aux yeux ; il les faisait écraser sous leurs habitations ; il les claustrait entre des briques d’un mur de construction ; il mélangeait leur sang à la terre qui servait à bâtir les maisons, etc.… Il ne put s’empêcher de proclamer un jour que :

« J’ai déjà massacré un millier d’individus de la postérité de la fille de Mouhammad (saw) mais, je n’ai pu encore toucher à leur Chef. » Ainsi, il mit fin à la vie du sixième Imam (as).

Il créa «un musée de têtes» où il fit pendre les têtes de tous les Sayyids de la descendance de H° Fatéma Zahra (as) et des Shiites qui furent assassinés par ses ordres et dont leur identité fut mentionnée au bas de celles-ci.

Il fit placer les corps de ces innocents martyrs à l’intérieur de la construction des colonnes de ses Palais dans la ville de Bagdad.

Mansour était d’un caractère hideux et d’une avarice sordide. C’est pourquoi, il fut célèbre par cette appellation de « Mansour Dawaniqui. »

Il est la première personne ou le premier calife qui fit détruire la sainte tombe de l’Imam Houssein (as) à Kerbela.

L’âge n’a aucune importance pour la vie d’un Imam. « Saghirôna va Kabhirôna Savaoune » a formulé l’Envoyé de Dieu : nos petits comme nos grands se ressemblent. L’Imam Ali Riza (as) grandissait, donc, dans cette atmosphère qui sentait l’odeur du sang des Martyrs, des Alawites, descendants de l’Imam Ali (as). Il avait à peine dix ans lorsque Mansour quitta cette vallée de larmes, à l’âge de soixante huit ans, après un règne de plus de deux décennies.

Même enduit de miel, l’arbre amer ne donne que des fruits amers. Al Mahdi fut proclamé calife alors que son père Al Mansour était encore sur son lit de mort. Mais, son successeur devait être son cousin et l’oncle de Mahdi, du nom de Issâ qui avait été évincé par Al Mansour au profit de son fils. Il arrangea cela de telle manière qu’il le proclamât l’héritier présomptif de Al Mahdi, sachant bien que Issâ, étant déjà âgé, mourrait avant Mahdi qui était encore jeune. Il reçut, en contrepartie de ce désistement, de grosses sommes d’argent pour lui, ses enfants, ses femmes et sa famille.

Trois ans après son avènement, Mahdi songeait à faire proclamer comme héritier présomptif du trône un de ses fils, à la place de son oncle Issâ, son successeur désigné. Il commença par lui proposer d’importantes sommes d’argent afin qu’il renonce à son droit de succession. Après diverses manœuvres, Al Mahdi obtint ce qu’il désirait : Issâ reniait à son droit d’héritier. Son fils, Mousa Al Hadî fut nommé comme dauphin et, après lui, son second fils, Haroun Al Rachid.

En 146 A.H. correspondant à l’an 762 du calendrier chrétien, Mansour fonda sur les bords du fleuve Tigre « Madinat Al Salaam » (la ville de la paix) ou Baghdad, la Cité des Mille et Une Nuits, comme Capitale de la nouvelle dynastie arabe des Abbassides. Cent mille ouvriers furent engagés pour construire la nouvelle ville sur les ruines de Ctésiphon, capitale de l’ancien empire perse. Elle devint le nombril du monde, une place forte contre toute visée étrangère et un symbole témoignant la puissance de la dynastie abbasside.

L’origine du mot Baghdad est incertaine. Elle dérive, selon certains commentateurs, de la langue perse qui signifie « Don de Dieu » : Bâgh = Dieu et Dâd = don, à l’opposé du village perse qui s’y trouvait. Elle s’appelait aussi « la Ville Ronde » à cause du mur qui l’entourait.

Mahdi, fanatique de la musique et de la poésie érotique, n’était pas moins sanguinaire que son père et continua les actions horribles de ce dernier. C’est pendant le règne de Mahdi que notre septième Imam, H° Mousa Al Kazhim (as), fut, pendant un an, enfermé dans la prison de Bagdad, dans des conditions affreuses.

Il disait à ses adhérents qu’il était le « Mahdi » de la famille du Saint Prophète d’Allah et que son frère Ibrâhim était le « Hâdi. » On raconte qu’aucun calife abbasside n’était plus éloquent que lui dans ses sermons. Il aimait la musique et faisait très souvent venir des musiciens dans son palais où ils étaient accueillis avec un honneur particulier. Il fit tuer plus de soixante dix mille Shiites à Khôrassan.

Mansour avait fait mettre en taule un nommé Yâkoub, originaire de Khôrassan, de la province de l’Iran, parce qu’il était Shiite (Shia). Lorsque Mahdi accéda au Califat à la mort de son père, il fit examiner la situation des prisonniers et, ayant appris qu’un homme, issu d’une famille d’écrivains et savant distingué, figurait parmi ces derniers, il le fit relâcher et lui offrit le poste de substitut et auxiliaire du juge de Baghdad.

Yâkoub, par son bon comportement et ses belles actions, devint de plus en plus intime avec Mahdi qui l’éleva à un rang éminent. Il passait la moitié de la nuit chez le calife et causait avec lui des sujets de science et d’affaires politiques. Le fils de Mansour lui confia la charge d’intendant du palais et il reçut le nom de Yâkoub Al Amîne. Aucune lettre officielle n’était valable sans sa signature et le vizir lui-même recevait le message du calife par son intermédiaire.

Cette situation ne dura que quelques années. Lorsque Mahdi sut que Yâkoub était un Shiite, partisan de l’Imam Ali (as), il lui fit passer un test en lui offrant un descendant de l’Imam Hassan (as) pour être tué de ses propres mains. Peut-on blâmer un homme d’aimer sa mère ou sa grand-mère ? Le fidèle des Ahloul Bayt le mit en liberté. Ce dernier fut arrêté et présenté devant Yâkoub qui, à son tour, fut enfermé dans un puits que l’on creusa dans la prison où il resta durant le règne de Mahdi et celui de Hâdi, son fils. Il fut délivré seulement par le calife Haroun Al Rachid qui lui était reconnaissant pour toujours avoir fait valoir ses mérites auprès de son père. Il lui offrit le poste de vizir, mais Yâkoub le refusa et passa le reste de ses jours à la Mecque au service d’Allah.

Cette anecdote n’est pas citée, tout simplement, pour rendre encore plus sombre ce tableau historique qui dessine la couleur du temps, mais elle révèle l’animosité profonde envers les Banî Hashîm qui couvait dans les cœurs des califes abbassides.

Des récits diffèrent quant à la mort de Mahdi : il a perdu la vie à l’âge de quarante trois ans, soit dans un accident de cheval au cours de la chasse qui était sa passion, soit empoisonné, par erreur, par une esclave jalouse d’une rivale que le calife lui aurait préférée et qu’elle voulait éliminer.

En 169 A.H., Moussa ben Mouhammad « Al Hadî » (le guide), le fils de Mahdi, monta au trône et tua avec férocité tous ceux qui appartenaient à l’illustre lignée de l’Imam Ali Amiroul Moaménine, le Commandeur des Croyants (as).

Houssen Ibn Ali, un homme brave et honnête, de la postérité de notre deuxième Imam, Hazrat Hassan Ibn Ali (as), à la tête d’une troupe constituée surtout des Alawites, fit face à l’armée de Hadi aux alentours de la Mecque. Lui et ses nombreux compagnons tombèrent sur le champ d’honneur. Ils furent décapités et leurs corps abandonnés à même le sol pour devenir la proie des animaux. Leurs têtes, montées sur la pointe des lances, furent transportées à Bagdad et présentées devant le Calife, en compagnie des prisonniers de l’armée Alawite. Il fit massacrer sauvagement ces survivants. Le printemps de la vie de Hazrat Ali Ibn Moussa Ar Riza (as) sombra dans la tristesse. Al Hâdi ne gouverna que quinze mois, mais fit graver son nom parmi les tyrans de l’Histoire.

Al Khayzouran était une esclave probablement originaire de Yémen à la Cour des califes abbassides. Elle prit un ascendant politique sur son époux Al Mahdi et intrigua pour que ses deux fils soient placés en position de successeurs de leur père, alors que ce droit revenait à leur oncle Issâ qui avait été, déjà, écarté, auparavant, par Mansour, au profit de Al Mahdi.

Hâdi vivait en discorde avec sa mère Khayzouran. Celle-ci avait eu tant de pouvoir sur Mahdi qu’aucune de ses demandes n’avait jamais été refusée par lui. Chaque matin, les généraux, ministres et officiers allaient présenter leurs hommages d’abord à elle, à Mahdi ensuite. Son autorité était plus étendue que celle du calife.

Elle continuait à exercer son influence après l’avènement de Hâdi qui en était mécontent. Ce dernier refusait, désormais, de lui accorder ses doléances, de même, elle fut négligée par les courtisans.

Le mauvais caractère corrompt l’action comme le vinaigre corrompt le miel. Hâdi envoya, un jour, à sa mère, à qui il devait la vie, un plat de riz dont il avait mangé la moitié et qu’il le trouva excellent. L’autre moitié était empoisonnée. Elle repoussa ce repas et le donna à un chien qui mourut aussitôt.

Ce quatrième calife abbasside perdit la vie, suite à un abcès au ventre ; il ne pouvait ni manger, ni boire, ou aurait été étouffé, étant ivre, par ses jeunes esclaves, à qui Khayzouran, sa mère, avait payé une forte somme d’argent.

« C’est ce que je désirais ! » prononça Al Khayzouran à la disparition de son fils Al Hâdi qui succomba à l’âge de vingt six ans.

Al Hâdi était un ivrogne, passionné,  comme son père, des chants, de la musique et de la poésie érotique. Les artistes ne s’empêchaient de dire que si Hâdi avait vécu davantage, nous aurions pu construire des maisons avec des briques en or.

L’homme est à l’image de ses actes, la cruche ne verse que ce qu’elle contient. Lorsque le frère de ce dernier, Haroun Al Rachid, fut, à son tour, nommé calife, il dut s’opposer à Jaafar, le fils de Hâdi, que celui-ci avait voulu nommer comme héritier. Haroun força Jaafar à effectuer une déclaration publique, par laquelle il reconnaissait que le pouvoir appartenait à son oncle.

Haroun Al Rachid au pouvoir :

Haroun Al Rachid Ben Al Mehdi, (Rachid, le raisonnable) vint au pouvoir en 170 A.H. ou en l’an 786 suivant le calendrier chrétien. Tel fruit, tel arbre. Il se débarrassa, avant tout, de tous les vizirs et gouverneurs de Al Hâdi pour les remplacer par des hommes de son choix. Dans la nuit même où mourut Hâdi, il nomma, en tant que son vizir, Yahyâ ben Khâlid qui avait, pendant une période, occupé cette fonction dans le califat précédent, mais se trouvait alors en prison et que Hâdi avait voulu le tuer. En recevant les pleins pouvoirs sur toutes les affaires, il fut désormais le maître absolu dans le gouvernement du nouveau calife.

Quatre fils : Fadhl, Jaafar, Mousâ et Mohammad étaient issus de Yahiâ qui, en plus de ses cousins, avait aussi des petits-enfants. Fadhl était le frère de lait du calife et Jaafar son ami intime. Toute la famille de Barmak ou les Barmécides occupait un rang très élevé dans l’Administration de Haroun où elle servit pendant dix sept ans. On ne peut citer aucun vizir, soit des anciens rois des Perses, soit des califes musulmans, qui ait occupé auprès du prince une position pareille à celle de Yahiâ et de ses fils.

Cependant, plusieurs causent vinrent contribuer à leur déchéance dont l’une d’elles fut leur athéisme. On reprocha à Haroun d’avoir confié l’empire des croyants à des gens sans religion !

L’autre raison de leur chute était la sœur de Haroun, nommée Abbâsa, que celui-ci avait fait épouser à Jaafar, le fils de Yahiâ, avec ces conditions qu’il ne la verra nulle part ailleurs qu’en sa société, que son corps n’approchera jamais du sien et qu’il n’aura pas avec elle des rapports conjugaux.

Il n’y avait pas, dans le palais de Haroun, soit entre les femmes libres, soit parmi les esclaves, de femme plus belle qu’Abbâsa. Et, Jaafar, lui aussi, était un homme fort beau. Ils cherchèrent, donc, tous les deux, à se voir en secret, à l’insu de Haroun et Abbâsa devint enceinte de Jaafar. Elle donna naissance à un enfant mâle qu’elle envoya à la Mecque sous la garde de deux de ses esclaves.

Lorsque le calife en fut informé, ses sentiments furent désormais complètement changés à l’égard des Barmécides. Il se dirigea pour le pèlerinage où il se fit présenter le fils d’Abbâsa qui était un très bel enfant. Il renonça à son projet de le tuer. Mais, lors de son retour, il fit tuer Jaafar par Mesrour, l’eunuque, qui lui trancha la tête. Celle-ci resta, d’abord, longtemps attachée à la potence, à Bagdad, où elle fut, ensuite, brûlée.

Yahiâ, étroitement gardé en prison et soumis à la torture, y rendit son âme. A l’exception de certaines personnes, tous les membres de la famille de Yahiâ et leurs alliés, ainsi que ses trois fils, furent également tués.

Yahiâ « Barmaki » ou Barmécide est l’homme qui porta Haroun Al Rachid au trône en écartant le fils de Al Hâdi que celui-ci désirait nommer son dauphin. Haroun était, de nature, l’ennemi enragé des Ahl oul Bayt, mais les Barmécides soufflaient sur les braises pour attiser cette haine.

Que des lions ont des âmes de chiens ! Et la peau n’est qu’un vêtement, la blancheur du cœur vaut mieux que celle du manteau, dit la sagesse populaire arabe. Le calife faisait égorger l’enfant et envoyait sa tête à son père en prison qui, croyant être servi du repas de midi, tombait évanoui sur le visages vertueux de son fils au moment où il soulevait le linge qui la couvrait. Yahiâ ben Khâlid paya, donc, le prix de ses forfaits, dans sa cellule, où la nature lui fit vivre la même scène qu’il fit endurer aux Descendants du Messager d’Allah.

L’histoire ne manque pas d’anecdotes. On raconte qu’en une certaine circonstance, ce même Yahiâ « Barmaki » fit venir un parfum pour quatre mille dinars qu’il aspergea sur ses habits alors qu’à sa mort, il fallut trouver un quart de dinar pour l’achat du camphre à embaumer son corps.

Un récit nous rapporte qu’une fois, un jeune garçon fit connaissance d’une vieille dame chez sa mère. Elle était l’épouse de Yahiâ « Barmaki. » Il tomba sur ses pieds pour les embrasser car les Barmécides avaient de la classe.

« Ô mon fils ! dit-elle, ma consternation va en croissant lorsque je parcours l’histoire car, au moment de l’Eid de l’année dernière, j’étais entourée de quatre cents dames habillées de vêtements cousus d’or que mes enfants m’avaient offertes, alors qu’aujourd’hui, je suis sortie justement pour trouver de quoi se couvrir du froid. »

Il dépassa ses prédécesseurs dans le carnage. Comme s’il n’avait pris les rênes que pour édifier l’hécatombe des descendants du Saint Prophète (saw) et des Shias ou fidèles de l’Imam Ali (as). Il passa au fil de l’épée, en une nuit, soixante Sadates qu’il fit venir de Médina à Tûs appelé Meshhed. Ce lieu, connu sous le nom de « la prison de Haroun », existe de nos jours à Meshhed, en Iran, où des milliers de Pèlerins viennent verser leurs larmes et y réciter le Fatihà.

Yahia Ibn Abdoullah Mahaz qui fut aussi de la postérité de l’Imam Hassan (as) élit domicile en Iran, après la terrible tuerie des environs de la Mecque par l’armée de Hâdi. Il put regrouper de nombreux fidèles en sa faveur et renforça son pouvoir. Haroun le fit venir à Bagdad pour conclure le traité de paix. Cependant, il le fit enfermer dans une geôle atroce où la mort tragique l’emporta.

Haroun Al Rachid ou Aaron « l’Honnête », parmi tous ses prédécesseurs, est celui qui a fortement consolidé le régime Abbasside. Tous les Califes Abbassides qui ont succédé au pouvoir faisaient figure de fidèles des Descendants du Saint Prophète, mais se nourrissaient d’une grande animosité envers eux. Haroun en était le pire ennemi des Ahl oul Bayt. Ils ont tiré profit de leur appartenance à la noble famille de l’Envoyé d’Allah pour tromper l’opinion publique.

Il fut le premier calife qui déclara le commerce des instruments de musique comme un métier de choix et développa les centres de jeux. Il organisa, sans doute, le premier match de l’histoire des échecs. Il organisait des parties de plaisir où il s’amusait à boire en compagnie des femmes, des esclaves et des musiciens. Il fut le héros des contes de Mille et une nuits

Pendant son règne, les riches faisaient du beurre et les pauvres coulaient à fond. L’alcool coûtait moins cher que l’eau dans Bagdad. Une bonne partie des Musulmans ne mangeait qu’une fois dans la journée et dormait affamée le soir, tandis que le reste de la population dépensait d’énormes sommes d’argent dans les jeux de hasard.

La moitié de Bagdad n’avait pas de quoi couvrir la tête de ses nobles femmes et jeunes filles alors que l’autre moitié gaspillait ses richesses à l’achat de centaines de servantes ou esclaves qu’elle embellissait de beaux vêtements et bijoux.

La ville résonnait de chants et de musique pendant que l’Azan (l’Appel à la Prière) vibrait du haut du Minaret aux heures de Salat.

Allah attribua un fils au Premier Ministre de Haroun. De nombreux chanteurs et poètes furent invités pour fêter l’évènement. On raconte qu’un seul poète reçut de l’or proportionnellement à son poids, en plus de vêtements luxueux et des bijoux, en guise de cadeau !

Un jour, l’un des fils du septième Imam (as) traversait une ruelle dans la ville de Bagdad. Il vit qu’une femme, à l’air noble, habillée dans un Tchador bien enfermé, suivait lentement une caravane de chameaux remplie de nourritures, de grains de blé et d’orge. Celle-ci jeta un regard autour d’elle pour s’assurer peut-être que personne ne l’aperçoive et se courba pour ramasser des grains que le convoi laissa tomber sur le sol. L’oncle de l’Imam Ridha (as) s’avança et lui demanda la raison de son comportement.

« Mon mari est décédé, répondit-elle. Je ne possède rien pour faire vivre mes enfants. Des jours entiers passent sans que ceux-ci trouvent de quoi manger. J’éprouve de la honte pour tendre ma main devant les gens. C’est pourquoi, j’agis de la sorte, » termina cette dame respectueuse.

D’un côté, les richesses coulaient à grands flots et de l’autre, des « Saydaniyas », des dames de la postérité de la famille du Saint Prophète d’Allah, fouillaient les ordures ménagères qui s’entassaient sur les rues afin d’ y découvrir quelques nourritures pour leurs enfants. Qui étaient ces enfants ? Ceux-là mêmes qui descendaient de la lignée du Messager d’Allah. Dans leurs veines coulait le sang de nos Imams. Hélas, leur repas se trouvait à l’intérieur de ces poubelles ménagères !

Haroun Al Rachid est le deuxième calife qui fit raser complètement le saint tombeau de l’Imam Houssein (as) à Kerbela.

Il institua de lourds impôts aux fermiers, commerçants et artisans.

Quatre mille filles esclaves et concubines étaient installées dans le Palais qui lui servaient de réjouissance.

L’Imamat de H° ALI RIDHA (as) :

C’est dans cette situation misérable que Hazrat Ali Ibn Mousa Ar RIDHA (as) entama son mandat divin de l’Imamat. Son âge ne dépassait pas les trente cinq ans.

Après le martyr du septième Imam (as), Haroun Al Rachid donna de tels ordres, qu’à l’exception de Kerbala, on ne les retrouve nulle part ailleurs. Même la tragédie de Kerbala ne nous présente pas de pareils commandements.

En assassinant d’une manière atroce H° Mousa Al Kazhim (as), en l’an 183 A.H., il ne sentit aucun pincement au cœur. Son plaisir allait en grandissant dans ses actions horribles et il eut recours au service d’un certain Jaloud qui dirigea une forte armée pour envahir Madina. Ce dernier était de confession chrétienne.

Auparavant, le quatrième Imam (as) avait vécu des évènements semblables après Kerbala. Chose surprenante, le huitième Imam (as) portait aussi le nom de ALI comme ses aïeux, le premier et le quatrième Imams Alayhimoussalam.

Afin d’avaliser sa politique d’extermination des descendants de la famille prophétique, Haroun inventa un motif en la personne de Mohammad, le fils du sixième Imam (as), pour annoncer que celui-ci s’est soulevé contre son autorité à Madina. Il ordonna donc de le tuer, d’arrêter tous les « Sadates », membres de la grande famille de l’Envoyé d’Allah et de mettre le feu à leurs habitations après avoir entièrement saccagé leurs biens. L’émissaire de Haroun mit son plan à exécution. La Ville des Lumières se transforma en brasier. Une seule maison en fut épargnée.

Jaloud se pointa devant la demeure de l’Imam (as) et lui fit part de l’ordre de son Calife : saccager tous les biens comme il est d’usage pendant la bataille contre les Infidèles. H° ALI RIDHA (as), le Descendant de l’Imam ALI (as), l’Emir des Croyants et le Vainqueur des grandes batailles combattues à l’avènement de l’Islam, ouvrit de ses propres mains les portes de sa résidence et lui laissa ravager les lieux.

Vint ensuite le tour des nobles Dames de la Maison Sainte. Jaloud proclama que tous les vêtements, à l’exception d’une seule Tchador, soient enlevés de leurs corps, de même tous les bijoux, jusqu’aux sandales et souliers. L’Imam (as) le consola et se chargea de procéder lui-même aux ordres qu’il avait reçus. Mais, cet agent de Haroun l’arrêta et l’enjoignit qu’il mènerait cette tâche de ses propres mains.

A ces mots, une vive irritation se dessina sur le visage saint du Descendant de H° Fatima Zahra (as) qui avait observé de la patience depuis le début de ce pillage et lui répliqua d’une voix forte :

« Ô Jaloud ! C’est impossible ! Tu ne pourras pas exécuter cet ordre ! »

L’envoyé de Haroun resta cloué de stupeur. Il comprit vite la situation. Il changea de ton. Il craignit qu’une seconde Kerbala ne surgisse dans Madinatoul Mounawwarah ou la Ville des Lumières..

« Ô le fils du Messager d’Allah ! J’ai confiance en vous, dit-il, d’une façon paisible. Vous faites ce qu’il est demandé par le Calife, poursuivit-il. »

L’Imam (as) pénétra dans la Salle de ces Honorables Dames et revint avec tout ce dont elles possédaient pour le déposer aux pieds du Chrétien Jaloud.

Madina vécut une nouvelle Shamé Gariban, la première nuit de l’après- Ashoura, pendant laquelle, les descendantes du Noble Prophète (saw) étaient pieds nus et n’avaient qu’une seule Tchador pour se couvrir le corps !

L’histoire de Kerbala , écrite à l’encre de sang, nous rapporte que dans ce désert, les Tchadors des Ahl oul Bayt de l’Imam Houssen (as) ont été enlevés à l’aide des pointes des lances, alors qu’ici l’ordre a été assigné de les retirer par les mains d’un homme étranger !

Le huitième Successeur de l’Envoyé d’Allah, semblable à l’Imamé Zamana (as) ou l’Imam de notre Temps, est celui, parmi tous les Imams, dont on attendait le plus sa venue et pour lequel, son grand-père et notre sixième Imam (as), répétait souvent que : « l’heure de Alimé Alé Mohammad ou le Savant de la Famille de Mouhammad approche. » Alimé Alé Mouhammad est le titre que Hazrat Jaafar Sadiq (as) a octroyé à son petit-fils, l’Etranger de Tûs, le véritable Successeur du Messager d’Allah, H° Ali RIDHA (as).

Les Compagnons du sixième Imam (as) racontent que, parfois, lorsque nous nous trouvions en présence de Hazrat Jaafar Sadiq (as), et que son fils, le septième Imam (as) pénétrait dans la salle, il déclarait que : « mon fils, Mousa Al Kazhim, est, dans la science, la patience, la vaillance, la noblesse, le comportement, la sainteté, dans tous les bons caractères, meilleur parmi tous les humains, mais je ne lui en préfère qu’une seule vertu.

« Yabn Rasouloullah ! Ô le fils du Messager d’Allah ! Quelle est cette vertu ? Lui demandèrent ses disciples.

– Un enfant naîtra de lui et qui accomplira la tâche que je n’aurai pu terminer. Il portera le surnom de Alimé Alé Mouhammad, » répondit l’Imam (as).

Avant qu’il soit conduit vers Bagdad par les soldats de Haroun Al Rachid, le septième Imam (as) réunissait, dans la Mosquée de Madina, soixante dix des savants et érudits les plus renommés, choisis parmi la descendance de H° Fatéma (as), qui étaient des hommes au rang distingué dont on ne doutait pas de leur crédibilité aux fonctions de l’Imamat. Il leur confia que son fils Ali RIDHA (as) lui succédera à cette charge Divine et leur fit signer la déclaration écrite le concernant.

H° Mousa Al Kazhim (as) ne souhaitait pas que les mêmes phénomènes que ceux qui surgirent pendant sa succession se reproduisent à sa mort. En effet, plusieurs sectes naquirent après le martyre de l’Imam Jaafar Sadiq (as) : certains prirent, comme leur guide, Ismaïl, le fils aîné de l’Imam, décédé pendant que son père vivait encore, tandis que d’autres, le second fils, Abdoullah ; une fraction de la population croyait à l’Imamat de Mohammad Hanafiyah, le demi-frère de l’Imam Houssein (as), celui qui était aussi considéré comme l’Imam vivant par une autre frange des Croyants, étant élevé au ciel comme fut le Prophète H° Issâ (as) .

Le septième Imam (as) avait donc bien préparé le terrain après lui et autant de dispositions n’avaient jamais été élaborées pour la succession aux fonctions sacrées de l’Imamat que celles conçues en faveur de H° Ali Ibn Mousa Ar RIDHA (as).

Mouhammad Ben Sanâne, un Etudiant du huitième Imam (as), vint le voir et exprima son étonnement :

« Ô mon Maître ! Vous venez de prendre les rênes de l’Imamat au moment où les gouttes du sang sacré de votre père coulent encore de l’épée de Haroun Al Rachid. Malgré cela, vous n’hésitez pas à proclamer à la face du monde la Mission dont vous avez reçu la charge, dit-il.

– Le Messager d’Allah avait annoncé, une fois, que le jour où Abou Jahal, le père de l’ignorance, Omar Ben Hassham de son vrai nom, parviendra à toucher à un seul de mes cheveux, croyez que je ne suis pas le Prophète d’Allah, lui répondit l’Imam (as). De même, poursuivit-il, je renouvelle aujourd’hui cette parole de mon ancêtre que le jour où Haroun réussira à toucher à un de mes cheveux, concluez que je ne suis pas l’Imam. »

Haroun Al Rachid régna pendant vingt trois ans dont dix ans pendant l’Imamat de Hazrat Ali Ibn Mousa Ar Ridha (as), toutefois, il ne put avoir prise sur lui.

Le septième Imam (as) passa de dix à quatorze ans dans les prisons de Haroun à Bassorâ et à Bagdad où celui-ci mit fin à ses jours en 183 A.H., en lui administrant du poison. Son vénérable corps fut déposé tel quel sur le pont de Bagdad. Un groupe de fidèles vint briser les chaînes qui attachaient les pieds et mains de l’Imam (as), après son martyr, et inhuma son corps saint au cimetière de Kazmaïn avec tous les honneurs dûs à son rang.

Après le martyr du septième Imam (as), Haroun jura de trancher la tête de quiconque se proclamerait le Successeur du Saint Prophète (saw). La même année, il vint à la Mecque. L’un de ses vizirs lui fit remarquer :

« Ô Calife ! Le moment de réaliser votre serment est imminent. Ali Ridha, le fils de Mousa Al Kazhim, se déclare Imam, l’Héritier de la Mission Divine du Saint Prophète de l’Islam, annonça-t-il.

– Nous avons tué le père. Veux-tu qu’on assassine aussi son fils ? Lui répliqua Haroun. Désires-tu qu’on élimine toute sa progéniture ? » Continua-t-il.

Maître d’une puissance inégalable de son époque, Haroun ne put tenir sa promesse et paya le tribut à la nature en l’an 193 A.H., après un quart de siècle d’un pouvoir sans merci. Il est enterré dans le palais d’été de Humaid Qahtabah, ancien gouverneur abbasside de Khôrassan, situé dans le village de Sanâbad à Tûs.

L’anecdote suivante nous permettra de comprendre l’étendue de ce vaste royaume. Lorsque le vent déplaçait de gros nuages qui couvraient le ciel bleu de Bagdad, Haroun y portait joyeusement son regard et proclamait :

« Ô les porteurs de la pluie ! Allez là où vous voulez vous diriger. La récolte qui se produira de votre eau reviendra toujours à moi. »

 

 

 

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