Dans le récit coranique, « les Compagnons de la caverne » désigne un groupe de croyants qui se sont réfugiés dans une grotte parce qu’ils fuyaient la tyrannie d’un roi païen. Là, ils ont dormi d’un sommeil profond qui dura de nombreuses années. Selon les hadiths, ce roi païen se nommait Doqyanûs (Dèce) et cela se passa à Afsûs (Ephèse).
L’histoire de ces Compagnons est mentionnée au début de la sourate mecquoise « Al-Kahf » (La caverne) avec quelques indications. Il est dit qu’un groupe de monothéistes se réfugia dans une grotte afin de fuir le culte des dieux mensongers et de se mettre à l’abri du préjudice de tyrans idolâtres. Dieu fit durer leur sommeil des années au fond de la grotte et, pendant ce temps, ils suscitaient tant de crainte que personne n’osa s’approcher d’eux. Ceux qui les voyaient pensaient qu’ils étaient éveillés.
Ces Compagnons passèrent ainsi des années (trois cent neuf années selon les versets du Coran) en sommeil. Lorsqu’ils se réveillèrent, Dieu en ayant décidé ainsi, ils pensèrent n’avoir dormi qu’une journée, ou peut-être un peu plus. L’un d’entre eux se rendit à la ville afin d’y chercher de la nourriture, les gens réalisèrent combien ce qui leur était arrivé tenait du prodige et décidèrent de bâtir une mosquée dans cette grotte. Dans les versets du Coran, il est question d’un chien accompagnant les Compagnons de la caverne et se tenant sur le seuil, les pattes de devant étendues, (Al-Kahf ; 18 : 9 à 22). Doqyanûs et Sâvedûsiûs (Tîzûsiûs), dont les noms sont cités au cours de l’histoire des Compagnons de la caverne, étaient des empereurs historiques de Rome. L’histoire connait le premier, Doqyanûs sous le nom de Dèce, tandis que le deuxième correspond à Théodose le second, empereur de l’Empire romain oriental. La ville d’Afsûs, le lieu où se déroula l’histoire des Compagnons de la caverne, est une ville historique d’Asie Mineure occidentale, proche du rivage de l’Aja (le fleuve Caystre), et constituait à l’époque romaine la capitale de l’Empire romain oriental.
Les Compagnons de la caverne dans les autres religions
Comme bien d’autres récits coraniques, l’histoire des Compagnons de la caverne a déjà été mentionnée par les auteurs issus des autres religions célestes. Cette histoire est notamment célèbre parmi les chrétiens. Sans nommer précisément les auteurs des autres religions, le noble Coran emploie le terme « yaqûlûn » pour évoquer le caractère célèbre et courant de cette histoire parmi les anciens, exposant même une divergence quant à certains détails qui apparaissent parmi les rapporteurs du récit.
Selon les chrétiens, les Compagnons de la caverne n’ont pas acquis leur renommée du fait de s’être cachés dans la grotte, mais plutôt du fait qu’ils se soient endormis et qu’ils étaient au nombre de sept. Dans la plupart des sources, et en particulier des sources chrétiennes occidentales, ils sont connus sous le nom de « Sept Dormants ». L’idée que les Dormants aient été au nombre de sept provient de récits plus anciens encore, cela étant exposé dans les écrits de certains chercheurs qui ont retrouvé des éléments de cette histoire dans des récits analogues provenant de sources juives, grecques et autres. On compte parmi ces récits l’histoire d’Anyâs (Hûnî), que l’on retrouve dans le livre de Ta‛ânit – une des parties du Talmud de Babylone – et dans laquelle il est question de son sommeil d’une durée de soixante-dix ans. De même, certains ont fait le rapprochement avec l’histoire hellénistique des « Neufs Dormants » de Sardaigne, citée par Aristote.
Les Compagnons de la caverne et leur traitement dans les hadiths
Le noble Coran raconte de manière abrégée l’histoire des Compagnons de la caverne, comme il le fait pour la plupart des autres histoires héritées des anciens. Aussi, c’est dans les hadiths et la tradition qu’il faut chercher les récits détaillés concernant ces histoires. De ce fait, à l’occasion de l’exégèse de la sourate Al-Kahf, les exégètes ont commenté le récit relatif aux Compagnons de la caverne, rapportant des hadiths différents à ce sujet. Parmi ces hadiths, l’un des plus marquants regardant la proximité avec les traditions chrétiennes est le hadith de Tabarî. Il est dit dans ce hadith qu’après ‘Isâ (1) (as), les chrétiens revinrent sur leur foi et se tournèrent vers l’idolâtrie, encouragés en cela par le roi de l’époque, Doqînûs (Doqyânûs). La dureté du roi aidant, les monothéistes furent tués ou, comme les Compagnons de la caverne qui étaient de noble lignée, s’en remirent au Seigneur et prirent la fuite. A ce hadith de Tabarî, il faut ajouter quelques points que l’on trouve dans d’autres hadiths pour préciser que les Compagnons de la caverne prirent la fuite à l’occasion d’une des courtes absences de Doqyânûs hors de sa capitale. Ils se cachèrent dans une grotte de la montagne Banjalûs, mais leur cachette fut rapidement découverte. Doqyânûs et sa suite vinrent à la grotte et, pensant qu’en la fermant sur les jeunes endormis il allait les enterrer vivants, il donna l’ordre de sceller l’entrée de la grotte. A ce moment-là, deux compagnons parmi les compagnons de Doqyânûs, nommés Bidarûs et Rûnâs, qui dissimilaient leur foi, écrivirent l’histoire des Compagnons de la grotte sur une tablette et la déposèrent dans un coffret aux abords de l’entrée de la grotte, afin que dans le futur, les gens puissent être informés à leur propos.
Le réveil des Compagnons de la caverne
Une autre partie de l’histoire se trouve relatée dans un hadith rapporté par Qatâda, qui s’intéresse aux événements qui se déroulèrent après le réveil des Compagnons de la caverne. Il est dit dans ce hadith que longtemps après l’endormissement des Compagnons de la caverne, de nombreux changements étaient intervenus dans leur ville d’Afsûs, et qu’en outre la royauté sur cette terre avait échue à un roi juste nommé Tîzûsîs (Théodose II), descendant de Doqyânûs. Par ailleurs, les gens de la ville avaient acquis des croyances diverses à propos de la question de la résurrection et de la renaissance du corps dans l’autre monde. Ils s’étaient séparés en deux groupes principaux, soit les partisans d’une vie corporelle future et les opposants à cette croyance. Le roi, qui était croyant, s’était attaché à résoudre ce problème et c’était pour cela tourné vers le Seigneur.
C’est à ce moment que Dieu réalisa son vœu et tira les jeunes Compagnons de la caverne de leur long sommeil. S’étant réveillé, Yamlikhâ alla à la ville afin de se procurer de la nourriture et constata alors que la contrée présentait les signes de la foi. Lorsqu’il présenta ses pièces de monnaie aux marchands, ces derniers doutèrent de lui et pensèrent qu’il avait déniché un trésor. Une fois que Yamlikhâ leur eut conté son histoire, les uns le prirent pour un fou et les autres pensèrent qu’il entendait ainsi cacher le lieu où il avait découvert le trésor. Ils le conduisirent auprès de deux notables de la ville nommés Aryûs et Astyûs. En fin de compte, les gens acceptant de croire à une partie de ce qu’il leur disait, ils allèrent à la grotte et y découvrirent le coffret contenant deux tablettes sur lesquelles était racontée l’histoire complète des Compagnons de la caverne. Alors, tous crûrent ce qui c’était passé et prirent cette histoire comme une preuve de la véracité de la résurrection corporelle. Le roi lui-même se précipita à Afsûs afin de voir ces jeunes et remercia le Seigneur. Là, Dieu rappela leur âme. Ils déposèrent leur corps dans la grotte et édifièrent une mosquée à l’intérieur, juste à côté d’eux.
Dans un autre hadith rapporté par Tabarî de Wahab ibn Minba, il est dit que lorsque l’un des apôtres de ‘Isâ Masîh (2) (as) eut l’intention d’entrer dans la ville des Compagnons de la caverne, il remarqua que pour ce faire on était contraint de se prosterner devant une idole placée à la porte de la ville. Par conséquent, il se rendit dans un hammam à proximité de la ville et devint le gardien de l’établissement de bains afin de guider les gens sur la voie droite. Un jour, le fils du roi se rendit dans cet établissement avec pour dessein de se livrer à quelque obscénité. La colère divine s’abattit sur lui et il trépassa. Le roi ordonna alors que l’on exécute le propriétaire du hammam. Lorsqu’il apprit la nouvelle, le propriétaire du hammam s’enfuit de la ville en compagnie d’un groupe de croyants. En chemin, ils se joignirent à un berger accompagné d’un chien et se cachèrent dans une grotte. La dernière partie de ce hadith narre la manière dont ils furent découverts par Doqyânûs et emmurés dans la grotte, d’une manière analogue au hadith précédent.
En plus des hadiths qui en relatent principalement l’histoire, il arrive que le récit des Compagnons de la caverne soit rapporté dans un contexte différent. Par exemple, dans un hadith rapportant la réponse que fit l’Imâm ‘Alî (as) à des juifs lui ayant posé une question, parmi les éléments connus de l’histoire, on apprend que les jeunes de la caverne se tournèrent vers le monothéisme lors d’un événement précis : ils virent un jour l’effroi sur le visage de Doqyânûs alors même que ce dernier plaidait pour sa propre divinité. Etant donné que cela n’avait aucun sens que Dieu ressente la peur et l’effroi, ils réalisèrent que le roi n’était qu’une créature et se tournèrent alors vers le monothéisme, fuyant du même coup le palais de Doqyânûs. Dans ce hadith, la place du chien des Compagnons de la caverne représente un sujet en soi et une partie du récit est consacrée à relater la conversation que cet animal eut avec ceux qui se cachèrent dans la grotte.
Il est un point général au sujet des hadiths : la proximité de certains noms précis dans les récits chrétiens et musulmans montre les relations étroites qu’entretiennent ces récits des deux traditions. A titre d’exemple, on remarquera que le nom de la montagne apparaissant dans le récit chrétien est Ankhalûs tandis que dans les hadiths musulmans on parle de Bandjalûs. De même, un hadith évoque également l’entrée d’un berger dans la grotte, dont le nom est Awliâs, alors que dans le récit chrétien, le propriétaire terrien ayant pris place dans la grotte se nomme Adâlîs. Tabarî rapporte un hadith au sujet du nombre des Compagnons de la caverne : ils sont huit et s’appellent Maximiliân, Mahsimiliân, Yamlikhâ, Martûs, Kasûtûnes, Birûnes, Dînomûs et Qâlûs, et nous pouvons noter que ces noms sont tout à fait comparables à ceux de la tradition chrétienne : Maximien, Malchus, Jean, Marcien, Constantin, Denis et Sérapion.
Divergences sur les détails de l’histoire
Les divergences apparaissant dans les hadiths musulmans portent notamment sur l’époque et le lieu de l’événement. Il se trouve également des divergences à propos des noms des compagnons et de quelques notions afférentes. Une partie des sujets abordés lors de l’exégèse de la sourate Al-Kahf et des hadiths à propos des Compagnons de la caverne se consacre aux sources anciennes. Par exemple, on s’y demande d’où provient l’expression coranique « fitya / فتيه ». La plupart des exégètes, s’attachant au sens littéral du terme « fitya / فتيه » dans le dixième verset de la sourate Al-Kahf, considèrent qu’il désigne le fait que les Compagnons de la caverne forment « un groupe de jeunes gens ». Or selon certains hadiths, l’emploi de du terme « fitya / فتيه » ne désigne pas leur âge, mais pointe la valeur de leur degré spirituel. Dans ce groupe de hadiths, et en particulier celui de l’Imâm Al-Sâdeq (as), il s’agit de vieillards qui, en raison de leur foi, du fait de s’être abstenu de ce qui est interdit et de leur anticipation sur les bonnes mœurs, ont été désignés par cette qualité.
De même que les versets du Coran faisant état de la divergence qu’ont les gens au sujet du nombre des Compagnons de la caverne (Al-Kahf ; 18 : 22), les hadiths et les exégèses divergent quant à leur nombre. Le chiffre le plus couramment évoqué est celui de neuf compagnons. Il est écrit que des divergences analogues se retrouvent également parmi les chrétiens, sachant par exemple que Ya‛qûbiya considère qu’ils étaient trois et que Nestoryân affirme qu’ils étaient cinq. Cependant, les exégètes musulmans évitent de prendre part à cette dispute, faisant de cette attitude une réaction naturelle à la critique que fait le noble Coran à propos de la divergence sur le nombre des Compagnons de la caverne. Pourtant, il est parfois rappelé dans certaines sources exégétiques qu’il est probablement possible de déduire, à partir du verset vingt-deux de la sourate Al-Kahf, que le Coran approuve le chiffre sept, car dans le saint verset, cette parole n’a pas été affublée, comme les autres citations, de l’expression « mystère ».
L’époque à laquelle vécurent les Compagnons de la caverne est située, dans la plupart des hadiths, avant le moment où fut suscité son Excellence ‘Isâ (as), tandis que l’époque de leur réveil est située après son passage sur terre. De même, les rois ayant régné aux deux époques qui les concernent furent connus, dans l’ordre, sous les noms de Doqyanûs (Dèce) et Thâwdûsyûs (Théodose). Le lieu de la grotte apparaît également ailleurs que dans les hadiths principaux qui désignent la ville d’Afsûs : c’est un sujet de divergence. Il se peut que la raison en soit l’attrait causé par cette histoire à des peuples différents. Dans certains hadiths, il est dit que dans un village nommé Lûcha, dans la région de Granada (Grenade, en Andalousie), on a vu une grotte dans laquelle se trouvent des cadavres ainsi que celui de leur chien, les gens présumant qu’il s’agit là des Compagnons de la caverne. Auprès de cette grotte se trouve une mosquée, et à côté de la mosquée un château portant le nom de Raqîm, tandis qu’au nord de Granada se trouve une ville ancienne appelée Doqyûs.
Des fouilles à la recherche des Compagnons de la caverne
La place importante qu’occupe l’histoire des Compagnons de la caverne auprès des musulmans, ainsi que la croyance qu’il existe et que l’on peut toujours trouver des traces de leur grotte, font que maintes fois des fouilles ont été entreprises au cours de l’histoire. Du fait qu’il est célèbre que les Compagnons de la caverne aient demeuré dans des villes romaines, les chercheurs se sont plutôt orientés vers les terres de l’antique Empire romain, dans le but de trouver des données nouvelles et incontestables à leur propos. Dans un hadith rapporté par ‘Ibâda ibn Sâmet Sahâbî, il est dit qu’Abû Bakr l’envoya à Rome en ambassade et qu’il vit à Constantinople une montagne rouge dans laquelle se trouvait une grotte fermée par une porte en métal et contenant treize dépouilles. Du fait de cette tradition, les gens de la région décidèrent de se rendre à la grotte chaque année et d’y organiser une cérémonie en leur honneur. De même, ils croyaient que ces trépassés étaient les Compagnons de la caverne, des prophètes ayant vécu quatre cents ans avant son Excellence ‘Isâ (as).
D’autres traditions rapportées à ce sujet font état du témoignage d’un individu nommé Mojâhid ibn Yazîd, qui entreprit aux alentours de l’année 102 de l’Hégire lunaire un voyage dans la région de Tarsûs (située au sud-est de la Turquie actuelle). Il arriva à la ville de ‘Omûriya et y vit au sommet d’une montagne treize dépouilles ayant trouvé le repos à l’intérieur d’une grotte. Chaque année, les gens de la région organisaient une cérémonie, se réunissant en l’honneur de ces dépouilles et leur témoignant du respect. Mojâhid dit alors qu’il s’agit peut-être des Compagnons de la caverne. De même, il est rapporté dans les récits historiques que le calife abbaside Al-Wâthiq Billâh a envoyé Mohammad ibn Mûsâ Monajim en terre romaine afin de s’enquérir à propos des Compagnons de la caverne et de ceux de Raqîm. Mohammad ibn Mûsâ rapporta avoir vu dans la fissure d’une montagne des morts enroulés dans une toile enduite de camphre. Il dit avoir touché ces corps et constaté que même leurs cheveux étaient encore sains. Cependant, il doutait qu’il s’agissait des Compagnons de la caverne.
Dans certains de ces récits, il est notamment dit que les sources faisant état des cérémonies que les chrétiens organisent chaque année en l’honneur des Compagnons de la caverne se retrouvent autant dans le corpus du christianisme oriental que dans celui du christianisme occidental. Une telle cérémonie se trouve inscrite dans le calendrier religieux de l’église catholique romaine, le vingt-sept janvier, et dans celui de l’église orthodoxe grecque, le deux ou le quatre août.
Les Compagnons de la caverne et les Compagnons de Raqîm
Du fait que dans le noble Coran, lors de la narration de l’histoire des Compagnons de la caverne, le terme raqîm se trouve apparenté à celui de kahf (caverne) (Al-Kahf ; 18 : 9), dans certaines traditions, les Compagnons de Raqîm et ceux de la caverne sont pris pour un seul et même groupe. Dans ces sources, différentes significations sont mentionnées pour le terme raqîm convenant indifféremment dans les deux cas. Or face à ces hadiths, il en existe également d’autres qui voient les deux groupes séparément et rapportent des récits indépendants au sujet des Compagnons de Raqîm.
Entre ces deux, le premier point de vue jouit de davantage de popularité, et cela a eu pour conséquence que les récits des Compagnons de la caverne et des Compagnons de Raqîm sont placés les uns à côté des autres. Dans ces hadiths, le terme raqîm comporte diverses significations le mettant en lien avec les Compagnons de la caverne. Dans la plupart des sources, en considérant la racine lexicographique de raqîm, on lui attribue le sens d’« écrit », ou plus précisément on a considéré qu’il désignait les deux tablettes retrouvées dans la grotte sur lesquelles a été consignée l’histoire des Compagnons de la caverne. Certains ont même argué que Raqîm désignait la terre sur laquelle se trouve la grotte des Compagnons de la caverne. Une tradition dit que Raqîm est une ville romaine, auprès de laquelle se trouve une grotte dans laquelle se trouvent vingt-et-une dépouilles dont l’aspect rappelle les Compagnons de la caverne.
Dans ce groupe de hadiths qui relate les deux histoires de manière séparée, il est dit des Compagnons de Raqîm qu’ils étaient trois jeunes gens qui sont allés dans une grotte et s’y sont trouvés emprisonnés lorsqu’on en ferma l’entrée. Après avoir beaucoup imploré, ils décidèrent que chacun d’eux expose l’une de ses bonnes actions, peut-être Dieu allait-Il ainsi faire preuve de miséricorde et ouvrir l’entrée de la grotte. Ils s’exécutèrent et se trouvèrent libérés de la grotte.
Les Compagnons de la caverne vus par les différentes sectes musulmanes
Parmi les traditions rapportées au sujet de la façon dont les musulmans considèrent les Compagnons de la caverne, se trouve un hadith chiite ayant cette teneur : le Prophète de l’islam (s) désirant établir la légitimité de l’Imâm ‘Alî (as), l’envoya à l’endroit où reposent les compagnons de la caverne, accompagné de quelques chefs parmi les compagnons. Chacun des participants à l’expédition avait été chargé par le Prophète (s) de transmettre son salâm aux compagnons de la caverne, or aucun d’entre eux ne reçut de réponse venant de l’intérieur de la grotte. Lorsque son Excellence ‘Alî (as) leur adressa le salâm, la réponse lui en fut donnée. Les compagnons (du Prophète (s)) s’en étonnèrent et en demandèrent la raison. Au cours de leur conversation avec les compagnons de la caverne, ces derniers présentèrent ‘Alî (as) comme le successeur du Prophète (s).
On peut ici faire allusion à un autre hadith qui dit que lorsque Abû Tâleb dissimula sa foi, il incarnait de fait un exemple de la dissimulation de la foi des gens de la caverne, et si l’on rapproche les deux hadiths, on peut insister sur l’importance de la dissimulation.
Dans l’exégèse coranique, les sources indiquent que la profession des Compagnons de la caverne était celle de changeur. Dans un hadith de l’Imâm al-Sâdeq (as) faisant leur éloge, les Compagnons de la caverne ne sont pas des changeurs de dirhams et de dinars, mais des changeurs de paroles erronées en paroles véridiques. Les Compagnons de la caverne jouissent d’une place particulière parmi les sectes musulmanes. De telle sorte que les shuyûkh (3) Ismaéliens par exemple ont tiré profit de ce récit en matière d’imamat et de wasiya (4) . Ils ont notamment pris comme hadith de référence celui qui parle de sept jeunes gens et l’ont rapproché du nombre de leurs Imâms. De la même façon, leur exégèse rapproche les trois cent neuf années de sommeil dans la grotte des trois cents orateurs et des neuf prophètes et successeurs ismaéliens.
La même place de choix concernant les Compagnons de la caverne se retrouve dans le soufisme ; on a recours à leur histoire en particulier lorsqu’il est question de chevalerie spirituelle et de miracles des saints.
L’histoire de ces jeunes gens est également largement diffusée dans la littérature persane. La quasi-totalité des poètes persans, dont Sanâ’î, Sa‛dî, Mawlavî (5) et ‘Attâr les ont mentionnés dans leurs œuvres. Entre autres choses, le chien des Compagnons de la caverne symbolise l’attente de l’apparition et la marche sur la voie de la vérité. En tant que créature étant passée du degré animal à celui de ceux qui ont trouvé le chemin de Dieu, et qui découvre dans l’intervalle le joyau de la vérité, il possède une grande importance.
Notes
2 Jésus Christ (as). Il est bon de rappeler ici que le terme arabe de « masîh » correspond exactement à celui, grec, de « christos », les deux désignant une personne initiée, ointe, le mot « christ » ne comportant aucune analogie avec la croix.