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Dieu dit dans Son Noble Livre : « Dieu ne veut qu’écarter de vous la souillure ô Gens de la Famille, et vous purifier totalement. » (Coran XXXIII, 33)
Parmi les Ahl ul-Bayt (P) (Les Gens de la Famille prophétique) figure l’Imam Muhammad al-Bâqir (P) dont nous célébrons le martyr aujourd’hui.
Le cinquième Imam est Mohammed surnommé Al Bâqir (P). Son père est l’Imam Ali fils de Al Hussein (P), plus connu sous le nom de Zein El Abédine (P). Sa mère est Fatima (P), fille de l’Imam Al Hassan (P).
Il est né le lundi 1er Rajab de l’an 57 de l’Hégire. Son père et sa mère étaient respectivement le petit-fils et la petite-fille de l’Imam Ali Ibn Abi Talib (P) donc du Prophète (P).Ainsi, il était le premier à être descendant de l’Imam ‘Ali (P) des deux côtés en plus d’être totalement imprégné de l’environnement éducationnel du Prophète de l’Islam (P).
Il eut également le malheur de vivre à l’âge de quatre ans le massacre de Karbala où fut martyrisé son grand-père Al Hussein (P).
Il possédait d’immenses connaissances sur la Science du Livre et de la Sunna, et sur les réalités et les grands défis des Musulmans de son temps. Les grands savants musulmans, à savoir ceux qui reconnaissaient son imâmat mais aussi ceux qui ne le reconnaissaient pas, assistaient à ses cours et croyaient également en sa suprématie scientifique et en ses immenses capacités intellectuelles. Les califes omeyyades sollicitaient l’Imam (P) à chaque fois qu’ils se trouvaient dans l’incapacité de résoudre des problèmes cruciaux. Par exemple, lorsque le Calife omeyyade a voulu remplacer la monnaie byzantine en cours parmi les Musulmans par une monnaie islamique, et qu’il l’a consulté parce que l’empereur byzantin avait menacé de frapper une monnaie sur laquelle seraient inscrites des injures adressées au Prophète (PBDLF).
L’Imam (P) lui avait alors recommandé de ne pas renoncer à frapper la monnaie islamique et l’avait encouragé à répondre aux menaces proférée par l’empereur avec fermeté, en déclarant que ce dernier n’oserait jamais frapper ce genre de monnaie, du fait même que les Musulmans allaient refuser de l’adopter. L’empereur byzantin qui voulait contraindre psychologiquement les musulmans, a finalement renoncé à son projet. L’Imâm (P) a joué un grand rôle dans le conflit entre les Omeyyades et les Abbassides. Sans être en bons termes avec les Abbassides, il a demandé à Al-Kumayt ibn Zayd al-Asadi, un célèbre poète connu par sa sympathie à l’égard des Gens de la Famille (P), de composer des vers qui pourraient contribuer à la chute de la dynastie des Omeyyades qu’il considérait comme un grand mal. L’Imâm (P) a lancé sa grande école à laquelle collaborait son fils l’Imam as-Sâdiq (P). Lorsque nous étudions les Traditions des Gens de la Maison prophétique (P), nous constatons que la plupart de ces Traditions dans les domaines de la jurisprudence, de la loi, de la morale et de tout ce qui touche le domaine de la vie ont pour origine ces deux Imâms. En effet l’Imam Al-Bâqir (P) et l’Imam As-Sâdiq (P), par rapport aux autres Imâms (P), ont bénéficié d’une certaine liberté dans la mesure où l’attention des Omeyyades était focalisée sur la défense de leur Etat, alors que les Abbassides eux se préparaient à déclarer leur révolution.
Vivre avec Dieu
L’Imâm (p) vivait dans tous ces états avec Dieu. Il L’évoquait même lorsqu’il se trouvait en pleine conversation avec ses compagnons. Il rassemblait ses enfants et, jusqu’au lever du soleil, il leur recommandait de lire le Coran et d’évoquer Dieu, choses qui étaient toujours présentes dans sa vie active et dans sa ferme à Médine où il travaillait lui-même comme le faisaient tous les autres Imâms.
‘Ali Ibn al-Munkadir disait : « Je ne pensais pas que ‘Ali Ibn al-Hussein (le père de l’Imâm al-Bâqir (p)) pouvait avoir un descendant qui lui ressemblait -car il était incomparable quant à sa science, son ascétisme, sa dévotion et ses moralités. J’ai donc rencontré Muhammad Ibn ‘Ali et j’ai voulu le sermonner, mais voilà que je me trouvais sermonné par lui : Je suis sorti à Médine par une journée où il faisait très chaud et j’ai vu Muhammad Ibn ‘Ali al-Bâqir (p) qui, corpulent, travaillait et transpirait fort. Je lui ai dit : ‘Comment se fait-il qu’un vieux Qurayshite sorte pour faire des gains alors qu’il fait si chaud ? Qu’aurais-tu fait si la mort te surprendrait en cet état’ ? Il s’est arrêté et m’a répondu : ‘Je suis sorti pour chercher mes subsistances pour moi-même et pour ma famille, chose que Dieu aime et qui m’épargne la peine d’avoir besoin de tes semblables. Quant à ce que tu dis au sujet de la mort qui pouvait me surprendre à un moment où je suis en obéissance à Dieu, ce qui me fait peur c’est d’être surpris par la mort à un moment où je suis en désobéissance à Dieu ».
Le Coran comme balance
D’après ses biographes, l’Imâm (p) -qui n’était pas assez fortuné- n’oubliait jamais de donner aux pauvres et aux démunis de Médine. Il demandait aux gens de ne pas parler au sujet de ce qu’ils ne savent pas : « Parlez au sujet de ce que vous savez, car celui qui isole un verset coranique /de son contexte / dégringole du haut du ciel vers la terre ». Ces paroles sont adressées à ceux qui interprètent le Coran à leur guise ou débattent dans la jurisprudence sans connaissance.
L’Imâm (p) apprenait aux gens les manières de se comporter les uns envers les autres : « Dites aux gens le meilleur de ce que vous vous aimeriez entendre dire à vous mêmes, car Dieu déteste celui qui maudit les croyants, qui les insulte et les accusent en faux, Il déteste celui qui est insolent et indécent ainsi que celui qui demande et s’obstine à demander, mais Il aime celui qui est magnanime et vertueux ».
En outre, l’Imâm (p) insistait sur la nécessité de distinguer le faux du vrai parmi les Traditions attribuées au Prophète (P) et aux Imâms (p) et ce en les examinant à la lumière du Coran, en faisant que le Coran soit « la balance » qui détermine leur vérité ou leur fausseté : « Accepte toute Tradition compatible avec le Coran qu’elle soit rapportée par une personne charitable ou par une personne immorale, et n’accepte pas toute Tradition incompatible avec le Coran qu’elle soit rapportée par une personne charitable ou par une personne immorale ». Le Coran est la mesure et la balance car Dieu, le Très haut, dit : ((Une lumière et un Livre évident vous sont venus de Dieu)) (Coran V, 15), le Coran étant la lumière qui éclaire ce qui n’est pas lui et ne peut point être éclairé par ce qui n’est pas lui.
Un pionnier de la solidarité sociale
L’Imâm (p) a appelé à la solidarité sociale, chose qu’il importe d’évoquer à l’occasion de la période du pèlerinage où certaines personnes s’interdisent d’aider leurs proches, leurs voisins ou leurs amis parmi les pauvres et les orphelins, mais ils vont tous les ans au pèlerinage majeur, au pèlerinage mineur ou à la visite des mausolées des Saints.
L’Imâm al-Bâqir dit à ce propos : « Entretenir les membres d’une famille musulmane en dissipant leur faim, en les habillant et en les mettant à l’abri de la mendicité m’est préférable d’aller au pèlerinage une fois, deux fois, dix fois et même soixante-dix fois ». La Tradition dit à ce propos : « Les gens sont la famille de Dieu ; celui qui, parmi eux est le mieux aimé par Dieu est celui qui est utile pour la famille de Dieu, celui qui donne de la joie aux membres d’une famille ».
La voie du chiisme
L’Imâm al-Bâqir (p) enseignait aussi aux Chiites la façon d’être un vrai Chiite. A ce propos, il s’adresse à Jâbir Ibn ‘Abdullâh en disant : « Ô Jâbir ! Est-il suffisant pour ceux qui prétendent être de Chiites de dire qu’ils nous aiment, nous les Gens de la Famille ? Par Dieu, nos Chiites (partisans) ne sont autres que ceux qui craignent Dieu et qui Lui obéissent. Ils n’étaient connus que par la modestie, par l’humilité devant Dieu, par la fidélité, par l’évocation permanente de Dieu, par le jeûne, par la prière, par la charité envers les parents, par les services offerts aux voisins démunis, par la sincérité des paroles, par la récitation du Coran, et par le fait de s’interdire de dire autre chose que le bien. Ils étaient les fidèles parmi les leurs ».
Il dit aussi : « Il se peut que quelqu’un dise qu’il aime ‘Ali et qu’il le prend pour dirigeant, mais sans agir en conséquence. Il ne suit pas ses actes et son amour pour ‘Ali ne lui est d’aucune utilité ». Car le vrai amour est celui qu’on porte à la conduite de la personne avant la personne elle-même.
L’Imâm (p) poursuit son enseignement en ces termes : « Craignez Dieu et agissez pour ce qui est chez Dieu. Il n’existe aucune parenté entre Dieu et quiconque parmi les gens. Celui qui, parmi les serviteurs, est le plus aimé par Dieu, le Très Haut, est celui qui Le craigne le plus, celui qui agit le plus dans Son obéissance. Ô Jâbir ! On ne s’approche de Dieu que par l’obéissance, alors tout chacun qui obéit à Dieu est notre partisan et tout chacun qui désobéit à Dieu est notre ennemi. Par Dieu ! Nul ne peut prétendre à être notre partisan que par l’action et par le fait de s’écarter des interdits fixés par Dieu ».
Après quoi, l’Imâm (p) aborde la question de l’extrémisme en disant : « Ô Chiites ! Soyez au milieu, alors ceux qui avancent vers l’extrême retourneront vers vous et ceux qui sont à l’arrière vous suivront ». Alors, l’un des Ansârs du nom de Sa’d lui a dit : «Que je sois sacrifié pour toi ! Qui sont les extrémistes ? Et l’Imâm (p) de répondre : « Des gens qui disent à notre égard des propos que nous ne disons pas de nous-mêmes. Ceux-là n’ont rien de nous et nous n’avons rien d’eux ». Et ceux qui sont à l’arrière, qui sont-ils ? a encore demandé l’Ansarite. Ils sont, a répondu l’Imâm (p), ceux qui cherchent le bien auront le bien. Par Dieu ! Nous ne portons pas un testament de Dieu, nous n’avons aucun privilège au près de Dieu, nous n’avons avec Lui aucun lien de parenté et nous ne nous approchons de Lui que par l’Obéissance. Ceux qui parmi vous Lui obéissent tireront du profit en nous suivant. Attention ! Attention ! Ne Soyez pas dupes ! ».
A quelqu’un qui a dit que les Chiites sont très nombreux dans son pays, l’Imâm (p) a répondu : « Les riches de ton pays soutiennent-ils les pauvres, les bienfaisants pardonnent-ils les malfaisants, et les uns se traitent-ils d’égaux à égaux ? ». Et comme l’homme a répondu par la négative, l’Imâm a dit : « Les Chiites n’agissent pas de la sorte ».
L’école des Imâms (p)
Voilà, mes chers, ce qu’étaient nos Imâms qui nous lient à Dieu et qui nous lient les uns aux autres. Ils veulent que nous communiquions, que nous solidarisions, que nous nous unissions et que nous nous sentions -chacun selon ses capacités- responsables de l’Islam et des Musulmans.
Les Gens de la Famille, ce sont eux qui établissent la liaison entre ce monde-ci et l’Autre monde, qui nous demandent de nous rapprocher de Dieu en portant nos responsabilités envers l’humanité et la vie, qui nous enseignent d’être ouverts à l’amour et non pas à la haine. Voilà ce qu’est le message de l’Islam ; les Gens de la Famille sont les Imâms de l’Islam authentique qui nous lie à Dieu, le Très Haut, par la voie la plus courte.
Son martyre
L’Imam al-Bâqir (P) est mort en martyre, le septième jour du mois Dhu al-hijja de l’an 114 H. A propos de l’an et le martyre de l’Imam al-Bâqir (P) existe de différentes opinions, et de divergences sur les personnes qui ont contribué à son assassinat.
Certains considèrent Hishâm b. Abd al-Malik la personne qui causa sa mort(1) ; d’autre pensent que Ibrâhîm b. al-Walîd fut la cause de son empoisonnement(2) ; certains considèrent Zayd b. Hasan comme acteur d’un complot contre lui(3).
En tous les cas, le martyre de l’Imam al-Bâqir (P) fut contemporain de l’époque du gouvernement de Hishâm b. Abd al-Malik qui régna de 105 H à 125 H(4).
Ces récits, malgré leurs divergences, semblent ne pas être loin de la vérité car il est possible que plusieurs personnes se soient co-alliés dans son assassinat, et que chaque sources parle d’un eux. Compte tenu de la situation de l’époque et de l’extrême hostilité des Umayyade à l’égard des descendants de l’Imam Ali (P), cette coalition contre l’Imam al-Bâqir (P), semble tout à fait possible.
Ses femmes et ses enfants
Selon différentes sources, Umm Farwa fut l’épouse de l’Imam al-Bâqir (P) et la mère de l’Imam Ja’far as-Sâdiq (P). Une autre femme, appelé Umm Hakîm fille de Asîd ath-Thaqafî, a était cité comme son épouse et la mère de deux enfants ainsi que une servante qui fut la mère de trois enfants des siens (5).
L’Imam al-Bâqir (P) eut donc sept enfants dont cinq garçons et deux filles.
- Ja’far
- Abd Allah. La mère de ces deux enfants fut Umm Farwa, fille de Qâsim b. Muhammad
- Ibrâhîm
- ‘Ubayd Allah. La mère de ces deux enfants fut Umm Hakîm, fille de Asîd ath-Thaqafî.
- Ali
- Zaynab. La mère de ces deux enfants fut une servante.
- Umm Salama, dont la mère fut également une servante(6).
Son imamat
La période de l’Imamat de l’Imam al-Bâqir (P) commença durant la 95ème année de l’hégire, suite au martyre de son père, et continua jusqu’à la fin de sa vie, en 114 H. (ou 117 H. d’après certains).
Preuves de son imamat
Jâbir b. Abd Allah a rapporté :
Prophète Muhammad (p) en réponse à la question de Jâbir à propos des Imams suivants l’Imam Ali (P) dit :
Imam al-Hasan al-Mujtabâ (P) et Imam al-Husayn (P), sont deux seigneuries des jeunes de Paradis, ensuite Imam as-Sajjâd (P), le seigneurs des pieux de son époque, puis al-Baqîr, Muhammad b. Ali, que toi, Jâbir, tu le verra …”(7).
Il est rapporté que l’Imam as-Sajjâd (P) attirait souvent les attentions vers son fils, al-Bâqir. Par exemple quand un de ses fils, ‘Umar, lui demanda de la raison de l’importance qu’il attribuait à al-Bâqir, l’Imam as-Sajjâd (P) répondit :
C’est parce que l’Imamat sera continué par ses descendant jusqu’à ce que notre Qâ’im se lève et remplisse le monde de la justice. Il est donc et l’Imam et le père des Imams.
Le Cheikh al-Mufîd écrit :
l’Imam Muhammad al-Bâqir (P) fut supérieur à tous ses frères et confrères dans la science et dans la connaissance, comme dans la piété ; tout le monde était admiratif à son égard et il était respecté de tous. Ce qu’il a pu produire dans le domaine de la science religieuse, de la connaissance coranique, de la tradition prophétique, de la littérature et de la morale, est invraisemblable et unique, et personnes d’autres parmi les enfants de l’Imam al-Hasan al-Mujtabâ (P) et de l’Imam al-Husayn (P) n’a pu faire comme lui. Son niveaux de connaissance et la grandeur de son esprit était tellement important qu’il fut exemplaire parmi tous les savants [de son époque] qui écrivirent des commentaires et des poésies en son éloge (8).
Les califes de son époque
L’époque de l’imamat de l’Imam Muhammad al-Bâqir fut contemporaine de cinq califes Umayyades, à savoir :
- AL-Walîd b. Abd al-Malik (86 H-96 H)
- Sulaymân b. Abd al-malik (96 H-99 H)
- ‘Umar b. Abd al-‘Azîz (99 H-101 H)
- Yazîd b. Abd al-Malik (101 H-105 H)
- Hishâm b. Abd al-Malik (105 H-125 H)
Ces califes, d’après des récits rapportés, firent tous injustes à l’égard des chiites, sauf ‘Umar b. ‘Abd al-‘Aziz (99-101 H.). D’après les propos rapportés à propos de ces califes, ils appliquèrent beaucoup de discrimination et de vergences contre les chiites.
Notes:
1- Misbâh Kaf’amî, p. 691
2- Dala’il al-Imamat, p. 216; Manâqib, Ibn Shahr Âshûb, vol. 4, p. 228
3- Firaq shi’a, 61; I’lâm alwarâ, p.259
4- Ya’qubî, vol.2, p.289, Murûj al-Zahab, vol.3, 219
5- Mufîd, ibid., 524
6- Mufîd, ibid; Amin al-Islam Tabarsî, I’lâm al-warâ, traduit par ‘A. Atârudi, p.375
7- Kifâyat al-Athar, 144-145
8- Mufîd, al-Irshâd, vol. 2, p. 157