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Les sentiers philosophiques guidèrent le penseur Hoffmann vers l’Islam
L’ex-Ambassadeur allemand raconte son périple religieux dans son ouvrage La route vers la Mecque
Dr Murad Hoffmann, ex-Ambassadeur d’Allemagne, affirme qu’il est difficile pour un individu qui s’est penché sur l’étude approfondie et mûrement réfléchie de l’islam, d’expliquer clairement les motifs et les justifications qui sous-tendent sa résolution d’embrasser cette religion. Il adopte la doctrine d’Abou Hâmid al-Ghazâli(1) pour faire l’apologie de la foi, soulignant qu’il n’est pas aisé pour l’homme de faire le compte rendu et l’évaluation de sa propre évolution intellectuelle.
Lorsque j’ai informé Hoffmann que je préparais un ouvrage sur les nouveaux musulmans, lors d’une rencontre à Chicago, aux U.S.A, il a apprécié l’idée et me parla de certains aspects importants de son odyssée religieuse, me recommandant de me référer à son ouvrage intitulé La Route vers la Mecque, dans lequel il a consigné les détails du périple initiatique qui le mena à l’islam.
En substance, Hoffmann raconte qu’il ne lui a fallu que quelques jours avant de proclamer son islamité par la prononciation des deux chahadat, le 25 septembre 1980. S’agissant de l’autoévaluation de l’individu, Hermann Hesse a écrit, en 1919, dans l’une de ses nouvelles, Klein und Wagner, que “parler est le meilleur moyen de tout mal interpréter et rendre le sujet abscons et stérile”. Dans un autre roman, Le jeu des perles de verre, Hesse avertit de la velléité de générer des sens endogènes à travers les mots. Par la bouche du chef d’orchestre, il nous commande de révérer le sens sans pour autant croire qu’il soit susceptible d’enseigner. Bon nombre de grands de ce monde ont échoué dans leurs tentatives. Omar le fort, le deuxième Calife, opprimait les musulmans avant d’embrasser l’Islam, et il est difficile de comprendre comment il a trouvé si soudainement la foi après une lecture de Sourate Taha, à la suite d’une dispute avec sa sœur. A cet effet, Hoffman prend pour témoin Abu Hâmid al-Ghazâlî (XI° et XII° siècles) qui dit, dans ses confessions, que la foi ne s’est pas infiltrée en lui à travers un seul et unique signe tangible, mais à travers la somme d’un nombre incommensurable de causes dogmatiques, assorties d’expériences et de situations dont on peut énumérer les détails, affirmant à la fin que “son retour à l’islam était dû à “une lumière que Dieu a propulsé dans son âme.”
Dans son excellent ouvrage, La Route vers la Mecque, Hoffmann aborde le périple qui l’a mené vers l’islam, le décrivant comme “un coup de foudre venu du ciel”. “Je suis demeuré pendant des années, voire des décennies, attiré par l’islam comme par un aimant, adoptant ses concepts comme si je le connaissais déjà. Trois événements capitaux de nature humaniste, esthétique et philosophique m’y ont orienté. Le premier est organiquement lié à l’Algérie. En effet, en 1960, j’ai passé deux mois à Châteauneuf sur Loire pour parfaire mon français en vue de passer l’examen d’admission aux Affaires étrangères. Pendant ce séjour, je lisais quotidiennement les rapports de la presse française sur la guerre d’Algérie.
“Lors de cet examen d’admission au ministère allemand des Affaires étrangères, chaque candidat doit présenter un exposé ne dépassant pas cinq minutes sur un sujet choisi au hasard. Quelle ne fut ma surprise d’apprendre que le sujet de mon exposé serait “La question algérienne”. Ce qui me surprit davantage était surtout l’étendue de mes connaissances sur cette question. Quelques mois après l’examen et peu de temps avant d’aller à Genève, le responsable du stage, que j’ai rencontré accidentellement – m’informa au cours d’un repas – que ma destination avait changé et que j’étais nommé en Algérie. J’étais en fonction en 1961-62 en Algérie, une période qui s’inscrit dans une guerre de huit ans entre les forces d’occupation française et le Front algérien de Libération nationale, auxquelles s’était ajoutée, pendant ma présence, l’Organisation de l’Armée Secrète, une organisation terroriste française composée de résidents et de militaires rebelles. Pas un jour ne passait sans que des victimes tombassent en grand nombre dans les rues d’Alger. La plupart du temps, ils sont abattus pratiquement à bout portant à la nuque, uniquement parce qu’ils sont des Arabes, ou sont des partisans de l’indépendance de l’Algérie. Généralement, lorsque j’entends des coups de feu, j’appelle par téléphone ma femme, une américaine, afin qu’elle se dépêche de faire les emplettes nécessaires parce que l’attaque suivante dans le même quartier surviendra avant vingt minutes.
“Rapatrier les membres allemands de la Légion étrangère en fuite, avec l’assistance des autorités françaises, était l’une des tâches les plus nobles de ma mission. Le nombre de ces pauvres romantiques était assez grand, depuis la fuite l’année précédente du chef des parachutistes ; comme si la mort les attirait, plusieurs d’entre eux se faisaient recruter par l’OAS dans le cadre de “commandos”, de sorte qu’ils se trouvaient pris entre deux feux. Leurs chances d’échapper à la mort étaient minces, et en tant que représentant du consulat général d’Allemagne, il m’incombait de déposer des fleurs sur un nombre considérable de tombes. Lorsque je cherchais des Allemands parmi les blessés dans les hôpitaux, j’avais constamment mon pistolet à portée de la main. Je me voyais scrutant le visage de tous ceux qui m’approchaient, observant même leurs mains. Les individus évitaient de se trouver face à face, pour des raisons de sécurité. Par moments, ma femme, épouvantée, insistait à protéger mes arrières, marchant à quelques pas derrière moi, un couteau sous le manche de son habit.”
Hoffmann se remémore quelques souvenirs. “Certains souvenirs de cette époque m’attristent encore. Un jour, en route vers le siège de Radio France 5 où je devais faire un exposé, à la demande du Consul général, sur “La situation actuelle de la danse sur scène”, la pompe à essence de ma voiture, une Volkswagen Coccinelle, est tombée en panne dans l’étroite rue tortueuse d’Isly. Peu s’en est fallu avant qu’une file de voiture ne commence à se former derrière moi dans une cacophonie de klaxons. Entre-temps, un homme qui traversait la rue devant moi a été abattu par quelqu’un se tenant sur l’autre trottoir. Il tomba blessé devant l’aile gauche de mon véhicule. L’agresseur me fit signe de poursuivre mon chemin. Mais l’eussé-je voulu que je ne le pouvais pas… l’homme traversa la rue en direction du blessé, sur lequel il tira une seconde fois avant de disparaître tranquillement dans la foule, laissant cette fois l’autre bien mort. Un autre souvenir qui me dépita énormément concerne les membres de l’OAS que j’ai dû regarder, bien malgré moi, allumer le feu dans des voitures qu’ils ont chargés auparavant de barils d’essence avant de les pousser du haut d’une pente vers un quartier habité d’Arabes. Il était normal que tout homme témoin indésirable d’un pareil spectacle s’attende à se trouver sur la liste des morts. Mon coiffeur à El-Abiar le savait bien, car lorsque les forces de l’OAS attaquèrent le bureau du télégraphe qui lui faisait face, dans la rue Gallieni, il retourna son fauteuil pour ne rien voir. Son comportement n’est pas plus étrange que celui du policier qui me proposa, en mai 1962, de garder ma voiture alors que son bureau, dans El-Abiar, s’embrasait derrière son dos.
“Lorsque le président français Charles de Gaulles parvint, en mars 1962, à un accord avec le gouvernement provisoire du Front national algérien de Libération sur un cessez-le-feu pour le mois de juillet, l’OAS intensifia ses opérations terroristes, cherchant à provoquer les Algériens afin qu’ils violent l’accord. Ils ont commencé à exécuter les jeunes académiciens algériens, à abattre par balle les femmes portant le voile. Seulement quelques jours avant la déclaration d’indépendance, ils ont tiré sur un vendeur ambulant dans El-Abiar, le tuant juste devant mon bureau. Cet homme avait vécu pendant des décennies vendant son poisson sans jamais faire du mal à personne. Dans la rue où j’habitais, mes voisins français jetaient des fenêtres sur les vainqueurs tout ce qui leur tombait sous la main, et les produits congelés tombaient sur des monticules d’ordures qui s’accumulaient là depuis des semaines, ce qui faisait le bonheur des rats.
“Ces tristes événements constituent la toile de fond de mon premier contact rapproché avec l’islam. Celui-ci m’a permis de constater à quel point les Algériens supportaient leurs souffrances, leur stricte observance du Ramadan, leur intime conviction quant à la victoire, et leur attitude humaniste en dépit de tout ce qu’ils enduraient. J’étais persuadé que leur religion y était pour quelque chose. J’ai saisi cet humanisme dans tout son lustre lorsque les “événements” courants ont provoqué l’avortement de ma femme. Ce jour, à minuit, lorsqu’elle eut une hémorragie, il était impossible d’avoir une ambulance avant six heures du matin en raison du couvre-feu décrété et de la devise “tirer sans préavis” appliquée alors. Mais à six heures du matin, je me suis rendu compte que l’ambulance ne saurait jamais nous retrouver, l’OAS ayant changé cette nuit les noms de toutes les rues dans le quartier où j’habitais, lesquelles portaient désormais des noms comme “rue Salan”, “rue Yehoud” et “rue de l’OAS”.
“Après un long retard, nous nous dirigeâmes sur la clinique du Dr Simon (peu avant sa destruction par l’OAS) lorsque nous fûmes arrêtés par un barrage de “l’Association républicaine pour la Sécurité”. En dépit de la sirène, le chauffeur n’avançait que très lentement, et comme ma femme sentait qu’elle n’allait pas tarder à s’évanouir, elle se dépêcha, par prudence, de me communiquer son groupe sanguin, RH 0. Le chauffeur algérien, qui a tout entendu, se proposa de donner de son sang, qui était du même groupe. N’était-ce donc pas cet Arabe musulman qui offrait son sang, en temps de guerre, pour sauver une femme étrangère et à sa race et à sa religion ! Aussi me suis-je mis à lire “leur” Livre – le Coran – traduit en français par Pesle/Tidjani, n’était-ce que pour comprendre ce mode de pensée des autochtones et ce comportement, pour le moins étonnant. Depuis, je n’ai de cesse à le lire, aujourd’hui comme hier, encore que – à cette époque – je ne connaissais le Coran que par les bribes entendus à travers les fenêtres ouvertes des écoles coraniques à Mizab, au Sud de l’Algérie où des enfants berbères l’apprenaient et le récitaient dans une langue qui n’était pas la leur. Ce qui poussa mon étonnement à son comble. C’est après que j’ai compris que la mémorisation et la récitation du Coran, considéré comme le message envoyé aux hommes directement par Dieu, sont une obligation pour chacun, quelles que soient les circonstances. J’ai été troublé par la réaction exacerbée d’un Algérien avec lequel je m’entretenais, dans le bar de l’hôtel Transméditerranéen à Ghardaïa, de mes lectures du Coran, qui désapprouva avec une nette franchise toute traduction du Coran, estimant que le seul fait de traduire les paroles de Dieu dans une autre langue est une sorte de blasphème. Je n’ai pas tardé à comprendre sa réaction. En vérité, la langue arabe comporte des termes qui ne sont pas circonscrits dans le temps, en ce sens que certains vocables désignant le futur peuvent tout aussi bien porter sur un événement survenu au passé. Sans compter que la langue arabe comporte des sens qu’un arabe peut déceler par déduction. Qui plus est, il est des mots dont le sens dans deux langues différentes n’évoque que rarement les mêmes considérations ou associations d’idées. Aussi toute traduction du Coran ne peut-elle que dépouiller le terme arabe de son sens et le démunir de son contenu. Ô combien l’homme du bar avait-il raison !
“Mais cette Algérie, à laquelle je dois beaucoup, n’a cesse de me suivre inexorablement, comme une fatalité. Lorsque la Suisse s’occupait de nos intérêts en Algérie, en 1966, je devais maintenir, à partir de l’Ambassade d’Allemagne à Berne, le contact avec le restant des membres de notre mission diplomatique à Alger, par le biais de la section politique de l’ambassade suisse. Le courrier envoyé de Bonn à Alger passait toutes les semaines par mon bureau. Vingt-cinq ans après ma première prise de fonction à Alger, je suis retourné en 1987. Or depuis que j’ai été accrédité en 1990 ambassadeur au Maroc, voisin de l’Algérie, j’ai peine à imaginer que ce pays que j’avais connu pouvait vivre un nouvel épisode aussi tragique. Mais peut-on parler de cela comme d’une simple coïncidence ?
“Une autre expérience, tout aussi importante mais d’une nature purement esthétique et liée à l’art islamique, m’a guidé à l’islam. Le fait est que je suis “amoureux de la beauté”, et ce, depuis ma plus tendre enfance. L’aspect des formes me fascine et me pousse à les pénétrer en profondeur, bien que ma belle-mère américaine disait, selon le principe puritain que la beauté n’est qu’une question superficielle, un leurre en surface. En 1951, lorsque je reçus la première tranche de la bourse d’excellence que le ministère de la Culture de Bavière accordait aux “surdoués”, je m’en suis servi intégralement pour payer une copie imprimée sur de la joute du tableau de Paul Gauguin, intitulé Vahine no te vi (la fille au mango). Je n’étais pas alors de ceux qui habitent au quartier Maximilianeum, à droite du fleuve Isar, mais dans l’une des “colonies” des révolutionnaires démocrates, à l’esplanade Masman, où ouvriers et étudiants se partageaient les chambres. J’ai donc transporté ce tableau de Gauguin dans ma chambre où je me suis mis à l’analyser. Peu m’en a fallu pour me convaincre que l’influence esthétique de l’art figé – dessin, sculpture, architecture, calligraphie, ou les œuvres d’art mineures – est due au mouvement statique. C’est donc de la danse qu’il dérive. C’est pour cela que nos sens devant la beauté des arts plastiques s’intensifient toutes les fois que leur capacité d’évoquer le mouvement s’accroît. C’est ce qui explique pourquoi la danse m’éblouit, me poussant à assister à toutes les représentations de ballet présentées au théâtre Prinzergenten à Munich. Depuis, mon intérêt pour la danse s’est développé au point d’englober tous les domaines qui lui sont associés. Je passais tous mes moments de loisirs en dehors des heures du tribunal dans les salles de représentations de ballet proches du palais de justice. Je me suis inscrit aux cours de ballet, uniquement pour en comprendre l’essence, abstraction faite de mes médiocres performances. En définitive, cet art s’appuie sur un prodigieux effort corporel, et j’ai appris à distinguer, par exemple, entre les différents mouvements et leurs méthodes d’exécution.
“L’école russe Lonovan Zakhnovski, qui vit en exil, est celle qui me captivait le plus. Des étudiantes de noble ascendance, telles Angela Albricht, y ont été éduquées. C’est à cette école qu’a appartenu, au milieu des années 50, le “Ballet Zakhnovski” à travers lequel nous avions présenté des représentations de haut niveau à Munich et dans d’autres villes de Bavière. J’étais responsable des contrats, de la publicité, de l’éclairage et de l’unité de maquillage. J’ai créé, à Munich, en 1955, conjointement avec Karl Victor Prinzovid, le groupe des amis du Ballet ; nous étions tous les deux d’ailleurs chargés de la rubrique critique du Ballet dans le journal du soir de Munich.”
Et Hoffmann de poursuivre : “L’on peut résumer les étapes subséquentes de ma vie comme suit : Entre 1954 et 1980, j’ai travaillé comme critique de ballet pour le compte de journaux allemands, britanniques et américains, couplé, entre 1971 et 1973, de la fonction de professeur chargé de cours sur l’histoire et l’esthétique du ballet à l’Institut de Danse de Cologne. J’ai adressé des notes au Ministère allemand de la Culture relatives à la création d’un ballet national allemand. D’aucuns de mes connaissances ignoraient que c’était le droit et la diplomatie, et non le ballet, qui étaient mes fonctions principales. Parmi les ouvrages qui m’ont le plus imprégné était celui de Gilbert et Kunz, sur l’histoire du beau en tant que philosophie. J’étais un passionné du ballet, et je cherchais à appréhender les causes qui, dans cet art qui personnifie la musique, nous amènent à percevoir la beauté des choses ou des mouvements. Aussi ai-je passé des semaines entières dans l’une des forêts de Bavière à rechercher les bases de la beauté du mouvement. C’est là que j’ai compris que la beauté vraie du corps humain est ressentie par l’homme en fonction de critères qui lui sont propres. Cela s’applique également aux critiques visuels, dont je suis, et qui sont influencés par les images que la nature nous transmet. Sans compter que nous percevons les images dans la direction où nous écrivons, selon qu’on est gaucher ou droitier. J’ai constaté également que les variations rythmiques retiennent notre attention en raison des impressions qui lui sont inhérentes, et que nous sommes surtout éblouis par les mouvements inertiels car nous croyons, dans notre imagination, qu’ils s’étendent vers l’infini. C’est en partant de cette optique que l’art islamique a pris, pour moi, une dimension qui insuffle autant d’exaltation dans son immobilisme que dans les mouvements abstraits du ballet, où le pouvoir humain, le mouvement interne, et l’extension vers l’infini s’inscrivent dans un ensemble parfait, et ce, dans le cadre de la spiritualité intrinsèque à l’Islam.
“En observant l’architectonique des constructions, tels l’Alhambra de Grenade et la Grande Mosquée de Cordoue, j’ai été amené à reconnaître que pareils édifices sont nécessairement représentatifs d’une civilisation prodigieuse. J’ai alors compris ce que voulait dire Reiner Maria Relka qui écrivit, après sa visite à la Cathédrale de Cordoue : “…J’ai été pris d’une haine féroce pour le christianisme depuis ma visite à Cordoue. Je lis le Coran qui, pour moi, s’incarne en une voix qui m’investit de sa force irrésistible et dans laquelle je m’engouffre comme l’air dans un tuyau d’orgue”. L’art islamique devint un univers d’esthétisme, tout comme le fut naguère le ballet classique. Mais si les arts grecs, romains ou gothiques des époques passées, ou les arts de la Renaissance et du rococo sont impressionnants et témoignent du génie de leurs civilisations respectives, aucun ne m’émeut avec autant d’intensité que l’art islamique.”
Notes:
1- (NDT) Abu Hâmid Muhammad Al-Ghazâli, connu sous le nom d’Algazel, théologien et penseur de l’islam (1058-1111). Son œuvre principale Ihyâ ‘ulûm al-dîn (Revivification des sciences religieuses) est l’un des documents primordiaux pour la connaissance des sciences et de la foi islamiques. Sa doctrine religieuse conservatrice fut essentielle dans l’évolution de l’islam.